lundi 31 décembre 2007



Au troisième... euh... deuxième top on sera en... Oh! Et puis merde!

Trop compliquéééé....

Troisième top mais comme le top musical est resté calé sur le blog de Sport Doen ça fait plus que deux mais si on compte le "Spécial Bifff"...

Oooouuuhhh!!!! Mal ma tête!

Bref, le Top 20 de les Meilleurs Films vus (en salle) en 2007 se présente comme suit...

1. "Les Promesses de l'Ombre" (Eastern Promises) de David Cronenberg (CAN).

2. "L'Assassinat de Jesses James par le lâche Robert Ford" (The Assassination of Jesse James by the coward Robert Ford) d'Andrew Dominik (USA).
3. "Zodiac" de David Fincher (USA).
4. "La Nuit Nous Appartient" (We Own the Night) de James Gray (USA).
5. "American Gangster" de Ridley Scott (USA).
6. "La Môme" d'Olivier Dahan (F).
7. "Le Scaphandre et le Papillon" de Julian Schnabel (F).
8. "Le Dernier Roi d'Ecosse" (The Last King of Scotland) de Kevin MacDonald (UK).
9. "My Blueberry Nights" de Wong Kar-wai (HK/USA/F).
10. "Inland Empire" de David Lynch (USA).
11. "The Host" (Gweomul) de Bong Joon-ho (SK).
12. "Boulevard de la Mort" (Death Proof) de Quentin Tarantino (USA).
13. "Chronique d'un Scandale" (Notes on a Scandal) de Richard Eyre (UK).
14. "La Vie des Autres" (Das Leben der Anderen) de Florian Henckel von Donnersmarck (G).
15. "Lady Chatterley"de Pascale Ferran (F).
16. "Raisons d'Etat" (The Good Shepherd) de Robert De Niro (USA).
17. "Le Prestige" (The Prestige) de Christopher Nolan (USA).
18. "Michael Clayton" de Tony Gilroy (USA).
19. "Hot Fuzz" d'Edgar Wright (UK).
20. "Planète Terreur" (Planet Terror) de Robert Rodriguez (USA).

-Meilleurs Acteurs 2007:

Forest Whitaker (Le Dernier Roi d'Ecosse).
Marion Cotillard (La Môme).
Casey Affleck (L'Assassinat de Jesse James...).

...et bien entendu Cate Blanchett pour l'ensemble de son oeuvre!

-Plus Mauvais Acteur du Millénaire:

Mais comment fait-il?

Smaïn, bien entendu!

-Top 1 du Meilleur Film du Monde de l'Univers Connu et Inconnu, Visible et Invisible vu* en DVD:

1. "Je vais bien, ne t'en fais pas" de Philippe Lioret (F).

-Attentes pour 2008:

En vrac et sans vraiment réfléchir:

"Shutter Island" de Martin Scorsese; "The Happening" de M. Night Shyamalan; "La Clef" de Guillaume Nicloux; "It's a free world" de Ken Loach; "Vicky Cristina Barcelona" de Woody Allen; "The Dark Knight" de Christopher Nolan; "The Lovely Bones" de Peter Jackson; "Into the Wild" de Sean Penn; "No Country for Old Men" des frères Coen; "Dante 01" de Marc Caro; "Lust, Caution" d'Ang Lee et bien sûr "Sweeney Todd" de Tim Burton, entre autres...

Voilà, cette fois c'est bien fini (pour 2007). Et bonané à tous!

PS: la critique de "Gone Baby Gone" de Ben Affleck, dernier film vu en 2007, attendra le début 2008.
La flemme...

* ouais, ouais...



vendredi 28 décembre 2007

Heroes and Icons...


(La Garçonnière; Billy Wilder, 1960)

jeudi 27 décembre 2007



Du rab de top en direc' du Bifff!

Allez, en attendant le merveilleux, chatoyant, mirifique et bigarré Top 20 (rien de moins!) des films de l'année quasi écoulée (je dois encore voir "Gone Baby Gone", demain) voici donc le désormais traditionnel Top 10 Spécial Fantastique/Horreur/S.F. comme toujours brought to you by a "sale téteur de Cara Pils qui va voir du gore hongrois au Bifff avec un klaxon de foot pour faire son Jean Gabin dès qu'il y a un téton sur l'écran!" (copyright Serge Coosemans).

Featuring this year:

1. "The Host" (Gwoemul) de Bong Joon-ho (SK).

Après avoir dynamité les codes du film policier dans le déjà sidérant "Memories of Murder", Bong Joon-Ho remet ça avec ceux du film de monstre. Le résultat a gagné le Corbeau d'Or (Grand Prix) au Bifff 2007 mais aurait aussi bien pu repartir avec tous les trophées (sauf le Méliès).

2. "Le Prestige" (The Prestige) de Christopher Nolan (USA).

Kitschounet et finalement plus roublard qu'autre chose, le film de Nolan confirme quand même que ce dernier est un styliste monstrueux. En plus l'histoire tient la route et il y a Dieu le Père dans un second rôle. Que demander de plus?

3. "Planète Terreur" (Planet Terror) de Robert Rodriguez (USA).

Vrooom! Bang bang! Splortch! Huuurgh! Tchac boum! Yiiihaaaa!
Résultat? Schboïng! Erection!

4. "28 Semaines plus tard" (28 Weeks Later) de Juan Carlos Fresnadillo (UK).

Plantage intégral? Nenni! Suite en forme de série B bien burnée et rudement efficace? Beaucoup plus probable...

5. "Je suis une Légende" (I am Legend) de Francis Lawrence (USA).

Arriver à ne pas emmerder avec quasi QUE Will Smith à l'écran pendant 1h40, c'est déjà un tour de force, na!

6. "Day Watch" (Dnevnoi Dozor) de Timur Bekmambetov (RU).

La suite beaucoup plus engageante - et menée tambour battant - du très surestimé "Night Watch".

7. "300" de Zack Snyder (USA).

Comment, "c'est un péplum"?
Pas seulement!
Et "Tonight, we shall dine in hell!" nom de tcheu!

8. "Chambre 1408" (1408) de Mikaël Hafstrom (USA).

Classique, très classique!
Mais efficace.

9. "Re-Cycle" (Gwai Wik) de Danny et Oxide Pang (HK).

D'accord, la fin est naze, immonde, baclée et complètement nauséabonde... Mais à part ça, ce mélange complètement barré de film de fantômes asiatique, de Tim Burton et de Silent Hill fournit l'un des plus beaux spectacles cinématographiques que l'on aie vu ces dernières années, tout genres confondus.

10. Ah tiens, y a pas de dix... Petite année pour le genre, donc.
Comme le confirme la plus pitoyable édition du Bifff depuis ses débuts.

Reste plus qu'a espérer qu'ils se rattrapent en 2008...



Cockney Rejects.

"Le Rêve de Cassandre" (Cassandra's Dream) de Woody Allen (USA); avec Ewan McGregor, Colin Farrell, Haley Atwell, Tom Wilkinson, Sally Hawkins, Phil Davis...

Ian et Terry, deux frères issus d'un milieu modeste, s'offrent sur un coup de tête un voilier baptisé "Cassandra's Dream".
Ni l'un ni l'autre n'ont vraiment les moyens d'assumer cette dépense...
Ainsi, lorsque le premier s'entiche d'une comédienne ambitieuse et dépensière et que le second contracte une importante dette de jeu, n'ont-ils d'autre solution que de se tourner vers leur richissime oncle Howard.
Lequel, en échange de son aide financière, leur demande de lui rendre un service d'un tout autre genre...

Boum, badaboum, tagada tsoin tsoin: voici donc le Woody Allen annuel!

Le troisième consécutif tourné dans la capitale britannique après des années passées à filmer New York sous toutes ses coutures (et en attendant sa prochaine escapade espagnole).
Capitale qui continue à plutôt bien lui réussir, même si l'on est ici à quelques encâblures de "Match Point", sa dernière vraie réussite à laquelle ce "Rêve..." fait pourtant fort penser.

Même connotation sombre, même ambiance dramatique - ce n'est donc pas un Woody Allen rigolo - même engrenage criminel...
Mêmes préocupations, surtout: du crime et de ses conséquences vues à travers le prisme d'un destin implacable compliqué d'implications morales qui font discrètement verser le tout dans un tragique de bon aloi; grec, tel qu'indiqué dans le titre mais aussi russe, le "Crime et Chatiment" initial se teintant ici d'une bonne dose de "Frères Karamazov".

Moins cynique mais peut-être plus sombre que le déjà fort rêche "Match Point", "Le Rêve de Cassandre" dépeint discrètement mais efficacement les rapports de classes tout en restant malheureusement un peu trop à surface des choses. N'est pas Ken Loach qui veut, évidemment...
L'important étant plutôt ici dans le récit, mené tambour battant et qui se déroule de manière implacable, suivant ses protagonistes et la situation dans laquelle ils se sont fourrés d'un point A à un point B avec une précision, une exactitude même qui confine à l'ascèse.

Le tout est servi par un duo d'acteurs magistral (et magistralement dirigé) qui achève de faire du film une petite réussite même si, paradoxalement, il laisse aussi le vrai fan sur sa faim.
De par son côté radical, presque clinique et sa totale sobriété, sans doute...
De part ses détails sur lesquels on a du mal à mettre le doigt mais qui font que, alors que l'on se trouve en terrain relativement connu, on a en même temps du mal à croire que c'est bien là un film de Woody Allen que l'on regarde...

Et c'est peut-être bien ça, cette obligation que Allen a à se chercher, à se renouveler tout en faisant toujours la même chose qui fait la force et la faiblesse de la "période européenne" du petit maître.

Une paranthèse réjouissante mais qu'il est peut-être bientôt temps de refermer...
Pour aborder à nouveau New York. Mais avec un regard neuf...


Côte: **

dimanche 23 décembre 2007


Blowin' in the pipeau...

"I'm Not There" de Todd Haynes (USA); avec Richard Gere, Cate Blanchett, Christian Bale, Charlotte Gainsbourg, Heath Ledger, Michelle Williams...

Un voyage à travers les vies de Bob Dylan...

Bon, finissons en une bonne fois pour toutes: Cate Blanchett is God!
Depuis la mort de Jodie Foster (oui, elle doit être au moins en état de mort cérébrale sinon je vois pas ce qui justifierait ses récents choix de carrière) l'Australienne est bien devenue tout simplement LA meilleure actrice au monde.
Ce que confirme brillamment sa prestation ici, où elle est carrémment hallucinante de mimétisme.
Pour une fois qu'un prix d'interprétation (Venise, en l'occurence) n'est absolument pas usurpé...

Voila...
Pour le reste, expédions également les quelques rares autres qualités du brol...

Bon, oui, à part La Blanchett, tous les autres comédiens, de Christian Bale à Michelle Williams, méconnaissable, en passant par Charlotte Gainsbourg (et à l'exception de Richard Gere, comme à son habitude incolore, inodore et quasiment transparent) sont formidables.
Et force est de reconnaitre aussi que les images sont très belles, surtout quelques plans-séquences et travellings aériens qui magnifient la campagne américaine.
On peut même reconnaitre du bout des lèvres qu'il y a ici et là quelques bonnes idées de cinéma (tout l'épisode du fameux "passage à l'éléctricité" par exemple).
Mais au service de quoi?

D'une gigantesque branlette!

D'une couillonnade arty branchouille pour happy few en mal de conversation mondaine.
Un film de petit con poseur qui se regarde filmer. A l'attention de ses potes, probablement... Comme "Adaptation." ou "I Heart Huckabees" (je vais encore me faire sonner les cloches) un film destiné à des étudiants en cinéma, des critiques et d'autres scénaristes ou réalisateurs, sans doute.
Une bonne blague prétentieuse, en somme.
On imagine presque les gars, riant sous cape de la bonne farce, du bon tour joué aux pauvre public qui n'y entrave que pouic.

Enfin, non, même pas...
Parce qu'on la comprend bien, la grosse métaphore. Dylan est multiple et Dylan c'est nous. Nous sommes tous "plusieurs" et gnagnagna...
Non, le problème, il est plutôt dans la forme.

Et pourtant ça sonnait plutôt bien, sur le papier...
Alors, finalement comment on a fait pour en arriver à ça? A ce délire chronologique, ces "hommages" prétentieux et loupés ("Huit et Demi"! Misère!), cet onirisme bâclé, ce côté fourre-tout; grand brollewinkel de l'imagerie indé U.S.?...

Pour en arriver surtout - et tout simplement - à un film aussi chiant!

Parce que c'est là que le bat blesse vraiment, en fin de compte. Passé le premier quart d'heure, intrigant, on se fait tout bonnement chier. Point.

Enfin, il y aura bien eu une chose de positif: ne connaissant de Dylan que peu de choses, je me suis rendu compte d'un truc, à travers cette épreuve (y a pas d'autre mot).
Ca à surgit comme ça, comme une évidence...
A l'exception d'une ou deux rengaines qui nous accompagnent tous, un peu par la force des choses, eh bien, je n'aime pas Dylan!

Alors, évidemment...


Côte: * (Ben oui, pour Cate Blanchett).


Will Smith saves the world (encore une fois)...

"Je Suis Une Légende" (I Am Legend) de Francis Lawrence (USA); avec Will Smith, Alice Braga, Dash Mihok, Emma Thompson, Charlie Tahan, April Grace...

Alors que la majorité de la population mondiale a été décimée par un virus, Robert Neville, savant mystérieusement immunisé contre celui-ci continue ses recherches dans un New York dévasté et hanté par les "Infectés", terribles mutants, victimes de cette implacable maladie...

Ouaaaaaaaaaaaaiiiiiiis !!!!!
Cette fois encore j'entends brâmer dans les couloirs; "Scandale! Procès! Pétition! Ca n'arrive pas à la cheville de la précédente adaptation du roman de Matheson" (que je n'ai pas lu et que je ne lirais sans doute jamais) "le Omega Man avec Charlton Heston! Connerie! Ersatz! Remboursez!"

Ouais mais ouais mais ouais, doucement, hein?

Bon allez, c'est sûr que l'autre, avec Papy NRA en looser alcoolique et bedonnant, directement sorti de "Soleil Vert" (autre réussite du genre) et errant dans un décor post-apocalyptique qui préfigurait les "Mad Max", ça avait une autre allure.
Ouais, bon...
Mais il n'empêche!
Celui-ci à quand même une sérieuse dégaine de bonne surprise de fin d'année...

Parce que quand même...

Bien sûr, bien sûr, il y a des faiblesses, des endroits où ça coince.
Will Smith est très bien et très sobre mais son éternel personnage de brave type qui aime bien Shreck, Bob Marley et les chienchiens on commence à avoir donné, c'est certain.
Les Infectés en images de synthèse (ou en motion capture, 'fin bref) sont un peu trop artificiels que pour vraiment foutre la trouille, si ce n'est lorsqu'ils surgissent de l'obscurité en hurlant comme des sirènes, effet facile s'il en est.
Et puis la fin, bizarrement messianique surtout quand on pense à ce que Will Smith a balancé sur le Bon Dieu trois scènes auparavant est à la fois trop attendue, trop expédiée et trop dégoulinante de bons sentiments que pour que l'on ne puisse faire autre chose que la grimace.

Mais enfin, faut reconnaitre qu'à part ça on ne se sera pas emmerdé. Pour le moins.

Grâce en soit rendue à une direction artistique magnifique, d'abord, qui fait de ce New York désert et envahi par les plantes et les animaux sauvages (belle scène d'ouverture avec des chevreuils) le véritable personnage principal du film.
A une mise en scène nerveuse et pour le moins efficace, même si elle ne brille pas par sa virtuosité, ensuite.
Et enfin à un scénario assez malin qui, de flashbacks heureusement légers en ellipses bien senties (on ne saura jamais pourquoi le personnage de Will Smith est immunisé. Rédemption ou malédiction? Va savoir, mais ça c'est du petit sous-texte. Mouarf!) réussi la gageure de ne jamais lasser- que du contraire!
Alors que, putain!, Will Smith est quand même seul à l'écran (enfin, souvent accompagné d'un chien, c'est vrai) pendant les neuf dixièmes du film!

Alors, oui, c'est un blockbuster, un vrai, un gros, un qui a dû coûter du pognon et pas qu'un peu. Mais un blockbuster vif et malin qui a au moins le bon goût de ne pas prendre son public pour un- ou des - con(s).

Faut bien avouer que c'est déjà ça...


Côte: **

jeudi 20 décembre 2007



Au Troisième Top on sera en 2008! (I).

Eh oui! C'est la saison!

Et pour commencer dans la joie et la bonne humeur, voici d'abord le traditionnel "Flop 5"!
Comme toujours, ça ne concerne que les films vus en salle au cours de l'année écoulée.
J'en ai encore trois quatre à voir d'ici le 31, mais il y a peu de chance que ces cinq-ci soient détronés.

Donc, les (fameuses tronches de) winners sont:

1. "Truands"; de Frédéric Schoendoerffer (F).
LE grand film fasciste de l'année. Plus nauséabond qu'un cul de babouin, plus laid que la nouvelle bouche d'Axelle Red et interprété par une bande d'agités du bocal à qui on a vite envie de faire subir les mêmes vilénies que celles vues à l'écran.
Si vous n'avez pas vu cette merveille en salle, épargnez-vous le supplice de la location: autant chier directement dans votre lecteur DVD, c'est plus rapide, ça coûte moins cher et c'est même pas sûr que ce soit plus sale...

2. "The Fountain"; de Darren Aronofsky (USA).
Le grand gloubiboulga cosmique du réalisateur de "Requiem for a Dream".
Plus ridicule qu'autre chose mais ça atteint un tel niveau de kitscherie et de connerie new age que ça en devient franchement pitoyable.
Toujours pas trouvé ce qu'il avait fumé ou pris avant de filmer ça...
Et le problème c'est que, à mon avis, faut vaiment être dans le même état pour pouvoir apprécier... Ou pas...

3. "The Return"; d'Asif Kapadia (USA).
Le film d'horreur où il ne se passe rien! Mais alors là RIEN, hein?
Vu au Bifff, ça ne sort en salle que début janvier.
Si vous comptiez y aller, épargnez-vous cette peine (à moins d'être un inconditionnel de Sarah Michelle Gellar... Parce qu'à part elle et peut-être un beau chapeau...). Misère...

