dimanche 29 juin 2008



Oui-Oui et la Menace Verte.

"Phénomènes" (The Happening) de M. Night Shyamalan (USA); avec Mark Wahlberg, Zooey Deschanel, John Leguizamo, Betty Buckley, Spencer Breslin, Alison Folland...

Un matin, à Manhattan. Tout à coup, en quelques minutes, sans que l'on ait perçu le moindre signe avant-coureur, des dizaines - des centaines même! - de personnes se donnent la mort de manière extrèmement spectaculaire; sautant des immeubles, se tirant une balle dans la tête, se poignardant avec n'importe quel objet leur tombant sous la main... Est-ce une attaque terroriste d'un genre nouveau? Une arme terrifiante et inconnue? Un virus expérimental ayant échappé à ses créateurs? Alors qu'autorités et spécialistes se perdent en conjectures et que l' "épidémie" semble gagner le reste du pays, Elliot Moore, enseignant à Philadelphie tente tant bien que mal de fuir le phénomène en compagnie de sa femme, d'un de ses collègues et de la fille de celui-ci. Mais comment survivre à une telle menace, aussi invisible qu'impitoyable?

Ca commence super bien!

Oui, autant le dire tout de suite: le début est vraiment impressionnant.
Le premier suicide collectif esquissé dans Central Park, puis les ouvriers qui se jettent du haut de leurs échafaudages, autant de scènes vraiment flippantes qui donnent l'impression qu'après le pitoyable conte neu-neu qu'était "La Jeune Fille de l'Eau", Shyamalan est de retour aux affaires. Qu'il est revenu à ce qu'il sait faire de mieux: le thriller paranormal, paranoïaque et à tiroirs.
Le truc à twist qui a fait sa gloire, quoi... "Sixième Sens", "Incassable" ou même "Signes" ou "Le Village"...

Eh bien il n'en est rien!
Que nenni, détrompez-vous!
Et que les fans (dont je suis, je ne m'en suis jamais caché) sortent leurs mouchoirs: visiblement le gaillard est perdu. Ou, en tout cas, il semble bien avoir atteint ses limites. Et en fin de compte elles n'étaient pas bien loin...

Car une fois passé ce premier quart d'heure prometteur et engageant, quelle déception!
Et quelle dégringolade...

Où est passée la virtuosité discrète qui faisait le sel de ses précédentes réalisations?
Qu'est-il advenu du scénario qui devait pourtant bien avoir été écrit, à un moment, avant le début du tournage?
Qu'est-ce que c'est que cette direction d'acteurs en roue libre?
Et cette enfilade de scènes creuses et de rebondissements à la con qui peinent vraiment à garder le spectateur en éveil?

A l'image de la maison-témoin dans laquelle se retrouvent les protagonistes à un moment donné de l'histoire, tout ici semble factice, creux, vide et emballé sous du plastique.
Jamais, pas un instant, on ne se soucie de ce qu'il va advenir de cette bande de branquignols mongoloïdes se débattant de manière totalement ridicule d'une situation absurde à une autre.

Jamais on n'a même envie de savoir le pourquoi du comment de cette épidémie de phénomènes de foire, tellement le cinéaste lui-même semble s'en soucier comme d'une guigne (de toute façon, la demie explication donnée par un des personnages les plus concons de l'affaire - et c'est pas ça qui manque dans ce film où tout le monde semble être au mieux un parfait abruti, au pire un handicapé profond - s'avèrera être la bonne. Et c'est même pas un spoiler vu que 1). on s'en doute dès le départ, 2). l'explication finale n'en dira pas plus, ça finit en queue de poisson et 3). on s'en fout, putain! On s'en fout!).

Certes il y a une ou deux choses à sauver dans ce film, sans doute le plus hitchcockien de son auteur (on pense vraiment beaucoup, beaucoup aux "Oiseaux").
Outre l'introduction, spectaculaire, on retrouve ici et là le don de Shyamalan pour poser une ambiance, pour créer le frisson ou pour faire sursauter (les pendus, l'accident de voiture, ...) mais tout celà est tellement dilué dans un enchainement de scènes ni faites, ni à faire, qu'une fois encore on s'en désintéresse complètement.

Mais le comble reste quand même l'interprétation!
Ou, devrait-t-on dire, la direction d'acteur...
Car il semble que M. Night Shyamalan ait voulu tirer des choses inédites de ses interprêtes (pour le coup, c'est réussi. Mouarf!) en les mettant "dans un véritable état de paranoïa".

Quel coup de maitre, mes aïeux!

