mercredi 30 juillet 2008

Heroes and Icons...


(Un Après-Midi de Chien; Sidney Lumet - 1975)


Supergraaaaaaave.

"Hancock" de Peter Berg (USA); avec Will Smith, Charlize Theron, Jason Bateman, Eddie Marsan, Johnny Galecki, Daeg Faerch...

John Hancock n'est pas un super-héros comme les autres. Oh, certes, il sauve des gens, il arrête des méchants, c'est un super-justicier... Mais il picole, il est dépressif, je-m'en-foutiste, maladroit. Il a mauvais caractère, il est irascible et ses méthodes pour le moins... expéditives ont tendance à provoquer pas mal de dégats. Bref, il coute cher à la communauté et n'est finalement pas très apprécié du public, loin s'en faut. Alors que sa cote de popularité est au plus bas, il sauve la vie de Ray Embrey, un spécialiste en relations publiques qui, pour le remercier, décide de le relooker et de changer son image.

Il y a quelque chose d'éminemment jouissif dans "Hancock".
Quoi que de plus drôle et de plus sympathique qu'un super-héros à ce point politiquement incorrect?
Une vraie tête de lard et tête de mule, bourré comme un coing du matin au soir, mal rasé, suant, dormant sur les bancs, qui se soucie comme d'une guigne des conséquences de ses actes et de ce qu'on peut bien penser de lui.
Qui vole à la rescousse de la veuve et de l'orphelin saoul comme trente-six moujiks en volant de travers et en causant plus de dégats sur son passage que ceux qu'il poursuit, coutant de ce fait un pont à la municipalité et à ses administrés qui finissent par le haïr alors qu'ils devraient le remercier.

Un sujet en or, qui permet d'une part au toujours très à l'aise Will Smith de déballer un grand numéro de coolitude cynique et décalée et, d'autre part, au très prolixe et protéïforme acteur-réalisateur Peter Berg de briller au volant d'un blockbuster malin, à la réalisation quand même très trèèèèès efficace et aux effets spéciaux soufflants (rien que la course-poursuite qui ouvre le film vaut son pesant de violettes).

Un scénario malin, qui démythifie quelque peu le personnage emblématique de la culture ricaine moderne, le super-héros, donc, en le prennant à contre-poil, en explorant le côté obscur (mais drôlatique) de la Force et en le montrant comme un imbécile irresponsable, imbu de lui-même à force de se sentir trop investi d'une hypothétique "mission", intervenant dans la vie des gens sans qu'on le lui demande et semant finalement plus de désolation qu'autre chose sur son passage.

Ca c'est pour la première partie du film, impeccable, drôle et admirablement menée jusque dans l'opposition entre un Will Smith impérial et les personnages dits "normaux" qui l'entourent (Charlize Theron, magnifique d'ambiguïté réfractaire et surtout Jason Bateman, parfait dans son rôle de "pilier rationnel").

Hélas, trois fois hélas, après un twist percutant parce que vraiment inattendu, le film s'encrouille, s'enferre et manque - oui, heureusement il ne fait que manquer - de s'effondrer comme un soufflé.

Et pourtant, ce twist est parfait en ce qu'il finit par construire autour des personnages une mythologie tout à fait originale et parfaitement romantique. Une mythologie malheureusement sous-exploitée...

La faute à Peter Berg, qui n'arrive pas à tirer tout le potentiel du matériau pourtant exceptionnel qu'il a entre les mains et qui, entre quelques morceaux de bravoure cinématographiques il est vrai, finit par faire retomber "Hancock" dans les limites du film d'action lambda, plein de rebondissements et devant lequel on ne s'ennuie jamais, c'est sûr, mais qui n'atteint jamais les sommets que ses prémices laissaient pourtant entrevoir.

Trop d'ellipses, un background pas assez exploité et une happy-end des plus malheureuse au vu des possibilités extrèmement sombres, pessimistes même, que le réalisateur avait à sa disposition finissent de plomber la deuxième partie du film.

Dommage, oui. Vraiment dommage...

Mais il faut savoir aussi reconnaitre les qualités de l'engin, plutôt hors norme, et pouvoir les savourer.

Balayons donc nos réticences pour ne garder à l'esprit que cette première partie quasiment en apesanteur - sans mauvais jeu de mot - et cette tentative bancale, certes, mais hautement méritoire de relecture d'un mythe moderne par la bande, gentille transgression des codes d'un univers issu de la BD.

Transgression évidemment plus humoristique que philosophique pour un film au final assez inégal... mais qu'on ne peut pas s'empêcher d'aimer quand même.

Malgré tout et surtout malgré lui...


Cote: **

lundi 28 juillet 2008



Broudges-la-Morte.

"Bons Baisers de Bruges" (In Bruges) de Martin McDonagh (UK); avec Colin Farrell, Brendan Gleeson, Ralph Fiennes, Clémence Poésy, Jérémie Renier, Elizabeth Berrington...

Après un contrat qui a mal tourné, deux tueurs à gages sont envoyés à Bruges par leur patron afin de se faire oublier quelques temps. Alors que le premier, plus jeune et plus bas-de-plafond, s'ennuie et déteste d'emblée la ville, son collègue, plus âgé mais aussi plus cultivé, se laisse prendre aux charmes de la Venise-du-Nord. Le temps passant et restant sans nouvelles de leur commanditaire, les deux hommes, désoeuvrés, vont aller au devant de bien étranges rencontres. Jusqu'à ce que le coup de fil tant attendu relance la machine dans une direction que personne n'attendait...

Bonne, pour ne pas dire excellente, surprise que ce petit film que l'ont croyait "gadget" et qui nous était vendu comme une énième "tarantinade" mâtinée d'un zeste de Guy Ritchie (après tout, c'est un film anglais et c'est d'ailleurs peut-être ce qui fait toute la différence), le tout passé à la ponceuse de l'inévitable - et souvent insupportablement tarte-à-la-crème- "surréalisme à la belge".

La surprise en question résidant essentiellement dans le fait - Eh oui! C'est paradoxal mais justement - qu' "In Bruges" est un peu tout cela à la fois.
Mais pas seulement.
Et surtout que tous ces ingrédients qui, traités à la louche voire à la truelle par un quelconque branleur US auraient donné naissance à un indigeste cake de lieux communs glâcé au mauvais humour et emballé façon clip, débouchent ici sur un petit film étonnant, léger, presqu'en apesanteur même, malgré son sujet et ses débordements (divers et multiples).

Le fait est que, sans doute grâce à Bruges elle-même, son ambiance et la manière quasi onirique dont elle est filmée ici, le film tout entier baigne dans une sorte de nonchalance, voire de nostalgie qui lui donne un ton et une saveur tout à fait particuliers.

Son rythme très lâche, qui pourrait même passer pour de la lenteur, lui confère une esthétique à part.
Avec d'étranges pauses qui, elles aussi, pourraient se transformer en longueurs, ne serait-ce ce montage étonnant, qui finit par rendre palpable l'état d'attente dans lequel se trouvent les deux hommes et ce scénario, finalement plus intelligent que roublard, qui, de rebondissements en rebondissements, n'a de cesse de faire monter la tension jusqu'à l'éclatement final (et c'est peu dire qu'au final, tout le monde morfle).

Une des bonnes idées du néophyte McDonagh est également de se servir de la ville (qui est un personnage à part entière du film) et de cette ambiance plus "flamande" que vraiment belge pour contourner les clichés inérents à ce genre d'oeuvre qu'on pourrait presque qualifier de "touristique"...

Pas ou peu de clichés (la bière, les moules, les frites, ce genre de choses...) mais une approche quasiment "historique" de la ville et de ses habitants qui en font l'écrin idéal d'une histoire finalement très sombre mais contée avec un humour salutaire.
Et si la Belgique en tant que pays est parfois égratignée, on a le bon goût de laisser les belges eux-même en dehors du coup (en dehors d'une blague hilarante où il est question de chocolat et de pédophilie).

Quand on sait en plus que les dialogues sont excellents et souvent drôlissimes, que le film est servi par un casting haut de gamme (les trois acteurs principaux sont vraiment à tomber par terre, chacuns dans leur genre) et que le suspense - et une violence très graphique - sont également au rendez-vous on se dit que, finalement, ce petit film qui semble avoir bénificié d'une sortie presque "technique" restera sans doute comme l'un des bons moments cinématographiques de l'été.

Et qu'il aurait été dommage de passer à côté...

Wé!


Cote: ***

mercredi 16 juillet 2008



C'était vraiment très intéressant...

"La Personne aux Deux Personnes" de Nicolas et Bruno (F); avec Daniel Auteuil, Alain Chabat, Marina Foïs, François Damiens, Joey Starr, Frédéric Beigbeder...

Gilles Gabriel, chanteur 80's sur le retour, meurt dans un accident de voiture provoqué par le terne et ringard Jean-Christian Ranu, comptable à la COGIP. Mais Gilles n'est pas vraiment mort; l'accident l'a en quelque sorte "transféré" dans le corps de Jean-Christian. Lequel ne comprend pas d'où vient subitement cette voix qui parle dans sa tête...

Oui, c'est assez bien barré.

Alors autant le dire tout de suite: allergiques au nonsense, au too much, au kitsch et surtout à l'humour "Canal" tel qu'incarné jadis - entre autres - par les Nuls; passez votre chemin.
Prenez vos jambes à votre cou et fuyez.
Vite!
Et loin!

Pour les autres...

Eh bien pour les autre, c'est du caviar!

Nicolas et Bruno, souvenez-vous, c'était les deux fous furieux responsables du "Message à Caractère Informatif", une capsule de quelques minutes dans laquelle ils détournaient de vieux films institutionnels, souvent allemands ou provenant des Pays de l'Est, en les remontant et en les doublant de manière totalement décalée et délirante.
On retrouve d'ailleurs ici leur goût étrange, proche du fétichisme, pour le milieu du travail.
Pour l'entreprise, ses codes et son décorum.
Ainsi qu'un penchant affirmé pour les années septante et quatre-vingt, tant dans la musique que dans les costumes et les décors, riches et châtoyants.
Odieux, pour tout dire.
Et hilarants!

Car l'utilisation quasi cauchemardesque de ces stéréotypes ainsi que le détournement astucieux du décor néo-ceaucesquien de la Défense, à Paris, sont aussi pour beaucoup dans la réussite de l'entreprise (Achtung! Kolossal JEU DE MOTS!).

Le reste tient en un jusqu'au-boutisme maniaque (n'oublions pas, quand même, que le film tout entier tient sur une et une seule idée) et en un timing burlesque presque surhumain, personnifié par un Daniel Auteuil à la limite du méconnaissable, présent de manière quasi permanente à l'écran - et la plupart du temps tout seul en plus - et faisant preuve d'un abattage qu'on ne lui connaissait plus, ou si peu, depuis longtemps, habitués que l'on était finalement à le voir évoluer en des terres plus dramatiques (le mot est faible).
Depuis presque vingt ans déjà...

Mais il serait injuste d'oublier ses deux seuls vrais partenaires (oui, le reste est anecdotique ou de l'ordre du caméo de luxe - voir ci-dessus): Alain Chabat, présent physiquement dans seulement trois scènes mais omniprésent par la voix, servant avec son bonheur habituel des dialogues qu'il semble avoir écrits lui-même tellement ils roulent avec une facilité déconcertante et bien sûr Marina Foïs, impériale en salope psychorigide dépassée par les événements.

Le problème, évidemment - mais il est minime, surtout au vu de la durée de l'engin - c'est que cette bonne idée de départ peine parfois un peu à tenir la longueur.
Mais grâce à l'investissement de ses interprètes, à l'efficacité de ses situations et grâce aussi à un épilogue pour une fois impecablement amené, on finit par passer le cap avec bonheur et en souplesse.

Et puis, surtout, une chose est sûre; on rit! Et pas qu'un peu!

Et comme après tout, c'était le but... Hein...