4. "Le Candidat"; de Niels Arestrup (F).
Les débuts ratés de Niels Arestrup derrière la caméra. Figé, poussiéreux, daté, plat, sans audace et interprété par des momies. Une espèce de catalogue de ce qui se fait de pire en matière d' "exception culturelle" française.

5. "Le Dernier Gang"; d'Ariel Zeitoun (F).
Téléfilm de luxe mais poussif, le film d'Ariel Zeitoun (probablement son meilleur mais ça ne veut pas dire grand' chose) tente péniblement de réssuciter la tradition du polar "à la française".
Comment? C'est raté?
Ah ben oui. C'est raté.

Update: comme vous pourrez le lire plus haut, "I'm Not There" a manqué de peu l'honneur de figurer dans ce palmarès. Enfin, au moins y a-t-il là, contrairement aux films ci-dessus, une tentative de la part de l'auteur de dire ou faire quelque chose... Quant à savoir quoi...

mercredi 19 décembre 2007



One Woman Show!

"Elizabeth: L'Age d'Or" (Elizabeth: The Golden Age) de Shekhar Kapur (USA); avec Cate Blanchett, Clive Owen, Samantha Norton, Geoffrey Rush, Abbie Cornish, Rhys Ifans...

En 1585, après 30 ans de règne, Elizabeth Ière, la Reine Vierge et protestante, lutte contre la montée du catholicisme représenté par Philippe d'Espagne et son Armada, lequel se sert de Mary Stuart, reine d'Ecosse pour aboutir à ses fins.

Hé oui!
Neuf ans après le film qui révéla Cate Blanchett à la face du monde, l'Indien Shekhar Kapur remet le couvert et signe une nouvelle fresque démesurée, riche en effets de manche et peu avare de grand spectacle.

Pourtant, force est de l'avouer, le réalisateur est paradoxalement plus doué pour dénouer les intrigues de cour que pour reconstituer le fracas des batailles.
Heureusement, d'ailleurs, car ce gigantesque combat naval dont l'artificialité kitsch saute un peu trop aux yeux n'intervient qu'après une bonne heure et vingt minutes de film.
Entretemps, l'amateur de morceaux de bravoure aura eu le temps de patienter avec cette espèce de gigantesque livre d'images, somptueusement mis en scène, riche et chatoyant.

La force de ce deuxième volet se trouve dans son didactisme (on pourrait même presque parler de vulgarisation) qui fait que, malgré l'importance des enjeux, la complexité des intrigues et la multiplication des personnages, il ne nous perd jamais en cours de route.
Et c'est tant mieux parce que c'est véritablement passionnant, pour une fois...

Subtilement, de part sa réalisation qui emprunte autant au théatre élizabéthain (forcément) qu'à la recherche picturale mais aussi de par sa volonté d'insérer la petite histoire dans la grande, Kapur réussit à passer outre le carcan de la recontitution historique et évite - de justesse - l'exercice de style par trop figé.

Malheureusement, s'il ne se perd pas pour autant en de vaines digressions, le réalisateur, qui a un peu trop tendance à laisser trainer ses plans et ses scènes, dilue trop son scénario que pour ne pas faire subir au film quelques pertes de rythmes réellement dommageables.

Mais le vrai intérêt du film réside bien entendu tout à fait ailleurs: dans l'interprétation magistrale d'une Cate Blanchett qui, après "Chronique d'un Scandale" et en attendant "I'm Not There" (bientôt, bientôt...), aura décidément marqué 2007 de son empreinte.
C'est son jeu d'une intelligence rare, évitant avec finesse les pièges d'un vérisme malheureusement inhérent à ce genre de film (n'oublions pas qu'Elizabeth est censée avoir la bonne cinquantaine) qui permet au film de se hisser - timidement, il est vrai - un poil plus haut que la moyenne du genre.

A ses côtés, Clive Owen apparait malheureusement palôt et peu vraisemblable dans le rôle de l'improbable pirate-soupirant.
Mais d'autres que lui se chargent de faire briller un peu plus Cate Blanchett en lui donnant une réplique efficace sans pour autant lui servir la soupe: Geoffrey Rush, Samantha Morton (dont le personnage de Mary Stuart est cependant un peu sacrifié*) ou encore la relative novice Abbie Cornish qui compose l'un des personnages les plus complexes et ambigus de cette saga brillante bien qu'un tantinet boursouflée.

En attendant le troisième volet déjà annoncé, cette suite, qui manque un peu de souffle mais pas pour autant d'intérêt, fait donc passer un bon moment de cinoche un peu académique mais dont la sauce, déjà très riche, est heureusement relevée par un ingrédient de choix: Cate Blanchett, bien entendu...

Qui prouve encore une fois ici qu'elle est peut-être la meilleure actrice de sa génération.

Et ce en toute simplicité...


Côte: **


(*oui, bon...)

mardi 18 décembre 2007



Bluette...

"My Blueberry Nights" de Wong Kar-Wai (USA/HK/F); avec Norah Jones, Jude Law, Natalie Portman, David Strathairn, Rachel Weisz...

Après une rupture difficile, Elizabeth pars à l'aventure à travers les Etats-Unis et, par le biais de divers emplois de serveuse, se lie avec des clients de passage aux vies plus tourmentées que la sienne.

Ce sacré Wong Kar-Wai...
Comment fait-il?
Comment réussit-il à transformer ce petit film somme toute anodin en une vraie réussite.
Parce que c'est pas le scénario, sans cesse rabaché et tenant sur une feuille de papier à cigarette qui est la clef de l'affaire. Pas plus que les situtations. Ni même les personnages, pourtant tous très attachants.

Alors quoi?

La magie d'une mise en scène à la maitrise hallucinante? L'image travaillée comme une toile? La photo magnifique de Darius Khondji (qui remplace ici le traditionnel Christopher Doyle)?

Tout ça à la fois?

Tout ça et plus encore, sans doute...
Le plaisir de retrouver le cinéma fétichiste de Wong Kar-Wai enfin revenu à des dimensions raisonnables et humaines après les errances absconses de "2046".
La satisfaction de le voir replacer ses obsessions dans un contexte pour une fois entièrement différent. Que ce soit des lieux (un restaurant, une salle de jeu), des objets (les raviolis d' "In the Mood for Love" remplacés ici par une tarte aux myrtilles) ou même un thème musical (celui d' "In the Mood for Love", encore, américanisé et rejoué à l'harmonica).
L'Amérique et ses thèmes éternels (le parti pris du road movie) revisitée à travers le regard d'un heureux novice qui arrive encore à les magnifier.
Les multiples citations, de Wenders à "Reservoir Dogs".
Les acteurs, bien sûr, tous formidables - avec mention spéciale néanmoins au trop sous-estimé et sous-employé David Strathairn, le Sam Shepard du film et à la toujours formidable Natalie Portman, vraiment étonnante en joueuse compulsive et solitaire.

Un ensemble qui fait oublier les maladresses de la débutante Norah Jones, d'une mise en place laborieuse (les vingt premières minutes laissent en effet craindre le pire) et d'un scénario un peu trop volatil... Pour ne pas dire fumeux...

Alors oui, on peut reprocher au cinéaste de refaire sans cesse le même film, de ne mettre sa virtuosité qu'au service de choses creuses et éphémères mais ce bel objet artificiel et lumineux, qui se paye néanmoins le luxe d'une mini-révolution en bouclant la boucle sur une atypique happy-end, met les afficionados du style Kar-Wai dans un état de quasi apesanteur.

Parfois factice, parfois proche de l'exercice de style, "My Blueberry Nights" est finalement un prolongement logique des précédents films du cinéaste hong-kongais dont il n'atteint certainement pas la maitrise ni la complexité.

Certes, certes, certes...

Mais les partitions les plus simples ne sont-elles pas parfois les plus agréables?


Côte: ***

lundi 10 décembre 2007



Film belge.

"Cowboy" de Benoît Mariage (B); avec Benoit Poelvoorde, Julie Depardieu, Gilbert Melki, François Damiens, Bouli Lanners, Philippe Nahon...

Daniel Piron est journaliste. Mais sa vie est mal engagée. Son travail est un fiasco et sa vie de couple bât de l'aile. Il semble être revenu de tout. Alors, pour réveiller le jeune homme contestataire et engagé qui sommeille en lui, il décide de retrouver Tony Sacchi qui, vingt ans plus tôt, avait secoué sa conscience en mettant sur pied une prise d'otage naïve et maladroite...

Alors voila "Cowboy".
Un film que - à l'instar du premier film de Liberski, "Bunker Paradise", d'ailleurs - les Snuls auraient en leur temps introduit de leur célèbre phrase "...et maintenant, dans notre série "Un Beau Film": un beau film..."

Une oeuvrette dont on dira que c'est "un joli petit film", comme on dit de quelqu'un qu'il est gentil. Faute de dire autre chose et avec tout l'ironie contrite que cela sous-entend...
Parce que "Cowboy" voudrait être attachant, pourrait être réussi, mais ne parvient, en égrénant tous les clichés et tous les passages obligés d'un certain cinéma belge (ou peut-être devrait-on dire "wallon" ou du moins "francophone") qu'à devenir une espèce de caricature devant laquelle on reste pour le moins perplexe, se demandant parfois - parfois seulement mais quand même - s'il ne vaudrait pas mieux en rire...

Réalisme social, humour belche, de zee/la mer filmée comme dans un clip des Sacrés Belges (avec en plus Saule à la musique), décor de briques rouges, seconds rôles que l'on voudrait truculents et décalés, ambiance "Strip-Tease", mélancolie, auto-dérision et surtout un certain surréalisme, voire onirisme que l'on agite comme un étendard et qui donne lieu à des scènes que l'on croirait barrées d'un gigantesque sigle "Achtung! Kolossale Poézie!" (Ah! La scène du bus sur la plage, par exemple!).

Si encore c'était un premier film...
Mais après des kilomètres de "Rosetta", "Huitième Jour", "Ultranova" et autres "Convoyeurs Attendent", justement, ça en devient presque embarrassant cet espèce de label "qualité belge" - comme on disait jadis "qualité française" - qui conduit certains réalisateurs - sans doute animés des meilleures intentions en plus, ne leur faisont pas de faux procès- à tourner sans cesse le même film.

Même le casting à base des sempiternels mêmes Poelvoorde, Lanners et Damiens participe à cette impression générale d'assister à une émission du service public. De qualité, certes, mais rabâchée. Tellement rabâchée...

Poelvoorde est très bien, comme toujours, mais il n'empêche que même s'il est ici un poil plus grave et plus sombre que d'habitude, il fait une fois encore du Poelvoorde.
Ni plus ni moins.
Et comme en plus, à part Melki, réellement magistral, il n'y a rien à voir du côté des seconds rôles, totalement inexistants (y compris celui de Damiens, oui) on aura compris que l'on a vite fait le tour...

Oh, certes! Il y a là une espèce de mélancolie permanente, une structure en creux pas désagréable. Quelques belles scènes (celle de la casse, par exemple), deux trois bonnes idées, deux trois bonnes répliques, un peu d'humour vaguement salutaire. De l'humanité bon teint...
Mais tout cela est au service d'un ensemble tellement léger, volatil, inexistant presque, que l'on se demande vraiment "à quoi bon".

Ah oui! Et la scène finale est très mignonette.
Presque vraiment émouvante, même, si elle n'était pas légèrement réminiscente de celle du "Goût des Autres"...

Et au final, comme on dit "ceci n'est pas une pipe", "ceci n'est pas un pays" on peut légitimement se poser la question: ceci est-il encore réellement un film?

Oui, sûrement...
Honnête et sincère à défaut d'etre original et culotté.

Mais qui finit par ne donner qu'une seule envie: celle que certains artistes belges se prennent une bonne fois pour toutes les couilles en mains.

Et aient le courage d'aller voir ailleurs.
Plus loin.


Côte: *

mardi 4 décembre 2007



L'Ennemi Intime.

"La Nuit nous appartient" (We Own the Night) de James Gray (USA); avec Joaquin Phoenix, Mark Wahlberg, Eva Mendes, Robert Duvall, Tony Musante...

New-York, années 80. Bobby est le gérant d'une boite de nuit branchée, propriété d'un homme d'affaire russe.
Son frère et son père faisant tous deux partie de la police new-yorkaise, il doit sans cesse cacher sa véritable identité à ses associés. Surtout depuis que son frère, Joseph, a été nommé à la tête de la brigade des stups.
Et que l'influence de la Mafia russe sur le monde de la nuit se fait de plus en plus prégnante...

Eh bé, eh bé, eh bé...

On pourra dire une chose, c'est que 2007 aura été une grande année en matière de films noirs. Qu'une de ces principales caractéristiques aura donc été d'avoir remis au goût du jour le polar seventies bien sombre et bien tragique.
Qu'on en juge plutôt: "Zodiac", "American Gangster", "Les Promesses de l'Ombre" (bien que dans un genre un peu différent) et maintenant ce magnifique "We Own the Night" nouvelle pépite à rajouter à la collection.
Et on va pas s'en plaindre!

Le parcimonieux James Gray, dont le moins que l'on puisse dire c'est qu'il n'est pas vraiment un stakhanoviste, nous offre donc ici son troisième film en treize ans.
Mais quel film!
Une sorte de synthèse de tous les précédents...

D'abord niveau tragédie grecque - et même biblique, allez, n'ayons pas peur des mots - ça se pose un peu là, avec cette parabole du bon et du mauvais fils mâtinée d'une bonne dose de trauma freudien (le rôle pivot du film étant celui du père, magistralement interprété par un Papy Duvall en toute grande forme). Humainement, le film est même presque éprouvant, tant l'affrontement inter-familial qui double la classique guerre entre flics et truands est intense et puissant.

La cerise sur la gâteau étant que, malgré ce sous-texte imposant, le film garde sous le coude suffisament de morceaux de bravoures strictement cinématographiques que pour donner des complexes à toute la vieille garde hollywoodienne, peut-être bien Scorsese compris.
Cinéaste véritablement néo-classique, travaillant à l'économie et surfant magnifiquement sur une espèce de perpétuelle vague de tension, Gray arrive à entrainer le spectateur dans un maëlstrom tant émotionnel qu'esthétique dans lequel sa mise en scène, à la fois sobre et lyrique, arrive à faire mouche presque à tous les coups.
Il y a là des scènes véritablement anthologiques!
Assez même, dans un seul film, que pour peupler l'intégralité de la filmographie de n'importe quel tâcheron lambda.
Ne prenons pour exemples que l'invraisemblable poursuite en bagnoles sous une pluie battante ou la scène finale, dans les hautes herbes et la fumée...

Enfin, tout cela ne serait rien sans l'interprétation extraordinaire d'un Joaquin Phoenix qui habite véritablement son personnage.
La partition qu'il nous joue là (bien aidé par ses partenaires dont un Mark Wahlberg parfaitement sobre et une Eva Mendes très étonnante dans un rôle pour une fois plus écrit que ses habituels emplois de bimbo) est digne des plus grands. Sans rire, rien que ça!
Bref, on l'aura compris à l'heure ou s'approchent les bilans de fin d'années il faudra certainement compter avec ce film dense et émouvant, urgent même, qui clôt brillamment la "trilogie new-yorkaise" entâmée par son auteur.

Et le saluer, lui aussi, comme une des toutes grandes réussite de l'année.

Une seule chose m'inquiète... Est-ce que j'ai dit "Oscars"?


Côte: ***


jeudi 29 novembre 2007



"Londres, cité de putains et de pédés!"*

"Les Promesses de l'Ombre" (Eastern Promises) de David Cronenberg (CAN); avec Viggo Mortensen, Naomi Watts, Vincent Cassel, Armin Müller-Stahl, Sinéad Cusack, Jerzy Skolimowski...

Londres. Après qu'une jeune femme russe soit morte en couche dans son service, Anna, sage-femme opiniâtre, tente de remonter sa piste afin de retrouver la famille du bébé auquel elle a donné naissance.
Le journal intime de la jeune fille la conduit sur la piste de Semyon, paisible propriétaire du restaurant Trans-Siberian.
Sans qu'elle ne se doute que celui-ci est en fait un des chefs locaux de la redoutable Mafia russe....

C'est étonnant de voir à quel point l'oeuvre de Cronenberg s'épure de film en film, jusqu'a devenir accessible, presque linéaire. Mais sans pour autant perdre de sa force ni de sa pertinence...

Poursuivant le travail entâmé avec le précédent "History of Violence" dont il est une sorte de double encore plus sombre, "Les Promesses de l'Ombre" se présente comme une véritable et impitoyable tragédie - russe, grecque ou shaekesparienne, au choix - dont la violence implacable est d'autant plus glaçante que la réalisation se veut, en contrepoint, résolument non-spectaculaire.

A une exception près, peut-être: cette fameuse et invraisemblable scène de baston à poil dans un sauna, chorégraphiée comme une sorte de combat de gladiateurs gays et qui constitue bien sûr le point culminant du film.

En dehors de cela, Cronenberg va à l'essentiel et offre une oeuvre cohérente et limpide, dans laquelle la violence découle logiquement des relations entre des hommes dont les codes, admirablement décortiqués par le cinéaste, les poussent à sombrer dans une sorte de schizophrénie permanente.

Ballets des corps tatoués, valse des trahisons, imbroglio de filiations douteuses... Cet opéra lyrique et froid brasse toutes les obessions de Cronenberg: du fétichisme qu'il entretient envers la chair, les maladies et les mutations à sa passion pour les milieux clos ou la sexualité trouble, tout en les mettant au service d'une partition d'exception, dominée par une direction d'acteurs à proprement parler époustouflante.

Au milieu de ce tumulte d'autant plus soufflant qu'il est toujours maintenu légèrement en dessous de la surface, le canadien fait en effet se téléscoper des personnages dignes du meilleur de la littérature slave.
Le trouble Nicolai (Mortensen, impressionnant), la déterminée Anna (Naomi Watts, très "à sa place"), le dégénéré Kirill (Vincent Cassel, grotesque mais attachant) ou le suave mais très inquiétant Semyon (Armin Müller-Stahl, carrément titanesque) sont autant de pièces dans cette partie d'échecs étoudissante et vénéneuse.

Des pièces qui sont véritablement le coeur et la mécanique du film.

Sur la fin, le polar barbare et curieusement érotisé cède doucement la place à un véritable thriller, de facture beaucoup plus classique, avec des retournements de situations étonnants qui débouchent vers ce qui semble être à première vue une happy-end complètement en porte-à-faux avec le reste du film.

Mais bizarrement on accepte sans broncher ce brusque changement de ton et on se laisse prendre au jeu de ce coda étrange parce que trop commun.
Car l'on se rend bien compte de toute l'ambiguïté que Cronenberg à réussi à insuffler à cette fin trop banale.
Et que l'on comprend que rien, finalement, n'est exactement ce qu'il semble être.
Que rien n'est fini.
Que tout n'a pas été dit.
Que rien n'est simple.
Et que sous ses dehors de série B peut-être vaguement auteurisante, "Les Promesses de l'Ombre" cache sans doute dans ses replis moites et obscurs l'un des meilleurs films de son auteur.

Et surtout un grand film tout court.


Côte: ****


(* ce titre n' a pas grand'chose à voir avec la critique elle-même, c'est juste une citation du film que je voulais absolument placer).

mercredi 28 novembre 2007

Heroes and Icons...



(Jack Nicholson - b. 1937)

mardi 27 novembre 2007



Un Américain bien tranquille...

"American Gangster" de Ridley Scott (USA); avec Denzel Washington, Russell Crowe, Carla Gugino, Josh Brolin, KaDee Strickland, Chiwetel Ejiofor...

New York, début des années 70. Frank Lucas a longtemps vécu dans l'ombre du parrain de Harlem Bumpy Johnson dont il était le garde du corps mais aussi le confident. A la mort de celui-ci, Frank reprend en main les affaires, discrètement mais fermement, s'entourant de ses frères et de ses cousins et s'évertuant à jouer profil bas, très bas...
Grâce à ses connaissances au Vietnam, il organise un collossal trafic d'héroïne entre l'Asie et les Etats-Unis, au nez et à la barbe des autorités et de la Mafia en place.
De son côté, Richie Rogers, flic opiniatre, enquête patiemment sur ce mystérieux marché parallèle jusqu'au jour ou ses recoupements font ressurgir le nom de Franc Lucas...

On vit une époque formidable!

Alors que le cinéma français s'échine avec des fortunes diverses à remettre au goût du jour une certaine production "à l'ancienne" qui au mieux amuse ("L'Heure Zéro") au pire tombe lamentablement à plat ("Le Dernier Gang") les cinéastes américains, de leur côté, réussissent avec bonheur la résurrection d'un cinéma de genre qui avait fait leur fortune et leur gloire dans les années '70.

On avait déjà eu l'occasion de regoûter à la recette vintage du film noir, voire de la véritable saga criminelle avec le copieux (et formidable) "Zodiac".
On avait fait un détour remarqué et remarquable par la case du thriller politico-paranoïaque avec le plaisant "Michael Clayton"... Nous voila donc de retour en terrain balisé mais néanmoins fangeux avec cet "American Gangster" tout aussi roboratif (2h37, plus de cent personnages et cent-cinquante extérieurs) et à la réussite elle aussi affirmée.

Sec, nerveux et racé tout en n'oubliant pas de livrer au spectateur sa part de grand spectacle, le film de Ridley Scott - qui a eu la bonne idée de remiser pour l'occasion au placard les tics de clippeur dont il s'encombre trop souvent - est une sorte de sommet du polar, avec son duel de stars livré sur un plateau , sa mythologie urbaine revisitée et magnifiée et ses digressions âpres, presque documentaires...

La magnifique photo crépusculaire d'Harris Savides permet au réalisateur de limiter ses effets et de dépouiller son film jusqu'à en atteindre la substantifique moëlle.
Le scénario subtil de Steven Zaillian et l'interprétation sobre et habitée de Denzel Washington et Russel Crowe (sans oublier une tablée de seconds rôles au rang desquels il serait impensable de ne pas citer Josh Brolin et Chiwetel Ejiofor) font le reste.

Et du coup le film emballe parce que, malgré son côté parfois un peu didactique, sa figure centrale, ce gangster black au service de sa communauté confronté à un policier roublard dont, par opposition, la vie personnelle est un désastre rejoint au panthéon les grands personnages de l'histoire du cinéma américain. Les Tony Montana ou les Michael Corleone...

Se jouant habilement des références - les contournant même! - et transformant en atout une mise en scène volontairement discrète mais servie par un montage subtil et nerveux, Scott arrive à nous tenir en haleine jusqu'au bout!
Jusqu'a la rencontre finale entre ses deux protagonistes qui jusque là avaient joué un subtil jeu du chat et de la souris.
Pour aboutir à une fin d'autant plus étonnante - et satisfaisante- qu'elle est parait-il rigoureusement authentique.

A la fois sobre et spectaculaire, puissant et rythmé, "American Gangster" confirme avec d'autres le retour d'un cinéma de genre américain comme on les aime et se paye en plus le luxe d'être probablement l'un des meilleurs films de l'année.

Ni plus, ni moins...


Côte: ***

lundi 26 novembre 2007



Conversation secrète...

"L'Homme sans Age" (Youth without Youth); de Francis Ford Coppola (USA) avec Tim Roth, Alexandra Maria Lara, Bruno Ganz, Alexandra Pirici, Marcel Iures, Matt Damon...

Roumanie, 1938. Dominic Mattei, vieux professeur de linguistique en fin de vie est soudainement frappé par la foudre. Miraculeusement rajeuni, ses facultés mentales visiblement décuplées, il s'attèle enfin au parachèvement de ce qu'il considère comme l'oeuvre de sa vie: une recherche sur les origines du langage.

Bon, allez, n'y allons pas par quatre chemins: il est évident que ce qui est intéressant avec "L'Homme sans Age" ce n'est pas tant le film en lui-même que le retour de Coppola parmi les vivants après prèsque dix ans d'absence.

Faut-il pour autant négliger l'oeuvre elle-même et se désintéresser d'un film que le cinéaste lui-même qualifie d' "oeuvre de jeunesse réalisée à 68 ans"?
Non pas.

