lundi 31 mars 2008



Bifff 26: Jour 4.

Où l'on se casse avant la fin...

Il y aurait beaucoup à dire sur les inepties du nouveau présentateur, remplaçant de l'inénarrable Smismans, sur les interviews qui n'en sont plus (les invités se contentant de faire un speech sans que le type n'intervienne) ou même sur la ridicule cérémonie d'adoubement dont a fait les frais Jürgen Prochnow.

Mais baste! Le temps presse et comme hier (enfin, aujourd'hui, personne n'est dupe) rentrons donc tout de suite dans le vif du sujet: les films!

7. "La Remplaçante" (The Substitute) d'Ole Bornedal (DK).
Bonne petite surprise que cette gentille comédie de science-fiction réalisée par le danois Ole Bornedal ("Nightwatch").
C'est totalement inoffensif (les héros sont des enfants qui se rendent compte que leur nouvelle prof est un extraterrestre) mais c'est vif, enlevé, bien foutu et assez rigolo.
Les gosses sont attachants et Paprika Steen ("Festen", "Adam's Apples") parfaite dans son rôle de prof alien limite facho.
Que demander de plus? Rien, c'était très bien, merci.

Cote: ***

8. "Doomsday" de Neil Marshall (UK).
Yayayayaya!
La première grosse claque du Bifff 2008 vient donc assez logiquement d'Angleterre.
"Assez logiquement" puisqu'elle est l'oeuvre de mon chouchou Neil Marshall, déjà responsable des totalement cowabunga "Dog Soldiers" et "The Descent" (SURTOUT "The Descent"!).
Et maintenant on sait - enfin, on est sûrs - qu'il est complètement barré!
Cette oeuvre-hommage aux films de science-fiction post-apocalyptiques de notre enfance part littéralement dans tous les sens, frise tout le temps l'invraisemblable, est totalement tiré par les cheveux mais c'est une putain de montagne russe, bourrée jusqu'a la gueule d'adrénaline pur jus et réalisé avec une bonne humeur iconoclaste et furieusement communicative.
Truffé de références, voire de citations; à des films aussi divers que "New York 1997", "28 jours plus tard", "Les Fils de l'Homme", "Mad Max", "V pour Vendetta", "New York ne répond plus", "Le Survivant", etc. , etc., "Doomsday" est une bombe!
Une bombe de pur fun qui n'a pas peur de ne pas se prendre au sérieux, qui n'a pas peur de la surenchère et qui n'a même pas peur du ridicule (et pourtant, la partie médiévale est plutôt limite)!
Une bombe qui culmine dans une séquence de course-poursuite absolument hall-u-ci-nan-te et un final barbare et primaire vraiment réjouissant!
De la toute bonne série B! Du pur cinoche de divertissement comme on voudrait en voir plus souvent! De celui où l'on ne s'ennuie pas une minute, pas une seule seconde!
Une bombe, on vous dit!!!
Et je veux la B.O.!

Cote: ****

9. "The Shadow Spirit" de Masato Harada (J).
Ca ne m'arrive quasiment jamais (et les rares fois ou ce fût le cas, c'était au Bifff, il faut bien l'avouer) mais je me suis donc barré avant la fin de ce film.
Faut dire aussi que j'ai été un peu aidé...
Aussi incroyable que cela puissa paraitre, ce brol était présenté en version Beta et donc il a fallu l'interrompre au milieu pour changer la cassette! D'ou allumage des lumières et filage à l'anglaise de pépère.
A part ça?
A part ça, quand après une demi-heure d'une intrigue absolument incompréhensible où se croisent un détective-médium, des collégiennes, des soldats, une actrice, des cerfs-volants, une secte, des femmes coupées en morceaux, un chat, un chien deux canaris, une chèvre, on pense que l'action va enfin décoller et que, tout d'un coup, l'écran se barre d'un panneau "10 ans plus tôt" et que tout recommence à zéro avec une nouvelle intrigue et de nouveaux personnages (le seul fil rouge visible semblant être les femmes coupées en morceaux) on peut légitimement se poser des questions...
Et se barrer avant la fin si on ne veut pas en plus être obligé de se taper le taxi.

Cote: ° (c'est un peu gonflé dans la mesure où je n'ai pas vu le film en entier, c'est vrai, mais d'un autre côté, je ne vois pas pourquoi ce brol ce serait soudainement amélioré en cours de route).

Ce soir: "Eden Log".
Demain: "I Know Who Killed Me" et "Shiver".



Bifff 26: Jour 3.

Où l'on se retrouve délicieusement mal à l'aise...

Pas grand' chose à raconter sur cette deuxième vraie soirée...
Or j'ai déjà pris du retard dans mes chroniques, match oblige (1-2, caramba! La relégation se précise!)

Passons donc tout de suite au vif du sujet: les films de cette soirée de samedi...

4. "The Hideout" de Pupi Avati (I).
Ah ah ah! Tellement naze que ça en devenait presque drôle!
Qu'est-ce que c'était donc que ce brol qui ressemblait à un DVD de la collection "Mad Movies" réalisé par un Mario Bava sous Tranxène et mixé avec un épisode de Scoubidou (sans le chien)?
Un film de fantômes inepte, joué par des italiens aux Etats-Unis ou le contraire (en tout cas, le tout est doublé. Et bien mal doublé) avec un "monstre" qui a la voix de Gizmo dans le premier "Gremlins"...
Vous avez dit "ridicule"?

Cote: °

5. "Funny Games US" de Michael Haneke (USA).
On pourrait trouver totalement vaine cette tentative de remake à l'identique de "Funny Games" par son propre réalisateur. On aurait même sans doute raison.
Mais quand on sait que les amérikis sont incapables d'aller voir un film étranger, surtout sous-titré, on comprend déjà mieux.
Voulant à tout prix que son film soit vu aux States, Haneke a donc décidé d'en produire le remake. Et comme on n'est jamais si bien servi que par soi-même, de le réaliser carrément lui-même.
D'ou cette redite plan par plan, tournée exactement dans le même décor.
Le plus grave c'est qu'alors même qu'on a vu l'original plusieurs fois (c'est un de mes films préférés), la version US parvient encore à instiller le même malaise. Et quand on dit malaise...
Si ça c'est pas la marque des grands films...

Cote: ****

6. "Le Cottage" (The Cottage) de Paul Andrew Williams (UK).

Et quoi de mieux pour terminer la soirée qu'une bonne comédie horrifique british bien basse de plafond?
Deux frères pieds-nikelés loupent un kidnapping et se retrouvent en rase campagne, aux prises avec une fermier psychopathe tout droit sorti d'une version anglaise de "Massacre à la Tronçonneuse".
C'est con, vraiment très con même, mais fort drôle et surtout fort efficace.
Evidemment, n'est pas Edgar Wright et/ou Simon Pegg qui veut et si le but était de faire un truc dans la lignée de "Shaun of the Dead", c'est plutôt loupé.
Mais on ne s'emmerde vraiment pas devant cette grosse comédie bien gore et crade, qu'on croirait taillée pour le plaisir du festivalier lambda.
Un premier concurrent sérieux pour le Prix du Public, peut-être?

Cote: ***

Ce soir: "La Remplaçante"; "Doomsday" et "The Shadow Spirits".
Demain: "Eden Log".

samedi 29 mars 2008



Bifff 26: Jour 2.

Où l'on réalise un vieux rêve... dans des conditions pitoyables...

Revoir "La Forteresse Noire"!

Aaaaah!
Depuis 1983 (date de sa sortie) je rêve de revoir ce film qui a pour moi tout du film-culte!
Et voila qui est fait, pour son vingt-cinquième anniversaire, grâce au Bifff et à un responsable des effets spéciaux français, passionné comme moi par l'oeuvre de Mann et qui espère un jour sortir une édition "director's cut" du film (un monstre de trois heures!).

Eh bien, autant dire que je n'ai pas été déçu.
Tout était comme dans mes souvenirs, y compris le côté kitsch des effets spéciaux à la Frankie Goes to Hollywood (beaucoup de fumée et de lasers) et de la mise en scène qui use et abuse des ralentis.
Sans parler de l'hilarante musique signée Tangerine Dream...
Mais après tout, ce sont aussi ces choses-là qui font le charme de cette bonne vieille Forteresse.

Les conditions de projection dans cette fameuse nouvelle Salle 2, par contre, sont à ranger parmis les plus déplorables de ma "carrière" de cinéphile: confort zéro (de bêtes chaises alignées en lieu et place des fauteuils), écran grand comme un timbre-poste, image et sous-titres flous, son qui fout le camp (sauf la musique, tonitruante), isolation sonore inexistante (on entend les gens bosser, causer, téléphoner derrière les rideaux à la limite plus fort que les dialogues du film) bref, ça ne frisait pas l'arnaque; c'en était une!
Espérons pour les amateurs de "7ème Parallèle" que le tir sera rectifié d'ici la fin du Festival...

Mais à part ça, les autres films?...

2. "Crimes à Oxford" (The Oxford Murders) d'Alex de la Iglesia (S).
Premier film en anglais pour le gros Alex (présent à la projection et qui ressemble de plus en plus à Coppola) et changement de registre patent, c'est le moins qu'on puisse dire!
Exit les grosses pantalonnades latino-hystériques, enter l'enquête policière à l'anglaise à mi-chemin entre Agatha Christie et Sir Arthur Conan Doyle.
Ambiance feutrée, mise en scène sobre et élégante (avec entre autre un très beau plan séquence dans les rues de la ville) et surtout une intrigue à tiroirs passionante, qui fait la part belle à la philosophie et surtout aux mathématiques.
On n'oublie pas pour autant le côté théatral, voire le Grand-Guignol (le personnage de mathématicien fou et mutilé interpreté par le réalisateur Alex Cox) des oeuvres du réalisateur, ainsi qu'un humour quasi permanent mais bien plus discret que dans ses précédents films (et c'est d'ailleurs tant mieux).
C'est peut-être un peu trop verbeux, cérébral et embrouillé par moments mais c'est suffisament retors (il faut s'attendre à plusieurs twists) pour que l'on reste scotché jusqu'au bout.
Quand on rajoute à ça l'interprétation d'un John Hurt au mieux de sa forme, on se retrouve face à un thriller un peu académique, certes, mais tout à fait fréquentable.

Cote: ***

3. "Diary of the Dead" de George Romero (USA).
Du "Projet Blair Witch" à "Redacted" en passant par "[REC]", la mode est aux faux reportages, caméra à l'épaule, et aux patchworks d'images d'origines diverses (webcams, caméras de surveillance, télé, etc.).
Ce vieux briscard de Romero n'a pas voulu être en reste et nous offre donc ce "Journal de la Mort" prétendument filmé en direct par des étudiants aux prises avec une mystérieuse épidémie transformant la population en zombies (ben oui, on est chez Romero, après tout).
La bonne nouvelle de l'affaire c'est que le gars qui tient la caméra sait plus ou moins filmer, ce qui nous évite de gerber sur nos pompes pour cause d'image trop virevoltante.
Et c'est pas plus mal comme ça, merci.
Pour le reste, it's business as usual au pays des zombies, pour un film teigneux et politiquement incorrect, très joyeusement gore, plein de bonnes idées crades et d'un humour tout ce qu'il y a de salutaire (l'intervention de l'amish sourd, par exemple).
Certes, le message sur la manipulation de l'image, la communication, le Net et les médias qui nous mentent est peut-être un peu lourd et rabâché (comme le film, d'ailleurs, qui devient un peu répétitif sur la fin) mais il y a heureusement assez de tripes et de boyaux pour remplir largement le cahier des charges d'un film de ce genre.
C'est fun, c'est efficace, c'est gore mais ça n'oublie pas pour autant de penser.
Et, franchement, la fin est vraiment très, très, très bien!

Cote: ***

Ce soir: "The Hideout", "Funny Games U.S." et "The Cottage".
Demain: "The Substitute", "Doomsday" et "Shadow Spirit".

vendredi 28 mars 2008



Bifff 26: Jour 1.

Où l'on est agréablement surpris...

Eh ouais; c'est parti... Faudra un peu attendre avant de pouvoir lire la critique d' "A Bord du Darjeeling Limited".
Vingt-quatre films à s'envoyer en moins de quinze jours et autant de chroniques!
Autant dire qu'on va perdre de temps...