Mark Wahlberg, que l'on a pourtant connu autrement inspiré dans "Les Infiltrés" ou les films de James Gray, pour ne citer que ceux-là, a rarement, voire jamais, été aussi mauvais.
C'est bien simple, il joue comme un cochon!
Steven Seagal (et la fourmi) à côté de ça c'est Laurence Olivier!
Parce que, que dire, franchement, de la scène dans les champs où, au milieu de la panique générale, il demande "un peu de temps pour réfléchir", par exemple?
Que dire, sinon qu'on a sincèrement mal pour lui tellement il est insuportablement et pathétiquement à chier?
Rien.
Si ce n'est, vaguement, "Pauvre, pauvre Mark"...

Le problème, évidemment, c'est que le reste du casting est au diapason...
Et comme en plus il est mal servi par des scènes écrites avec les fesses, ça tourne régulièrement au parfait n'importe quoi (tout le passage avec Betty Buckley, sorte de "Psychose" joué par la Troupe d'Art Dramatique du Home pour Vieux de Springfield).

Seule la toujours charmante Zooey Deschanel nous offre deux trois choses un peu convenables à se mettre sous la rétine.
Le hic, c'est qu'elle a l'air de ne pas croire du tout à ce qu'elle fait (on la comprend, notez...) et que du coup, elle joue le tout comme si elle évoluait dans un film de Mel Brooks. Voire pire...

Rajoutons à ça, bien entendu, le sous-texte le plus débilement écolo-bobo-catho-cliché de ces vingt dernières années et on aura compris qu'il vaut mieux franchement éviter le bazar...

Et que pour monsieur Shyamalan il est plus que temps de se réveiller.


Cote: *

mercredi 25 juin 2008



Famille, je vous hais...

"Un Conte de Noël " d'Arnaud Desplechin (F); avec Mathieu Amalric, Catherine Deneuve, Jean-Paul Roussillon, Chiara Mastroianni, Melvil Poupaud, Anne Consigny...

Abel et Junon ont eu quatre enfants. D'abord Joseph qui, tout jeune, fût marqué par la maladie, laquelle réclama bien vite une greffe de moëlle osseuse. Sa soeur Elisabeth n'étant pas compatible, ses parent conçurent Henri, l'enfant-remède. Hélas, Henri n'était pas un donneur potentiel non plus. Joseph mourut. Abel et Junon eurent alors Ivan et la famille ainsi constituée tenta de se remettre tant bien que mal de la perte de l'aîné. Des années plus tard, Junon se retrouva frappée à son tour. Pour tenter la greffe, toute la famille, réunie pour Noël dû se plier au rituel des tests. Même Henri, le mauvais fils, jadis "banni" du cercle familial par sa propre soeur...

Oui, c'est tordu. C'est bien le moins que l'on puisse dire...

Et encore, ça ne fait que commencer.

Sacré grand malade, lui aussi, que ce Desplechin qui de film en film règle ses comptes.

Avec sa famille ("La Vie des Morts"), son pays ("La Sentinelle"), ses amours ("Comment je me suis disputé..." ou encore "Rois et Reine" qui lui valut un procès de la part de son ex, Marianne Denicourt).

Or ici, sous le couvert d'un énième règlement de compte familial, il semblerait bien que ce soit cette fois-ci de lui même qu'il se moque. Ou tout du moins dont il dresse le portrait à travers ce personnage de Henri, le fils maudit (qui revient avec des cadeaux plein les bras... Euh... Non, attendez...)

Et pour réjouissant qu'il soit - car tout, chez Desplechin, même dans les situations les plus graves, est toujours empreint d'une fantaisie loufoque, comme une espèce de politesse du désespoir - le portrait est quand même relativement sévère.

Heureusement, même si rien n'est jamais réellement expliqué de manière frontale, les autres membres de la famille ne sont pas épargnés, de la soeur psychorigide au beau-frère absent, en passant par le cousin manipulateur par amour ou le neveu totalement schizophrène.
Et le portrait de groupe furieux finit par édulcorer légèrement l'autoportrait flagellant qui aurait, sans cela, pu virer à l'exercice de style psychanalytique embarassant.

Et du coup, oui, on rit. On rit même beaucoup aux tribulations de cette famille pas si dysfonctionnelle qu'il n'y parait, qui nous renvoie sans doute à pas mal de nos préoccupations de tous les jours.
Cette famille qui dit tout haut ce que la plupart d'entre nous doit avoir au moins une fois dans sa vie pensé tout bas (la merveilleuse scène ou Deneuve et Amalric s'avouent leur désamour mutuel).
C'est ce politiquement incorrect scandaleusement et délicieusement bourgeois qui nous met face à nous même, et qui à la fois nous agace, nous chavire et nous touche.

D'un point de vue strictement technique, ce beau film bergmanien (eh oui, je salue Bergman, on aura tout vu), drôlatique et cérébral, poseur et pourtant léger, se révèle également une étrange machine, avançant tout en ellipses, raccourcis et effets de montage (bizarrement, Desplechin dit s'être inspiré de celui des "Infiltrés" de Scorsese) qui, s'ils n'emportent pas tout à fait l'adhésion (il y aurait pu y avoir une coupe franche vers la fin, également au point de vue du scénario, d'ailleurs) ont au moins l'avantage de proposer une véritable alternative au tout venant cinématographique.

Une proposition de cinéma qui pour le moins interpelle et intrigue...

Un film d'auteur qui se permet le luxe d'être populaire.
Une oeuvre chorale portée par une troupe d'acteurs au mieux de leur forme (et en tête desquels on retrouve un Mathieu Amalric franchement impérial).

Quelque chose de stimulant et de revigorant. Un râté du jury cannois qui l'a injustement oublié?
Sans doute. Mais ce n'est pas bien grâve. Ce conte de Noël n'a besoin de rien ni personne.

Il est assez unique pour se suffire à lui-même...


Cote: ***

vendredi 20 juin 2008

Heroes and Icons...


(Sharon Tate - 1943/1969)

mardi 17 juin 2008


A l'Ouest, rien de nouveau...

"3:10 pour Yuma" (3:10 to Yuma) de James Mangold (USA); avec Russell Crowe; Christian Bale, Gretche Mol, Peter Fonda, Vinessa Shaw, Ben Foster...

Dan Evans est criblé de dettes... Contre une prime en monnaie sonnante et trébuchante, il accepte de s'engager dans l'escorte devant conduire Ben Wade, un dangereux pilleur de diligences, jusqu'à Contention, où il doit être mis sur le train pour Yuma, afin d'y être jugé au tribunal fédéral...

Quel brave type, ce James Mangold, finalement...

Un gentil garçon mais un grand malade..
Surtout quand on regarde de plus près sa filmographie.

Parce que, avouons-le, arrivé à ce stade, ce n'est plus de l'éclectisme, c'est de la schizophrénie...

Jugez plutôt...
Dans sa courte - et relativement brillante - carrière, il nous aura déjà grâtifiés d'un drame indépendant ("Heavy"), d'un film policier traité sous forme de western - ou le contraire ("CopLand"), d'un mélodrame en milieu psychiatrique ("Une Vie Volée"), d'une comédie romantique mâtinée de S.F. ("Kate & Leopold"), d'un thriller à tiroirs ("Identity") et d'un biopic musical (l'excellent "Walk the Line")!

On avouera quand même que ce n'est pas rien...

Et voila donc qu'il rajoute une pierre (allez, un caillou...) à l'édifice de sa maladie mentale en s'attaquant de manière incompréhensible à la fois au western en tant que style et au remake en tant qu'exercice de...

Incompréhensible parce que franchement, une fois de plus, à quoi bon?

Qu'est-ce qui n'avait pas déjà été dit dans l'admirable original de Delmer Daves (qui le considérait comme son meilleur western alors que le gaillard n'était quand même pas manchot en la matière)?

Parce que franchement, l'intérêt du film de Daves résidait essentiellement dans le fait que l'action était quasiment circonscrite dans une seule unité de lieu, si ce n'est de temps: une chambre d'hôtel où le ranchero et son prisonnier attendait la venue du train, entouré par les membres du gang de Wade, venu le libérer.
Une sorte de signe avant-coureur de ce que sera "Rio Bravo"; le chef-d'oeuvre de Hawks (et, au-delà, l' "Assaut" de Carpenter, évidemment) en plus sombre encore. Et surtout en plus cérébral.

Or, que fait ici Mangold, si ce n'est dynamiser inutilement un processus intelligent et se suffisant à lui-même en allongeant l'action, en multipliant les personnages secondaires et en passant par tous les cliché absurdes du western de commande (indiens, attaque de diligence, fusillades à gogo, poursuites diverses...)?
Il transforme l'étouffant huis-clos fondateur en une inutile pétarade hollywoodienne...

Oh, certes, ce n'est pas mal mis en scène et l'amateur de sensations fortes y trouvera sa dose d'action, même s'il devra pour cela avaler pas mal de couleuvres (la fusillade finale est complètement invraisemblable. Et que dire de l'épilogue?).
Oui mais bon... Et après?

Et après: rien!

C'est plat, creux, vide et inintéressant.

La reconstitution d'époque frise le Lucky Luke (on est loin du vérisme naturaliste du récent "Jesse James" de Dominik, par exemple).
Les seconds rôles sont au mieux sacrifiés (Peter Fonda, Gretchen Mol, Vinessa Shaw...) au pire insupportables (Ben Foster, hystérique comme à sa malheureuse habitude) et les deux acteurs principaux fonctionnent en totale économie de moyens, machoire serrée et regard du même métal pour Bale, sourire narquois et oeillades vicelardes - "Ouh! je suis méchant!" - pour Crowe...

Et puis c'est tout...

En deux mots comme en cents: un film devant lequel on ne s'ennuie pas vraiment, non.

Un film dont on se demande juste pourquoi il a été tourné...


Cote: *

jeudi 12 juin 2008



Papy fait de la Résistance.

"Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal" (Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull) de Steven Spielberg (USA); avec Harrison Ford, Cate Blanchett, Shia LaBeouf, Karen Allen, John Hurt, Ray Winstone...

1957. En pleine Guerre Froide, Indiana Jones échappe de justesse à des agents soviétiques lancés sur la piste d'une mystérieuse relique. A peine remis de ses émoions, ils se rend compte qu'il est soupçonné de collusion avec l'ennemi par son propre gouvernement et est contraint de démissionner de l'université où il enseigne. En route vers New York, il fait la connaissance de Mutt, un jeune homme qui lui propose de le mener dans la jungle amazonienne, où il dit pouvoir trouver le mystérieux Crâne de Cristal d'Akator qui depuis toujours, suscite la convoitise des archéologues et scientifiques de tous poils...

Pa pa da paaa pa pa daaa, pa pa daa paaa pa pada paaa paaaa...

C'est dès ce moment-là qu'on se rend compte de l'importance du brol dans notre petit inconscient malade.
Dès que retentit le thème, fameux gimmick s'il en est, reconnaissable entre tous.
Un peu comme au début de Star Wars...
D'un coup d'un seul on se sent régresser. On a douze ans (voire moins) et on fond dans son fauteuil en poussant un bête "aaaaahhh!" de contentement béat...

Parce que, à part pour les quelques pauvres malheureux citrons prépubères qui n'auraient ni Internet ni la télé et découvrirait l'engin au vol, qu'est-ce que c'est que ce nouvel épisode d'Indiana Jones - tant attendu, après toutes ces années de tergiversations et de developpement hell - si ce n'est une énooooorme, une gigantesque madeleine?

Je vous le demande, hein?...

Eh bien, la métaphore est usée jusqu'à la corde mais allez, j'assume, c'est un parc d'attraction!
Une sorte de Disneyland à lui tout seul, avec train fantôme, montagnes russes, rivière sauvage et tout le toutim...

Et ça marche! Ca marche à fond!

C'est régressif (oui, on ne le dira jamais assez), assez concon (y a quand même quelques dialogues qui valent leur pesant de cacahuètes, surtout sur la fin), historiquement et scientifiquement complètement à côté de la plaque (cfr. la récente réaction du gouvernement péruvien à ce sujet) mais ça marche, putain, ça marche!

C'est du pur fun, de la BD live, invraisemblable, incohérent, démesuré mais totalement réjouissant.
Du pur cinéma "de milliardaires décompléxés", pour citer une nouvelle fois Libé, avec juste ce qu'il faut d'autoparodie, d'humour neuneu, de cascades et de rebondissements.

Ce qu'il faut de bébètes, d'exotisme toc, de méchants caricaturaux et d'effets spéciaux pétaradants.

Et ce côté nostalgique se retrouve jusque dans la réalisation, qui privilégie la pellicule et les effets spéciaux "à l'ancienne" (très peu de plans en images de synthèse, visiblement...) plutôt que la technologie à tout crin. Avec même un côté un peu rétro qui transpire jusque dans la photo et dans la mise en scène...

L'intrigue est un peu fumeuse, certes, avec son mélange de genres, et il faut bien sûr avouer qu'elle ne brille pas franchement par son originalité, surtout au vu des précédents épisodes.
Mais on s'en contentera et force est de constater que ce nouvel opus rempli complètement son contrat et comble largement l'attente qu'il avait pu légitimement susciter...

Gageons même qu'à l'instar de ses illustres prédécesseurs, ce quatrième épisode - qui enfile quand même, il faut bien le dire, quelques scènes d'anthologie comme cette gigantesque course poursuite dans la jungle, par exemple - deviendra encore plus réjouissant au fil des visions successives, allez...

Bref, au final, rien que du pur, du bon gros divertissement old school, porté avec une certaine classe par un Harrison Ford goguenard et plus que bien conservé (et épaulé par une Cate Blanchett décidément à l'aise dans tous les genres). Mais du divertissement qui fait ce qu'on lui demande et qui en met plein les yeux.

Tant et si bien qu'on finit par se demander une seule chose...

Allez, dites, quand est-ce qu'on remet ça?


Cote: ***