lundi 21 mai 2012


La fiancée du vampire.

"Dark Shadows" de Tim Burton (USA); avec Johnny Depp, Eva Green, Jackie Earle Haley, Michelle Pfeiffer, Jonny Lee Miller, Chloe Moretz...

En 1752, Joshua et Naomi Collins, accompagnés de leur jeune fils Barnabas, quittent Liverpool pour le Nouveau Monde, afin d'y commencer une nouvelle vie en y important leur technique de pêche industrielle. 20 ans plus tard, ayant fait fortune et étant devenu un véritable bourreau des coeurs, Barnabas rêgne sur la ville de Collinsport et le manoir familial de Collinswood. Hélas, il commet un jour l'erreur de briser le coeur de la belle Angélique Bouchard. Or, celle-ci est une sorcière qui va jeter sur Barnabas une terrible malédiction et le transformer en vampire. Plus de deux siècles plus tard, celui-ci est tiré accidentellement de son sommeil et se retrouve plongé en 1972 dans un monde totalement transformé... A l'image de ses étranges descendants...

Ah oui, c'est sûr, les détracteurs de Tim Burton auront encore ici du grain à moudre.
D'ailleurs on l'entend déjà depuis plusieurs semaines: "est-ce qu'il ne ferait pas toujours le même film ?".
La question est d'autant plus légitime que - en plus ! - il s'agit ici du septième (et du quatrième consécutif) mettant en vedette son presque alter-égo Johnny Depp.
Et d'ailleurs, bien qu'étant fan des deux, s'il y a quelque chose que je regrette, moi, peronnellement, c'est plutôt ça.
Ce serait quand même bien de voir Depp évoluer dans d'autres univers et Burton essayer de modeler d'autres acteurs à sa patte mais baste...

Pour le reste, la question ne se pose pas tellement ou plutôt se pose autrement.

Il y a certes un univers burtonien (bien que celà même soit réducteur, on devrait plutôt dire "des") mais il est multiple et kaléïdoscopique, fait d'une multitude de couches, de touches, de marques, de couleurs et de signes que le cinéaste se plaît à assembler différement au gré des films pour en faire quelque chose de chaque fois différent... tout en restant, allez, disons... semblable.
Ah oui, certes, il a ses obsessions et ses référents stylistiques.
Mais c'est bien là l'apanage des grands auteurs, non ?
Surtout quand, comme lui, ils les mettent au service de genres différents.
Comics, contes, S.F., horreur, comédie musicale, classique de la littérature enfantine ou, comme ici, série tv.

Et c'est d'autant plus prégnant dans ce film-ci, où le réalisateur signe à la fois un retour à ce qu'il sait faire de mieux (le gothique "flamboyant") et une sorte de film-somme qui lui permet de brasser large, que ce soit dans l'humour, le romantisme, le psychédélisme échevelé, le kitsch outrancier ou la référence ouvertement rock'n'rollienne (avec la complicité d'Alice Cooper himself dans son propre rôle).

Bref, un film qui revisite son univers tant avec maîtrise (direction artistique ultra-léchée, fluidité des cadrages, effets spéciaux "à l'ancienne") qu'autodérision.


Un film qui se permet qui plus est un peu de fond en parodiant les histoires de familles à tiroir et leurs démons tout en égratignant la mode actuelle des films de vampires en intégrant ce nouvel arrivant au bestiaire personnel de son auteur.

Dans le rôle du nosferatu en titre, Johnny Depp, bien que lunaire et décalé comme à son habitude, signe une composition originale et des plus jouissive.
Son maintien, son phrasé et la "désynchronisation" permanente entre son personnage et les us et coutumes du Summer of Love sont d'ailleurs pour beaucoup dans la réussite comique de l'affaire.

Mais il est aussi extraordinairement bien entouré: Eva Green, ensorcelante, Michelle Pfeiffer qui prouve qu'elle a encore de beau restes et Chloë Moretz, impeccable en ado à la fois rock'n'roll et désabusée rajoutent encore à la réussite de ce petit film pétaradant et joyeusement outrancier, dans lequel Tim Burton rend lui aussi hommage à la Hammer, à "La Famille Addams", à Disney ou à son maître Roger Corman.

Tout ça dans un film dont le thême principal est finalement la famille...

Mais alors... Attendez un peu...

Et si "Dark Shadows", en plus d'être drôle et émouvant et d'être un divertissement des plus accomplis, était aussi un peu plus que ça ?

Si c'était un film sur la filiation, sur la transmission...
Un film sur l'héritage artistique...

Et si c'était du coup un film SUR Tim Burton ?

Ce serait à coup sûr la plus belle pirouette de sa carrière.

Ah ben ! Sacré Tim, quand même !


Cote: ***

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