lundi 14 mai 2012


Nevermore ?

"Twixt" de Francis Ford Coppola (USA); avec Val Kilmer, Elle Fanning, Bruce Dern, Joanne Whalley, Ben Chaplin, David Paymer...

Hall Baltimore, écrivain sur le retour spécialisé dans les romans de sorcellerie, se rend dans une petite bourgade des Etats-Unis afin d'y dédicacer son dernier ouvrage. Entraîné par le shérif local dans une mystérieuse histoire de meurtre dont la victime est une jeune fille du coin, il rencontre - en rêve - le fantôme d'une adolescente prénommée V. Bien vite, il perçoit le rapport qu'il peut y avoir entre elle et le meurtre commis en ville, découvre dans l'ensemble le sujet d'un roman qui pourrait relancer sa carrière et se rend compte que l'affaire présente bien des résonnances avec son propre passé tragique.

Evacuons d'emblée la blague: oui, j'aurais pu intituler ce post "deux doigts coupe-faim". Mais je ne suis pas comme ça, moi, fi ! Je laisse ça à d'autres.

Passé ce préambule ridicule, attachons-nous plutôt à décrire cet obscur et étrange objet filmique qu'est "Twixt" (qui signifie en quelque sorte "In Between", le titre original étant d'ailleurs "Twixt Dawn and Sunrise", littérallemment "Entre l'Aube et le Lever du Soleil", comme ça vous savez tout).

Car qu'est-ce donc que celà ?
Le délire prétentieux d'un quelconque vidéaste comme on n'en fait plus depuis des années ?
Que nenni !
L'oeuvre d'un cinéaste débarassé de ses problèmes financiers et se sentant à nouveau jeune homme et apte à expérimenter comme bon lui semble, quitte à rejouer ses premieres oeuvres ?
C'est plus probable.

Un film pour le moins singulier, en tout cas, c'est certain !

Qui renvoie d'une certaine manière à pas mal de choses dans la carrière de Coppola.

De ses débuts chez Roger Corman ("Dementia 13", pour le côté "film d'horreur baroque") à ses expérimentations post-"Apocalypse Now" (les parties oniriques, dans un noir et blanc somptueux mais parsemé de tâches de couleurs, comme les poissons dans "Rusty James", bien entendu), en passant par cette obsession bien personnelle de la temporalité (il y a ici trois histoires de deuils qui se superposent et, certes oui, ce n'est pas toujours facile à suivre) laquelle renvoie à un drame bien réel, lui (Coppola a lui aussi perdu un fils dans des circonstances tragiques mais n'en disons pas plus).

Ce qui est sûr, c'est que "Twixt", porté à la fois par l'imposante carrure d'un Val Kilmer de plus en plus "hénaurme" et depardieu-esque (mais qui nous rappelle au détour d'une scène face caméra quel grand acteur il peut être) et la grâce presque diaphane de l'émouvante Elle Fanning, est un film merveilleux - dans tous les sens du terme.

Un film bancal et touchant, qui alterne le vaudeville et le tragique, l'épouvante et le suspense, le franchement beau et le presque laid dans une sorte de tourbillon funeste et drôlatique bien à l'image - excessive - de son auteur: un jeune homme de 70 ans qui a retrouvé la joie simple et sincère de faire son métier comme bon lui semble.

Alors même si le vrai sujet du film - les affres de la création - peut sembler poussiéreux et la métaphore un brin épaisse, on ne peut que se réjouir devant tant de liberté retrouvée, devant tant d'énergie...

Et devant un tel niveau de déglingue. A ce point maîtrisée que ça en devient sidérant.


Cote: ***

Aucun commentaire: