lundi 31 août 2009



Once upon a time, in Nazi occupied France...

"Inglorious Basterds" de Quentin Tarantino (USA); avec Brad Pitt, Mélanie Laurent, Christoph Waltz, Diane Kruger, Daniel Brühl, Eli Roth...

1940. La jeune Shosanna Dreyfus échappe de justesse aux griffes du colonel nazi Hans Landa qui vient de décimer toute sa famille. Réfugiée à Paris, elle refait sa vie en exploitant une salle de cinéma. Quatre ans plus tard, quelque part en Europe, le lieutenant Aldo Raine forme un groupe de soldats juifs américains chargé de mener des actions punitives particulièrement sanglantes envers les nazis. Le destin de ces "bâtards" - chargés d'une mission secrète visant à éliminer les plus hauts dignitaires allemands - et celui de Shosanna, mue en ce qui la concerne par un désir de vengeance beaucoup plus personnel, vont se croiser dans la capitale française à l'occasion d'une avant-première pour le moins explosive.

Oui, pour le coup - et une fois n'est pas coutume - autant se servir directement de la tagline pour mettre les points sur les "i".
Et expliquer d'entrée de jeu que si l'on veut trouver ici de la vraisemblance historique - ou même quelque chose qui ressemblerait de près ou de loin à un film de guerre "sérieux" (quoi que cela puisse vouloir dire) autant carrément passer son chemin.

Car s'il y a bien quelque chose que le grand foutoir guerrier bidouillé par Tarantino n'est pas c'est sérieux, justement.

Au contraire, ça part tellement dans tous les sens, c'est tellement toujours parfaitement branquignol, foutraque, à la limite de la parodie et du burlesque que ça en donne parfois l'impression de regarder "La Grande Vadrouille" avec Brad Pitt.

Mais, aurait-on aussitôt envie de dire (quelle bête expression, oui): et alors, bon sang de bois? Et alors?

Complètement ludique et jubilatoire, "Inglorious Basterds", qui compile pour notre plus grand plaisir le meilleur de Tarantino dans un récit plein et presque fulgurant, d'une grande maîtrise et (par rapport à ses précédents efforts) d'une grande simplicité formelle se présente comme une sorte d'hénaurme montagne russe pop-art devant laquelle il est une fois encore absolument impossible de s'ennuyer.

Mêlant western, film de guerre, comédie pure, mélodrame et film d'horreur avec sa volubilité et sa désinvolture habituelle, Q.T. rend ici un hommage des plus vibrant à sa passion de toujours: le 7ème art.
Et il le fait avec un plaisir tellement communicatif qu'on lui pardonne tout, même les pires excès, même son final pétaradant, même le culot monstre qui l'ammène de manière très potache et finalement aussi très américaine à complètement réécrire l'histoire.

Car oui, bien sûr, ça va jusque là !

Mais le scénario, toujours surprenant, avec ses pleins et ses déliés qui le forcent à quitter des personnages que l'ont croyait cruciaux pour s'attacher à d'autres, apparemment secondaires, sa manière de laisser de côté les chemins balisés pour digresser, mutliplier les intrigues secondaires quasiment à la façon d'un film à sketches - et les dialogues, ébouriffants et certainement beaucoup plus inspirés et moins verbeux que dans son précédent "Boulevard de la Mort", font que l'on s'attache à cette grand-guignolade bigger than life finalement tellement proche de l'image que renvoie de lui son auteur.

Rajoutons à ça* l'un des plus beaux personnages de méchants aperçus à l'écran ces dernières années, interprêté avec une jubilation presque palpable par l'excellentissime Christoph Waltz** (qui donne au passage raison au précepte de ce bon vieil Hitchcock qui veut que plus le méchant est réussi, meilleur est le film) et l'on se retrouve au bout du compte en présence de l'un des plus jolis plaisirs, cinématographiques mais néanmoins coupables, vus en salle depuis...

Oh, depuis belle lurette, tiens !

Et puis, hein, after all, que le premier qui n'a jamais ri au moins une fois, même bourré, même ado, devant "La Grande Vadrouille" me jette la première pierre, Pierre !


Cote: ****

(*ainsi que la plus belle utilisation de "Cat People" de Bowie jamais vue et entendue à l'écran)

(** mentions "très bien" également à Brad Pitt qui se la joue Lee Marvin et surtout à ces dames, Mélanie Laurent et Diane Kruger)

lundi 24 août 2009



Le retour de la braguette magique*.

"Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé" (Harry Potter and the Half-Blood Prince) de David Yates (USA); avec Daniel Radcliffe, Emma Watson, Rupert Grind, Michael Gambon, Alan Rickman, Jim Broadbent...

Alors que l'étau de Voldemort se resserre de plus en plus sur Poudlard, Dumbledore et son jeune disciple Harry Potter tentent de manipuler le professeur Horace Slughorn, qu'il soupçonnent de détenir des informations capitales sur la jeunesse du sorcier maléfique. Mais Harry et ses amis sont également confrontés à des défis bien plus terre à terre: ceux de l'adolescence.

Bon.

Bien.

Nous voici donc confrontés à un défi inédit: chroniquer un Harry Potter.

Car enfin, pour passionante que soit la saga - faut bien l'avouer - que dire sur un film de ce genre, surtout isolé de ses petits frères?
Qu'en dire?
Que dire?
Que dire: que dalle !

Parce que, oui, bon, allez, il est beaucoup mieux que le précédent "Ordre du Phoenix".
Certes, certes...
Mais avouons que ce n'est pas bien difficile vu l'indigence de ce précédent opus, clairement le plus faiblard d'une série par ailleurs globalement d'assez bonne tenue (mention très bien aux épisodes 3 et 4, qui eux surnagent largement).

Mais à part ça?

Eh bien à part ça - trève de digressions et de plaisanteries - pas mal de choses en fait...

D'abord, la réalisation assez approximative du finalement presque novice David Yates semble légèrement se décanter, voire s'affirmer...
Oh, bien entendu, on n'atteindra jamais la cheville d'Alfonso Cuaron et de son "Prisonnier d'Azkaban" mais baste, pour le moment ça fera l'afffaire.
Et même largement, tiens (cfr. les séquences d'ouverture, quand même pas mal inspirées).

Deuxièmement - et c'est d'ailleurs là que se situe tout l'intérêt du film - c'est qu'un bon gros trois quart est assez intelligemment, voire presque subtilement (n'oublions pas que la série s'adresse AUSSI à des ados. Mouarf !) consacré aux atermoiements sexuello-sentimentaux du trio de tête (et plus si affinités voire dommages collatéraux) avec tout ce que cela suppose de bouillonnements, revirements, pleurnichages et sautillements de joie divers et variées (plus quelque scènes de comédie assez réussies, comme celles qui impliquent les philtres d'amour par exemple).

Le tout renvoie de manière assez heureuse au très bon épisode dit de la "Coupe de Feu", qui posait les bases de ces imbroglios... pubertaires.

Au point même de risquer de faire passer l'intrigue proprement dite, pourtant riche en rebondissements et autres retournements de situations celle-là, au second, voire au troisième plan.

Or, et c'est sans doute là que réside la force de J.K. Rowling et de l'armada de scénaristes qui l'adaptent pour l'occasion, il n'en est rien...

Que du contraire, c'est de manière assez souple que les révélations concernant la saga - touffue s'il en est - passent outre ces écueuils narratifs pour livrer un film plus riche et plus intéressant que son terne prédécesseur.

Niveau fantasy, le cahier des charges est quant à lui bien respecté, avec ce qu'il faut d'action, de décors flamboyants et d'effets spéciaux en tout genre, même si en l'espèce un peu moins riches en bébêtes et autres cocasseries "fantastiques".

Pour le reste, et même s'il est parfois traversé d'éclairs d'un humour salutaire, l'épisode 6 se distingue également par son côté beaucoup plus sombre, à l'image évidemment de sa chute, ce qui semble être une tendance chronique - et allant largement crescendo - de la série (ça peut sembler normal à qui a lu les bouquins, mais comme ce n'est pas mon cas).
On en est presque à se demander jusqu'où ça va aller dans le drame (je plaisante... Quoi que...).

Les masques tombent, les révélations pleuvent, des personnages clés disparaissent, d'autre tombent tellement du côté obscur de la Force que ça finit presque par flanquer les jetons....
Bref...
Bref. Eh bien, l'un dans l'autre, peut-être pas le meilleur de la série mais un opus plus qu'honorable, bien qu'un peu longuet.

Tout comme cette chronique, d'ailleurs, dont j'ai quand même fini par me dépatouiller et qu'il est grand temps de clore.

Allez, courage ! Encore deux et c'est fini !


Cote: *** (cotation spéciale "Harry Potter", dans l'absolu ça vaut **)


(*Je sais, je sais... Pardon !)

dimanche 23 août 2009



Dillinger est mort?

"Public Enemies" de Michael Mann (USA); avec Johnny Depp, Marion Cotillard, Christian Bale, Lily Taylor, Billy Crudup, Leelee Sobieski...

Dans l'Amérique de la Grande Dépression, le parcours criminel de John Dillinger, braqueur de banques hors-normes, considéré par J. Edgar Hoover comme l' "ennemi public numéro un" et traqué sans relâche par l'agent fédéral Melvin Purvis.

Ne nous laissons pas déstabiliser par les pisse-froid et considérons d'emblée ce "Public Enemies" pour ce qu'il est.
A savoir un film important pour son auteur, pour son interprète principal et pour le cinéma en général.

En effet, à l'instar de "L'Assassinat de Jesse James..." d'Andrew Dominik, qui revisitait et redéfinissait de manière impressionnante les codes du western, ces "Ennemis..." dynamitent ceux du film de gangsters.
Et donnent à voir en cela ni plus ni moins qu'une nouvelle proposition de cinéma.

L'idée formidable - pour ne pas dire "géniale" - de Michael Mann étant de nous proposer un film historiquement "accurate", comme disent nos amis anglos-saxons, avec une reconstitution d'époque impressionnante de minutie, tout en le transcendant littérallement par l'usage ultra-moderne qu'il fait de la vidéo HD et de la caméra portée.
Le tout donne au film un cachet étonnamment réaliste.
De ceux que l'on n'a en tout cas pas l'habitude de trouver dans des productions de cet acabit.
Sans rire (mais est-on vraiment là pour rigoler, je vous le demande?), le procédé permet même, par instant, de se croire carrément à l'intérieur du film.
Voire donne l'impression de visionner un documentaire.

D'un point de vue narratif, la mise en parallèle évidente de la crise de 29 avec celle que nous traversons actuellement et le portrait de Dillinger en Robin des Bois moderne nous vengeant de nos ennemis les méchants banquiers renforce brillament le côté déjà presque post-moderne de l'affaire.

Pour ce qui est de Michael Mann lui-même, ce nouvel opus, bien que visuellement splendide (la photo de Dante Spinotti est à tomber par terre) et techniquement maitrisé (le montage, lui aussi, est un modèle du genre et contribue beaucoup à fluididier la manière parfois curieusement élliptique dont avance l'histoire) lui offre sans doute surtout ce qui restera comme son film le plus populaire - comme en témoigne d'ailleurs son succès Outre-atlantique - et permettra enfin de mettre définitivement sur la carte un cinéaste qui le méritait de longue date.
Et y est arrivé de longue lutte.

Comme qui plus est le film se paye le luxe de receler en son sein deux trois scènes d'anthologie*, de celles qui rentreront au Panthéon des "Grands Classiques Américains" (excusez du peu), on se dit qu'il ne devrait pas non plus échapper à la reconnaissance de ses pairs (les paris pour les Oscars sont d'ores et déjà ouverts).

Ce côté populaire en même temps qu'excitant fait de "Public Enemies" son film le plus réussi.

Reste évidemment - pour finir de convaincre - à évoquer l'interprétation.

Car outre un défilé de stars et de seconds couteaux impressionnant (parfois juste pour de simples apparitions), "Public Enemies" est avant tout le véhicule somptueux d'un non moins brillant quatuor.

Johnny Depp, sobre comme il ne l'avait sans doute jamais été, à des années-lumières de ses sempiternels personnages "lunaires", porte littérallement le film à bout de bras.
A ses côtés, Christian Bale, affuté comme une lame, Marion Cotillard, bouleversant contrepoint d'humanité à la fureur ambiante (c'est elle qui insuffle ce côté romantique finalement crucial à l'équipée) et Billy Crudup, une nouvelle fois méconnaissable, font plus que sauver les meubles ou faire bonne figure.

Ce sont eux qui donnent à cette fresque sublime, dont la scène finale s'inscrit d'emblée comme l'une des plus belles de l'histoire du cinéma, son petit supplément d'âme.

Et qui finissent par en faire quelque chose de pas très éloigné du chef-d'oeuvre.


Cote: ****


(* L'évasion du début, la scène dans les bois, celle du commissariat, les deux scènes de cinéma et la scène finale, évidemment)