Allez, zou!

Bonne surprise, donc, en ce premier jour!
Pas tant en ce qui concerne le film (voire plus bas) mais plutôt du côté de l'infrastructure.
Poursuivant le travail entâmé avec la transformation de la salle de concerts en deuxième salle de projection dans laquelle est regroupée la programmation du Nova, les organisateurs ont très judicieusement réorganisé l'espace, utilisant des coins qui l'année passée étaient vide, en condamnant d'autres, etc., pour finalement créer une surface beaucoup plus conviviale, avec suffisament d'espace pour bouger et ne créer d'embouteillages nulle part (même pas au bar!).
Un bon point pour eux.

Tout autant que la gestion du temps, du moins en cette première journée: horaires respectés, discours d'ouverture expédié, bref, que du bon...

Peut-on en dire autant du film d'ouverture?
C'est une autre histoire...

1. "The Eye" de David Moreau et Xavier Palud (USA).

Booooouh...
Le gros vilain remake inutile...
Franchement, à quoi bon s'attaquer à un film pareil, surtout si c'est pour le refaire à l'identique, quasiment plan par plan?
Bon, si on n'a pas vu l'original, peut-être que ça peut faire la blague (et encore, c'est même pas sûr) mais dans le cas contraire...
Contrairement à ce que racontent les deux réals, selon lesquels c'est "l'évolution du scénario par rapport à l'original" qui fait tout le sel de leur film, celui-ci n'apporte rien, ne rajoute rien, à part peut-être, Etats-Unis obligent, une ridicule happy-end...
Certes, il y a bien ici et là quelques idées de mise en scène mais ça ne suffit pas à rendre l'entreprise intéressante...
Qui plus est, même si Moreau et Palud ne sont vraiment pas manchots, il leur faudra encore du temps avant d'arriver ne fût-ce qu'à la cheville de leurs prédécesseurs, les illustres frères Pang (quel blaze, quand même...).
De surcroit, et c'était déjà le principal reproche fait à leur premier long, le pourtant très bon "Ils", les deux français ont un peu trop tendance à jouer au train-fantôme et à se reposer sur des effets ultra-faciles. Les portes claques, les usines explosent, les fantômes surgissent tout à coup de nulle part en beuglant comme des singes, bref, on sursaute tout le temps (et c'est fatigant, en plus) mais on n'a jamais vraiment peur.
Ce qui était pourtant le but, non?

Cote: *

Ce soir: "La Forteresse Noire", "Crimes à Oxford", "Diary of the Dead".
Demain: "The Hideout", "Funny Game U.S.", "The Cottage".

jeudi 27 mars 2008



Le retour de la chetron sauvage!

"MR 73" d'Olivier Marchal (F); avec Daniel Auteuil, Olivia Bonamy, Philippe Nahon, Catherine Marchal, Gérald Laroche, Francis Renaud...

Louis Schneider, flic au SRPJ de Marseille traque un mystérieux serial-killer. Rattrapé par l'alcool et les fantômes du passé il est bientôt mis à pied mais s'entête... Parallèlement, la jeune Justine dont les parents ont été assassiné bien des années auparavant dans des conditions atroces doit faire face à la prochaine mise en liberté du tueur, Charles Subra...

Après un premier film plutôt caricatural ("Gangsters"), Olivier Marchal nous avait assez agréablement surpris, il y a deux ou trois ans, en proposant "36 Quai des Orfèvres", polar à la française tout ce qu'il y avait de réussi.
Un film policier sobre, racé et élégant qui n'oubliait pas d'aller fouiller dans les zones d'ombres de ses protagonistes...

De zones d'ombres, il est encore question ici à travers le personnage lessivé, nettoyé, au bout du rouleau, quasi mort de Louis Schneider, flic brisé par un accident qui a laissé sa femme dans le coma, complètement ravagé par l'alcool et la dépression au point qu'il en vient à adopter un comportement quasi suicidaire, surtout du point de vue professionnel...

Et c'est évidemment lui qui fait l'intérêt de ce nouveau film d'Olivier Marchal.
Lui et son interprête, Daniel Auteuil...

Etonnant, visiblement très investi dans son rôle, méconnaissable avec ses cheveux gras, sa barbe de cinq jours et cette invraisemblable paire de lunettes seventies qu'il trimballe tout au long du film, l'acteur, beaucoup plus convainquant ici qu'en gangster dans le récent "Deuxième Souffle" de Corneau, traverse le film comme un fantôme, arrivant à donner corps au personnage sans jamais pour autant sombrer dans la performance gratuite.
On le remerciera d'apporter au film ses scènes les plus fortes et les plus chargées en émotion brute.

La réalisation fait ensuite beaucoup pour emporter le spectateur dans l'univers glauque, sombre et violent de cette double course au tueur en jouant admirablement avec les codes du film noir (il pleut tout au long du film ou presque, par exemple), en se servant efficacement de la lumière et des clairs-obscurs et en transcendant, par sa maitrise et la qualité du montage, le quotidien des flics et de ceux qui les entourent.

Et c'est d'ailleurs dommage que le reste ne suive pas...

La faute à une direction artistique approximative qui à parfois du mal à ne pas sombrer dans la caricature (la prison quasi moyenâgeuse où est enfermé Subra, entre autre...) et à d'évidentes velléités du réalisateur d'assaisonner son film d'embarassantes références aux films de serial-killers américains.
Velléités d'autant plus absurdes et inutiles que le film, avec son côté un peu documentaire, s'en serait très bien passé, merci.

L'autre problème - et il est de taille - est que les deux histoires qui se construisent en parallèle sont trop autonomes pour arriver à se rencontrer sans que cela ne fasse de casse.
Du coup, leur superposition et leur crossover final parait vraiment trop artificiel et laisse en fin de compte le spectateur sur le carreau, lui donnant l'impression que les scénaristes ont vraiment forcé à l'extrême pour que les pièces s'emboitent, sans jamais y arriver complètement.

Dommage, vraiment dommage, car on avait envie d'aimer jusqu'au bout ce film, visiblement le plus personnel dans la filmographie de son auteur.
On avait envie d'apprécier son univers ultra noir, sa violence débridée, si rare dans le cinéma français, ses seconds rôles tous parfaits (Olivia Bonamy et surtout Philippe Nahon, impeccable en tueur faussement repenti) et son étonnante parabole sur la souffrance, presque barbare...

Reste qu'après que la résolution de la première affaire ait été littéralement expédiée avec l'eau du bain le film effectue une sorte de dernier baroud d'honneur avec un final admirable de noirceur que même un épilogue gnan gnan et misérablement téléphoné n'arrivera pas à gâcher.

Et quand on y pense, au fond, c'est déja plus que ce que l'on en demandait.


Cote: **

mardi 25 mars 2008



Drôles de Dames contre S.S.!

"Les Femmes de l'Ombre" de Jean-Paul Salomé (F); avec Sophie Marceau, Julie Depardieu, Marie Gillain, Déborah François, Moritz Bleibtreu, Maya Sansa...

En 1944, à Londres, le S.O.E. engage Louise, résistante française dont le mari vient d'être abattu par les allemands, pour former un bataillon entièrement féminin. Leur mission: se rendre en France pour récupérer un agent anglais qui en sait trop sur l'imminent débarquement allié en Normandie.

Oui.

Ecrit comme ça, ça fait un peu scénario de série télé, hein?
Voire de télésuite estivale.
Eh ben c'est à peu près ça...

Et vlan! Nous revoila donc en terrain connu; celui du toujours excellent cinoche du dimanche soir.

Dans la case "film de guerre", cette fois, genre dans lequel les français excellent, une fois n'est pas coutume...
Certes plus souvent sur le mode comique mais bon, allez...

Et torché par un grand spécialiste en la matière (spécialiste en cinoche du dimanche soir, veux-je dire): l'inénarrable Jean-Paul Salomé, cinéaste populaire s'il en est, avec tout ce que cela suppose d'honnête savoir-faire mais aussi de lourdeur académique et de vulgarisation à la truelle.

Un cinéaste dont Première (maudits!) disait récemment avec justesse qu'il est de ceux dont on attend finalement tellement peu qu'on finit, au détour d'un film comme celui-ci, pas plus réussi mais finalement "moins râté" que les autres (pensez à "Belphégor" ou à "Arsène Lupin", vous verrez ce que je veux dire) par le considérer avec plus d'indulgence que certains de ses collègues.

Un "honnête faiseur", comme on dit...

Et donc on ne s'ennuie jamais devant ce solide divertissement que sont "Les Femmes de l'Ombre".
Mais on n'y croit jamais vraiment non plus.

La faute à un Salomé plus préoccupé par la plastique avantageuse de ses héroïnes que par la vérité historique...

Ce qui donne un film à grand spectacle, du pur cinéma populaire "à la française", extrèmement divertissant mais totalement creux.

Un film ou la reconstitution est ultra-lèchée (on y assiste à un gros, gros travail de direction artistique, tant au niveau décors que costumes ou accessoires) mais dont le scénario limite BD est absolument invraisemblable (en gros, ce sont ces cinq filles sorties de nulle part qui ont permis que le débarquement ait lieu). Tout autant que les rebondissements, d'ailleurs...

Un film au casting pétaradant mais aux personnages extrèmement mal caractérisés et surtout effroyablement clichés (la forte/la faible, la sainte-nitouche/la pute, ce genre de choses...) .
Plein de rebondissements, de trahisons, de romance, d'action et d'explosions...
Tellement plein qu'on est toujours à deux doigts de friser l'indigestion, d'ailleurs.

Et puis, y a rien à faire, il y va ici de certaines situations comme de certains dialogues: il y a des moments ou on a un peu du mal à garder son sérieux devant tant de premier degré neu neu.

Mais l'important, encore une fois, c'est que malgré le côté bancal de la distribution (Julie Depardieu formidable as usual, Gillain fadasse, Marceau trop bêtement "impliquée" dans son rôle) et le côté gratuit et racoleur de certaines scènes (on comprend bien le délire d'expiation du personnage ultra-catho de Déborah François mais était-ce bien nécéssaire de la faire se foutre intégralement à poil avant d'avaler sa capsule de cyanure? Je pose la question...), on ne voit pas passer le temps.

Et, après tout, on s'amuse bien devant ce brol qui réussit l'improbable grand écart entre "Lucie Aubrac" et "La Grande Vadrouille"...

Au point qu'on guettera peut-être sa diffusion, un de ces dimanches soirs à la télé...


Cote: **

mercredi 19 mars 2008



Pourquoi je ne suis pas allé voir...

(ou "toi aussi fais ton Finkielkraut et parle de films que tu n'as même pas vus")

II. "Promets-moi" (Zavet) d'Emir Kusturica (Se); avec Marija Petronijevic, Uros Milovanovic, Ljiljana Blagojevic, Aleksandar Bersek, Miki Manojlovic...

J'ai vu tous les précédents films de Kusturica. Absolument tous. Et même si je ne suis pas forcément d'accord avec les superlatifs employés pour décrire son oeuvre, j'aime généralement bien...

Alors, pourquoi?

1. Parce que la tendance qu'a Kusturica ces dernières années à se transformer - à l'instar de son collègue russe Nikita Mikhalkov, d'ailleurs - en une espèce de Gardien du Temple, de Tsar Omnipotent du Cinéma d'Europe Centrale, mégalomane et paranoïaque, en guerre contre les Vilains Critiques tout autant que contre le Méchant Public et voulant - par delà - tout contrôler à une sérieuse tendance à m'énerver. Et donc à me détourner autant de l'homme que de l'oeuvre...

2. Parce que d'après ce que j'ai compris, ce film est une sorte de concentré de l'esprit kusturicien, avec ce que cela suppose d'onirisme clinquant, de folklore de fanfare de Fête Nationale baloutchistanaise, d'hystérie galopante, d'humanisme à deux balles et de comique burlesque, type "fin de banquet de mariage", quand le grand-oncle a un peu trop forcé sur la Slivovic... Toutes choses que je trouve supportables, voire même sympathiques, lorsqu'elles sont distillées à petite dose le long d'un film mais qui, compilées, compactées pendant deux heures non-stop auraient plutôt tendance à me flanquer une solide poussée d'urticaire.