Cote: ***

mardi 15 juillet 2008



Géant Vert 2.0. (ou Le retour du Slip en Plasticine).

"L'Incroyable Hulk" (The Incredible Hulk) de Louis Leterrier (USA); avec Edward Norton, Liv Tyler, Tim Roth, William Hurt, Tim Blake Nelson, Ty Burrell...

Planqué au fin fond d'une favela brésilienne, le scientifique Bruce Banner cherche désespérément un antidote à l'effet des rayons gamma qui l'ont jadis irradié et le font se transformer en Hulk dès qu'il est la proie d'une émotion un peu violente. Repéré par le général Ross qui compte toujours l'utiliser pour créer une race de soldats indestructibles, il est contraint de rentrer subitement aux Etats-Unis...

Il y a deux choses vraiment incroyables dans cet "Incroyable Hulk"...

La première - et non des moindres - c'est qu'on tient enfin l'explication définitive du pourquoi du comment du Terrible Mystère du Froc qui ne Craque Jamais!!!!

-"Comment se fait-il que ce gus qui quintuple de volume lors de chacunes de ses transformations, envoyant valdinguer l'intégralité de ses fringues en micro-particules, parvienne néanmoins à chaque fois à garder son froc suffisament intact pour préserver à la fois sa pudeur (légitime) et la morale (ou du moins le politiquement correct. Imaginez quand même la taille qu'aurait l'engin. Tout vert!)?" nous demandions-nous, haletants (tant et si bien que les scénaristes de ce nouvel opus se sont visiblement sentis obligés de trouver une réponse à nos interrogations)!

Eh bien c'est simple: il achète des pantalons en stretch et il les prend de surcroit en taille XXXXXXXXXXXL (SI, ça existe! Surtout chez les amérikis!).
Suffisait d'y penser!
Et nous avons droit ici non pas à une mais bien à deux scènes qui nous l'expliquent!
Ouf! On dormira bien mieux.

La seconde, un tantinet plus sérieuse, c'est que cet affreux tâcheron frenchie qu'est Louis Leterrier ("Le Transporteur", "Danny the Dog"...) a réussi peut-être pas le miracle ni même l'exploit - n'exagérons rien - mais en tout cas la gagueure de plutôt réussir son film, là où son prédécesseur, le pourtant assez doué et surtout multi-Oscarisé (et primé de Venise à Berlin) Ang Lee n'était parvenu qu'à nous gratifier d'une pitoyable bouse.

Pas difficile, me direz vous. Oui mais quand même...

Alors attention, que l'on ne se fourvoie pas: cet "Incroyable Hulk" n'est certainement pas un chef-d'oeuvre... Loin s'en faut...

Comment aurait-il pu en être autrement, d'ailleurs, au vu du sujet (un type qui se transforme en Géant Vert dès qu'on lui pique sa montre, faut avouer...) et des limites encore bien trop visibles des effets spéciaux en CGI, même si depuis le précédent on a fait quelques progrès en la matière...

Non, non mais quand même...
Faut avouer que Leterrier réussi quand même à remplir plus qu'efficacement son contrat, fournissant un film pas trop mal torché (même s'il fourmille de maladresses comme le plan d'ouverture sur la favela, par exemple: ooouuuhhh, la vilaine maquette!), riche en scènes d'actions étonnament lisibles, avec un très joli méchant (Tim Roth en Abomination, un régal, évidemment), un sous-texte pas trop neu-neu (grâce en soit rendue à l'interprétation sans faille d'un Edward Norton très concerné) et même une histoire d'amour - le talon d'Achille de ce genre de film en général - crédible et pas trop envahissante.

Reste que l'ensemble se prend un peu trop au sérieux (et les rares tentatives d'humour sont carrément terrifiantes), que William Hurt fait peine à voir en général steïf à la moustache passée au talc et que les films de super-héros qui se terminent d'office sur un bièsse duel entre les deux gros monstres ça commence un peu à bien faire.

Mais bon, allez...

Quand on s'attendait à si peu on peut bien se réjouir qu'il y ait un peu de rab' inattendu, non?


Cote: **