3. Parce que les gens qui font l'unanimité pendant si longtemps me sont, à la longue, suspects...

4. Parce que ça va bien aller aussi, avec la musique eurotzigane recyclée pour bobos en manque de sensations altermondialistes de pacotille, genre Bregovic, No Smoking Orchestra et autres formations aussi lourdaudes, kitsch et clichés qu'un remix de Mike Oldfield par Enigma...

Est-ce que je le louerai quand il sortira en DVD?

Non, même pas...

Prochainement: Pourquoi je ne suis pas allé voir... "La Famille Savage", de Tamara Jenkins.


mardi 18 mars 2008



Plateau téloche...

Wéééééééééééééé!!!

Pas plus tard qu'il n'y a pas longtemps, souvenez-vous, je me lamentais ici même après lecture du programme du Bifff parce que deux des films qui m'intéressaient le plus lors de cette édition 2008 - "[REC]" et "A l'Intérieur" - étaient programmés au cours de la Nuit.
Nuit à laquelle je n'assiste plus depuis de nombreuses années déjà pour des raisons évidentes d'ambiance potache de merde sur lesquelles (ou "laquelle", j'ai perdu le fil) je ne reviendrais pas ici une x-ième fois (et puis j'en ai marre de copier/coller tout le temps cette pourtant excellente feinte du Coz où il est question de klaxon et de gore hongrois).

Quelle ne fût pas ma surprise - et ma joie! - donc, lorsque vendredi dernier je tombais sur "A l'Intérieur" du duo frenchie Julien Maury et Alexandre Bustillo dans les rayons de mon vidéo-club habituel.
Ce qui, soit dit en passant, pose de sérieuses questions quant à la programmation du Bifff, soit-disant composée exclusivement d'avant-premières... Mais baste...

Je m'empressais donc de le louer et, deuxième joie, deuxième surprise, figurez-vous que c'est de la balle!

Réalisation couillue et inventive, montage ultra-efficace, ambiance glauque à souhait qui lorgne autant du côté des premiers Wes Craven ("La Dernière Maison sur la Gauche", "La Colline à des Yeux", par là...) que du giallo estampillé Bava ou Argento première période.
Musique glaçante, cruauté réjouissante et totalement "politically incorrect", absence totale de tentative d'explication psychologique, barbarie frontale, gore ultime... tout y est!
Ca touche même à un tabou, et un solide, celui de la femme enceinte et ça se permet en plus le luxe de finir mal, ultra-mal.

Bref, c'est un vrai petit scud crade et teigneux, avantagé encore par une durée extrèmement courte (à peine une heure et vingt minutes au compteur, et encore, en comptant le générique de fin) et porté à bout de bras par un duo d'actrices extraordinaire: Béatrice Dalle et la petite soeur Paradis, Alysson, toutes deux vraiment TERRRRRRIB'!!!

En résumé, une bonne petite claque comme on n'en attendait plus de la part d'un cinéma de genre français moribond et une vraie leçon d'efficacité cinématographique, que certains tâcherons ibères feraient bien de méditer.

Burp!

PS: et "Mad Movies" a a-do-ré! Comme quoi...

dimanche 16 mars 2008



Même pas peur!

"L'Orphelinat" (El Orfanato) de Juan Antonio Bayona (S); avec Belen Rueda, Fernando Cayo, Geraldine Chaplin, Mabel Rivera, Montserrat Carulla, Andrés Gertrudix...

Laura, jeune femme ayant passé une partie de son enfance dans un petit orphelinat sur la côte espagnole, revient sur les lieux une fois devenue adulte afin d'exploiter à son tour l'institution et d'y accueillir de jeunes handicapés. Mais la maison semble réveiller l'imagination de son fils Simon qui y découvre d'étranges nouveaux amis invisibles...

Awel santé!
C'est donc ce flave boestring, ce pâle boudin, cet insipide bouillon de onze heures qui est reparti avec le Grand Prix du dernier Festival de Gérardmer!?!
Eh ben! On savait la manifestation française largement surestimée mais pour le coup, force est de constater que le jury annuel n'était même pas à côté de ses pompes, cette fois, mais carrément à la rue!

Que ce brol ridicule, mal branlé et chiantissime arrive jusqu'à nous précédé d'une telle réputation ("Le plus grand succès espagnol de tous les temps"! Voyez un peu le genre...), auréolé de tant de prix et entouré d'un délire critique invraisemblable ça relève carrément de l'escroquerie! De l'arnaque pure et simple!

Parce qu'enfin, qu'est-ce que c'est que ce truc?

Un pauvre film fantastique bancal, à la facture ultra-classique et à la trame usée jusqu'à la corde, torché par un petit connard prétentieux qui s'est auto-persuadé d'avoir révolutionné le genre.
Et qui c'est enfoncé le bras dans l'oeil jusqu'au coude!

Parce qu'en fait de révolution, nous n'avons droit ici qu'à une pénible régurgitation de ce que le cinéma fantastique à fait de plus convenu et de plus rabaché ces vingt dernières années.
"Les Autres", "Saint-Ange", "Le Tour d'Ecrou", "Hantise", "Sixième Sens" et même "Vendredi 13" (et bien d'autres encores d'ailleurs, voir plus bas...) minablement passés à la moulinette du recyclage bas de gamme et du frisson à cinq balles.

Un catalogue de scènes obligées, sans inspiration, livrées de manière disparate comme pour honorer un cahier des charges pondu par un sombre fonctionnaire madrilène préposé aux subsides.

Des acteurs en roue libre (Géraldine Chaplin obligée de cachetonner en descendance anorexique de Zelda Rubinstein dans une ressucée de "Poltergeist" surréalistement mâtinée de "Rubber Johnny"), un scénario atone et inutilement embrouillé, des rebondissements ultra-téléphonés (c'est rien de le dire), un sous-texte ridicule et dont on se fout royalement (est-ce que tout ça est vrai ou est-ce que l'héroïne est bêtement devenue folle et imagine le tout? Tu parles si on s'en branle!), un rythme digne des meilleurs épisodes de Derrick (sans rire, j'ai VRAIMENT failli m'endormir) et, cerise sur cet indigeste cake, un final qui repousse les limites du grotesque jusqu'à l'infini, voire au-delà!

Quant au trouillomètre, on est plus proche ici du train fantôme de Plopsaland que d'un remake de "L'Exorciste" par Rob Zombie, je vous l'assure...
Ouh! Le gros plan sur la balançoire qui bouge toute seule en grinçant (quatre fois la même scène sur l'ensemble du film), y a pas à dire, je balise sévère!
Ah la la! Pif paf, les portes qui claquent, le camion qui déboule sans crier gare, le vilain petit garçon fantôme avec son masque à la con... pour peu j'en mouillerai mon futal, dites donc...

Reste que, oui, c'est pas mal réalisé, la photo est belle et le décor aussi. Et puis y a peut-être une ou deux scènes un peu glaucos, vers le début...

A part ça?
A part ça, c'est tout. Circulez y a rien d'autre à voir!

Bref, le renouveau du cinéma fantastique espagnol - s'il faut croire sur parole ceux qui essayent de nous le vendre - est soit coincé à la frontière, soit encore à venir, soit à chercher ailleurs.

Et si c'est vraiment "L'Orphelinat", eh bien les amérikis, les rosbifs et les asiatiques peuvent largement pioncer sur leurs deux oreilles, ils sont tranquilles, c'est pas demain la veille qu'ils vont perdre leurs parts de marché.

Non mais sans blague!


Cote: °

PS: Et à Mad Movie ils ont a-do-ré! Qu'est que je vous disais?

mercredi 12 mars 2008


A vue de nez, il doit être cinq heures...

"Paris" de Cédric Klapisch (F); avec Romain Duris, Juliette Binoche, François Cluzet, Karin Viard, Fabrice Luchini, Mélanie Laurent...

Des maraichers, une boulangère, une étudiante, un chef de chantier, un prof, des top-models... Tous s'entrecroisent dans Paris, sous les yeux d'un jeune danseur malade, à qui la perspective de la mort offre un nouveau regard sur la ville, sur la vie et sur les gens...

Ah la la la... Ce sacré Cédric Klapisch!

Est-ce qu'il ne serait pas trop gentil en fait?
Des années maintenant, qu'à de rares exceptions près ("Ni Pour, Ni Contre (bien au contraire)", par exemple) il nous ressert le même film choral, bourré jusqu'à la gueule de bonnes intentions...

C'est sympatoche, c'est même mignon tout plein mais ça ne pisse pas bien loin et ça ne casse pas trois pattes à un canard, comme on dit...

Alors qu'est-ce qui ici fait que ça marche? Ou pas?

Des situations simples, filmées simplement et avec une générosité, une empathie envers ses personnages que l'on ne trouve jamais démenties?
Certes, mais, malheureusement, pour une situation qui marche (la visite des top-models aux Halles, la scène finale dans le taxi, la fête chez Duris, etc.) il y en a trois qui tombent à plat (en particulier l'espèce de danse de séduction effectuée par Luchini devant Mélanie Laurent, qui se voudrait drôle et ne réussit qu'à être ridicule, voire carrément embarassante).

Des personnages bien dessinés et des acteurs entièrement au service de ceux-ci?
Peut-être, mais certains sont vraiment sacrifiés (le personnage de boulangère incarné par Karin Viard, par exemple) alors que d'autres se taillent une inutile part du lion (la partie Luchini-Laurent, décidément bien encombrante).

Avec l'histoire de Duris et Binoche et de cette relation frère-soeur, l'une s'ouvrant à la vie au contact de l'autre, Klapisch tenait un sujet en or.
Il en tire d'ailleurs les meilleures scènes du film, prouvant par là qu'il pourrait lâcher un jour son sempiternel fond de commerce pour se tourner avec bonheur vers des drames plus intimistes.
Mais ici, à vouloir courir trop de lièvres à la fois, il finit par se disperser et, plutôt que de s'enrichir, les différents saynettes de son film - trop long et trop riche - donnent finalement l'étrange impression de s'annuler.
Ou du moins de ne jamais aboutir.

A quoi bon rajouter toutes ces scènes à propos de l'immigré ivoirien qui tente de rejoindre son frère à Paris si c'est pour totalement l'abandonner en cours de route, par exemple?

Point de vue interprétation c'est également très, très inégal.
Certains acteurs sont réellement lumineux...
En particulier Duris (c'est suffisament étonnant que pour être souligné) et Binoche, bien entendu, mais aussi Mélanie Laurent, Gilles Lelouche ou Julie Ferrier.
D'autres, c'est bien malheureux à dire, sont totalement en roue libre et cabotinent à outrance. C'est le cas de Cluzet ou de Dupontel et bien entendu de Luchini, absolument insupportable dans son numéro d'auto-caricature hystérique.

Quant à la réalisation, elle aussi souffre de cette dychotomie - pour ne pas dire schizophrénie - qui contamine tout le film, écartelée qu'elle est entre classicisme fluide et maniérisme lelouchien à cinq francs six sous (caméra virevoltante, travellings qui donnent le tournis, etc.).

Au final un film peut-être sincère mais décidément trop bancal et surtout trop appliqué que pour convaincre entièrement.

Une sorte de grosse pièce montée qui, si elle émeut sans doute et fait rire parfois, laisse surtout une impression de poids sur l'estomac.

Dommage, c'était bien essayé.

Peut-être la prochaine fois?


Cote: **

lundi 10 mars 2008

Heroes and Icons...


(Terence Fisher - 1904/1980)


Fatherland?

"This is England" de Shane Meadows (UK), avec Thomas Turgoose, Stephen Graham, Jo Hartley, Andrew Shim, Vicky McClure, Joseph Gilqun...

1983. Dans une ville côtière de Grande-Bretagne, Shaun, 12 ans, habite seul avec sa mère depuis que son père s'est fait tuer aux Malouines. Souffre-douleur de ses camarades de classe, il se lie d'amitié avec une bande de skins locaux... Mais il y a skin et skin. Et lors de la sortie de prison de Combo, skinhead raciste et plus âgé, le ton va violemment changer...

Ah! L'Angleterre de mon adolescence!
Les cités ouvrières, Margaret Thatcher en boucle à la télé, le punk, le ska, les pubs et les pakis. Rien que pour cette ambiance, le film vaut déjà le détour!
Et puis la B.O.: The Specials, Toots and the Maytals, Dexys Midnight Runners, Soft Cell, U.K. Subs... Excellent, tout cela... Excellent...

Mais bien entendu l'intérêt de "This is England" ne réside pas uniquement dans des détails comme ceux-là, fussent-ils aussi sympathiques...

Non, le principal atout de ce film à la fois dur et émouvant, drôle et édifiant, c'est sa générosité. Sa volonté affirmée de ne réduire aucun de ses personnages ni aucune de ses situations à des stéréotypes. Et pourtant, faut avouer qu'avec un sujet pareil, le pari n'était pas gagné d'avance.

Mais l'intelligence de Shane Meadows - réalisateur majeur en Grande-Bretagne dont la majorité des films sont passés totalement inaperçus en nos contrées - est de laisser sa chance à chacun.
En ce sens, aidé par une approche originale bien qu'assez proche du documentaire, "This is England" se révèle être un grand film social comme les britanniques (les aînés Ken Loach et Mike Leigh en tête) savent si bien les faire.
A savoir sans misérabilisme, avec toujours suffisament de recul et d'humour salutaire que pour faire passer presque en douceur les situations les plus ultimes (le film en réserve quelques unes, surtout sur la fin).

Filmé au plus juste, se permettant de resituer son histoire dans le contexte politique plus large de l'époque, le film touche et émeut de par son authenticité et la performance hors norme d'un vivier de jeunes acteurs formidables.
En tête duquel trône l'impressionnant Thomas Turgoose, dans le rôle principal.

Articulé en deux parties distinctes - la première, plus légère, évoquant par moments des oeuvres telles que "Trainspotting" ou "Human Traffic", la seconde, plus sombre, la filmographie de Ken Loach (encore lui!) - "This is England pèche peut-être parfois un peu par excès de romantisme mais, en juxtaposant drame intime avec réalité politique et sociale, en osant même parfois le parallèle avec la Grande-Bretagne actuelle, il parvient toujours à retomber habilement sur ces pattes.

Et même si ce qu'il donne à voir sur les dérives individuelles, le trouble identitaire, les carences affectives de ses protagonistes et la schizophrénie d'une nation tout entière n'est pas forcément folichon, il prouve une fois de plus la force d'un certain cinéma britton, qui arrive à parler de social sans négliger le divertissement et qui fournit son quota d'images fortes, de celles que l'on trimballe avec soi pour longtemps...

Tout en finesse et en authenticité, un film sur les années Thatcher qui, à défaut de devenir culte, pourrait bien donner à son auteur la place qu'il mérite dans le paysage cinématographique britannique.

Voire peut-être mondial...


Cote: ***

mercredi 5 mars 2008



Pourquoi je ne suis pas allé voir...

(ou "toi aussi fais ton Finkielkraut et parle de films que tu n'as même pas vus")

I. "30 Jours de Nuit" (30 Days of Night) de David Slade (USA); avec Josh Hartnett, Melissa George, Danny Huston, Ben Foster, Mark Boone Jr...

J'avais pourtant assez bien aimé le premier effort du jeune Slade, "Hard Candy", avec ma nouvelle chouchou(te) Ellen Page...

Et puis c'est le genre de film que tout me prédestinait à aller voir, non?

Alors pourquoi?

1. Assez prosaïquement, parce que c'est sorti pendant une période au cours de laquelle il y avait plein d'autres choses à voir. Il a fallu faire des choix. Et le temps que ça se décante au niveau des sorties, ben on ne le jouait plus nulle part. A part peut-être au Barakinépolis mais là, autant vous le dire tout de suite: plutôt crever!

2. Parce que j'ai lu tout et son contraire sur ce film. Et en fin de compte, plus de critiques négatives - voire qui faisaient vraiment peur - qu'autre chose... Et puis parce que, dans ma grande sagesse, j'ai appris à me méfier des pitchs qui feraient un bon sujet de court-métrage.

3. Parce qu'à "Mad Movies" ils ont a-do-ré et que ça, c'est TOUJOURS mauvais signe!

4. Parce que même au moment de sa sortie, à part à Brupark-sa-sauvage-et-lointaine-banlieue, on ne le projetait déjà qu'à l'UGC De Brouckère, le Kinépolis du centre-ville. Et qu'aller voir un film là, a fortiori un film d'horreur pour nerds comme celui-ci, c'est s'exposer à passer la séance entouré d'une horde de teens mongoloïdes prépubères qui se goinfrent de nachos au fromage-qui-pue et de pop-corn-qui-crisse et qui ne sont pas foutus de fixer leur attention sur quelque chose plus de vingt minutes. Au delà desquelles ils se mettent à s'envoyer des sms inter-rangées, à faire des commentaires à voix haute, à se battre, à téléphoner, à entrer et sortir de la salle avec la délicatesse de l'éléphant de mer en rut et j'en passe bien sûr, merci.
Et ça, pour moi, je sais pas mais ça devient de plus en plus mission impossible...

Est-ce que je le louerai quand il sortira en DVD?

Ben oui, quand même, et pas qu'un peu.

Prochainement: Pourquoi je ne suis pas allé voir... "Promets-moi", d'Emir Kusturica.

mardi 4 mars 2008



En attendant le Bifff...

On l'a dit, écrit, répété, beuglé sur tous les toits: l'édition 2007 du Festival International du Film Fantastique, de Science-Fiction et Thriller de Bruxelles (ouf!) fût à proprement parler pitoyable!

Programmation nullissime, délocalisation dans un endroit très joli mais bien trop grand et surtout inacessible, multiplication des digressions totalement hors sujet (concerts, etc.) au détriment du cinéma proprement dit (pourtant essentiel dans ce genre de manifestation, du moins me semble-t-il) nouvelle salle affreusement inconfortable, problèmes techniques récurents (surtout au niveau du son), non respect des horaires, on en passe et de plus gratinées...

Restait donc à espérer, au moment de la cloture, que tout cela ne serait que maladies de jeunesses et que les organisateurs allaient se nourir de leur expérience afin d'éviter les erreurs passées...

A l'heure où sort le programme de l'édition 2008, on peut déjà se féliciter d'une chose: la mégalomaniaque et totalement inutile - et ridicule - salle de concert dans laquelle ont du se presser au total six personnes tout au long de l'événement (hors Bal des Vampires, bien entendu) a été reconvertie en deuxième salle de projection.
Heureuse initiative (ou "bonne attitude", comme dirait l'autre)!
Cependant, du coup, exit le Nova (du moins en tant que lieu)...

La où ça se corse, c'est au niveau de la programmation...
Je ne vais pas non plus prétendre être l'autorité suprême en la matière mais quand même! Ce coup-ci il y a carrément les deux-tiers des films dont je n'ai JAMAIS entendu parler! Même le film de cloture, j'ai du faire des recherches pour savoir ce que c'était!

Et puis, on trouvait déjà que ça débordait un peu côté cinéma asiatique (même si c'est de cette région du globe que viennent pas mal des films les plus intéressants de ces dernières années) mais là ça frise l'indigestion!
A la lecture du programme on a l'impression qu'une moitié des films vient d'Asie et l'autre d'Espagne ou à peu près...

On me dira que c'est un peu le but d'un festival de proposer des découvertes, des films inédits, des cinématographies originales.
Certes, certes... Il n'empêche qu'en la matière, ça sent plus le fond de tiroir que le laboratoire pour cinéphile...
Et puis, une ou deux locomotives ça ne fait jamais de mal, non plus.
Bien sûr il reste "Diary of the Dead", "Doomsday" ou encore "Mother of Tears", entre quelques autres, mais tout cela parait bien maigre...

Enfin, on jugera sur pièces, hein...

Au rayon des déceptions personnelles, deux des films qui m'intéressaient le plus ([REC], de Jaume Balaguero et Paco Plaza et le frenchie-mais-gore "A l'Intérieur") sont projetés lors de la Nuit.
Or s'il y a bien un événement auquel je n'assiste pas pour cause d'overdose de "sales têteurs de Cara qui vont au Bifff voir du gore hongrois avec un klaxon de foot pour faire de son Jean Gabin dès qu'il y a un téton sur l'écran" c'est bien la Nuit, godferdoem!!!

Une consolation, quand même: cette fameuse deuxième salle va me permettre de revoir enfin un film que je cherche comme un dément depuis de nombreuses années: "La Forteresse Noire" (The Keep), de Michael Mann!

Et rien que pour ça: vivement bientôt quand même, tiens!

lundi 3 mars 2008


A l'ombre des derricks...

"There Will Be Blood" de Paul Thomas Anderson (USA); avec Daniel Day-Lewis, Paul Dano, Kevin J. O'Connor, Ciaran Hinds, Dillon Freasier, Sydney McCallister...

De 1892 à 1927, l'irrésistible ascension de Daniel Plainview qui, de simple prospecteur, va finalement se transformer en magnat du pétrole aux méthodes implacables.

Le voilà donc, ce monument!

Le "Citizen Kane" de l'an 2000!

Un film dont, parait-il on parlera d'ici dix ou vingt ans comme l'on parle aujourd'hui de "Taxi Driver" ou du "Parrain" et de l'impact qu'ils ont eu sur leur époque...

Un classique en devenir... Une oeuvre majeure... Un monstre!

Oui, le voilà.

Et tout cela est vrai.

Rien à dire, rien à faire si ce n'est se rendre à l'évidence...

Et pour paraphraser un célèbre critique cathodique, ce n'est pas tous les jours - dans mon cas c'est même probablement la première fois - que l'on se retrouve en train de regarder un film dont on sait, au moment même où il se déroule sur l'écran, qu'il fera date.
Qu'il marquera son époque, tout simplement.

Ca peut paraitre énorme, exagéré, ampoulé, grandiloquent... C'est pourtant simplement la vérité.
2h38 d'un film dont il n'y a absolument rien, pas une image, pas un son (et quel son!) à jeter. 2h38 qui semblent passer à la vitesse de l'éclair et qui pourtant marquent la rétine de manière indélébile.

Y a qu'à voir: même la musique de Jonny Greenwood (Radiohead) est formidable! C'est dire!

C'est un film hypnotisant, qui convoque les fantômes de Griffith, Ford, Hawks, Scorsese, ou même Kubrick!
Qui évoque à la fois "Il était une fois dans l'Ouest", "Les Raisins de la Colère", "Le Jour du Fléau" (si, si !) ou le meilleur de Malick.
Un film de grands espace, dont la beauté des images et la force de la bande son (tant la musique que le reste, d'ailleurs) permettent au décidément très écléctique Paul Thomas Anderson de réussir un tour de force.
Celui de conjuguer le meilleur du cinéma populaire avec une modernité rageuse et une démesure à proprement parler revigorante.

Un film d'horreur, un western, une saga historique et familiale!
Tout ça en même temps!
Et même plus encore!

Le tout souligné par des parti pris ultra-gonflés, une audace de tout les instants; comme le démontrent ces quinze premières minutes quasiment sans paroles, cette ahurissante scène d' explosion d'un puit ou encore la dernière demie-heure, tragi-comique, presque burlesque et pourtant terrifiante de folie, dont les ultimes images et surtout l'ultime réplique resteront plus que probablement gravées dans les annales de l'Histoire cinématographique.

Je sais, je sais, ça fait beaucoup.

Et pourtant, rien à faire, pas moyen de réfréner son enthousiasme face à un film (pourtant vu il y a déjà presque deux semaines) qui vous laisse à la limite du traumatisme.
Une expérience cinématographique unique en son genre.

Brillant d'ambiguïté et de trouble dans sa description de ce qui est après tout une véritable lutte entre le Bien et le Mal tout en n'oubliant pas de se faire spectaculaire quand c'est nécéssaire, bénéficiant d'un travail d'écriture, d'un travail sur l'image, sur le son, comme on en voit peu, dominé par la performance presque effrayante d'un Daniel Day-Lewis habité comme jamais (et auquel pourtant le jeune Paul Dano arrive presque à tenir tête) "There Will Be Blood", plus qu'une simple épopée sur le pétrole, est bien ce qu'il est convenu d'appeler un chef d'oeuvre!

Qui sait seulement combien d'années il nous faudra pour en épuiser toutes les richesses et les beautés...

Et combien de temps va s'écouler avant que l'on ne soit à nouveau secoués de la sorte...


Cote: ***** (et je suis chez moi, je donne cinq étoiles si je veux!)