Car l'objet lui-même, si tordu et curieux soit-il, est particulièrement intriguant de par sa forme, son sujet et son côté à la fois libéré et maladroit.
Par son ambition et son orgueil, aussi.
Car orgueilleux le film l'est, qui essaye de brasser ultra-large des sujets aussi divers que la langue, la mémoire, la culture, les races et l'Amour avec un très grand "A".
Et c'est probablement là l'un de ses plus intéressants points communs avec son auteur, dont le côté mégalomane à failli le perdre plus d'une fois.
Un orgueil d'autant plus étonnant que Coppola crie sur tout les toits en être débarassé, lui qui, du temps d' "Apocalypse Now", ne supportait pas d'être remis en question et gérait ses équipes comme l'on dirige une armée.

Parce que oui, sur le fond, "L'Homme sans Age" est un film qui se prend au sérieux.
Et d'autant plus qu'il s'agit en fait d'un autoportrait dans lequel Coppola retrouve la plupart de ses obsessions.
La métaphore est on ne peut plus évidente: l'homme sans âge c'est lui, tout le monde l'aura compris. Ce n'était d'ailleurs peut-être pas nécéssaire de forcer ainsi le trait...

Le film est tout en excès, quitte à frôler le grotesque mais il reste étonnamment froid et cérébral aussi.
Tant et si bien que l'on se perd corps et biens dans ce tourbillon de langages qui se complexifie d'épisodes en épisodes jusqu'a finalement nous laisser totalement sur le carreau.
Idem pour l'histoire (ou "les histoires") d'amour, d'ailleurs, tellement désincarnée qu'on finit presque par s'en désintéresser.
Et pourtant Dieu sait que l'on comprend la passion qui lie le personnage de Tim Roth à la magnifique et bouleversante Alexandra Maria Lara.

Mais bien sûr, ce sont également ces excès, ces maladresses et ces expérimentations qui font paradoxalement la force et l'intérêt du film.

Ca et la forme, bien entendu.
Car de ce côté-là aussi, Coppola fait son grand retour et prouve à quel point c'est un artiste avec lequel il faut encore compter.
Multipliant les techniques (traditionnel et numérique), les styles (la splendide et étonnante partie "allemande" du film, hommage appuyé à l'expressionnisme) et les points de vues, "L'Homme sans Age" séduit certainement plus par la luxuriance de sa forme que par la cohérence de son propos.

Mais en fin de compte ce qui est le plus important, ce n'est pas tant le film lui-même - qui s'écoute penser et qui s'égare au fur et à mesure qu'il se déroule dans des univers et des propos de plus en plus fumeux - que ce qu'il annonce.
Soit le retour aux affaires d'un des plus grands cinéastes du XXème siècle après trop d'années passées à exécuter des commandes dont il n'était pas digne. Et sa volonté affirmée - et presque touchante - d'aller au bout de ce en quoi il croit.

Et rien que pour ça il mérite d'exister.


Côte: **

lundi 19 novembre 2007



Plum pudding, kouign amann...

"L'Heure Zéro" de Pascal Thomas (F); avec Laura Smet, Melvil Poupaud, Danielle Darrieux, François Morel, Chiara Mastroianni, Alessandra Martines...

Guillaume Neuville a eu l'idée saugrenue de convier son ex-femme pour les vacances à la Pointe-aux-Mouettes, chez sa tante richissime, afin de lui présenter la nouvelle élue de son coeur.
L'atmosphère déjà tendue - voire explosive! - du week-end va carrément tourner à l'hystérie lorsque la vieille tantine est retrouvée morte dans son lit, le crâne fracassé...

Eh bien oui, donc! Comme promis, je l'ai fait!
J'ai poussé encore plus loin la logique de ma semaine "perles du terroir" en allant voir cette "Heure Zéro" que tout désignait comme une franchouillerie de la plus belle eau à peine digne d'un épisode d' "Au Théatre ce Soir"...

Et what a nice, what a pleasant surprise...
Quelle jolie petite friandise que voila.

Bon, oui, j'y suis allé d'une part parce que je garde de bons souvenirs du cinéma de Pascal Thomas du moins tel qu'il le pratiquait dans les années 70/80 et d'autre part parce qu'Agatha Christie, surtout à l'écran, y a rien à faire, j'aime bien...
Aaahh! Les Hercule Poirot avec Peter Ustinov!... "Mort sur le Nil", "Meurtre au Soleil"... Ou même l' "Orient-Express" de Lumet avec Albert Finney et sa moustache gominée...
Les whodunnit, la campagne anglaise...
Oui, bon, ici ça se passe en France...
Mais Thomas à eu le bon goût de situer l'action en Bretagne, ce qui est quand même plus proche de l'ambiance british chère à Agatha que la Savoie de "Mon Petit Doigt m'a Dit" son précédent effort du genre...

Pour le reste...

Alors oui, c'est sûr, c'est surrané...

C'est plan-plan...

C'est filmé comme un téléfilm de luxe!

Mais l'intrigue est captivante et tout le côté fou-fou et attachant du cinéma de Pascal Thomas est là pour qu'on ne s'ennuie pas, que du contraire: Danielle Darrieux (bientôt 100 ans, mazette!) fume de l'opium, François Morel chante des petites comptines à base de Miss Marple et Columbo, un orchestre joue sur la falaise, on entend une chanson en chinois et tout le monde surjoue!
En particulier Melvil Poupaud et Laura Smet, absolument hallucinante dans un contre-emploi de femme fatale vulgaire et hystérique!

Mais on se laisse prendre au jeu!
Après tout, tout cela ne mange pas de pain même si on aura commencé à l'oublier dès qu'on aura fait trois pas en dehors de la salle de cinéma...

Ah! Et puis basta! De toute façon, on se sera fait plaisir avec cette pâtisserie de grand-mère, traversée d'éclairs de bizarrerie, somme toute assez "Vieille France" mais qui finit par être agréable et rassurante comme un souvenir de parties de Cluedo et de dimanches après-midi...



Côte: **

(A noter qu'après cet intermède spécial Jacques Martin on revient bientôt à des choses plus sérieuses avec "L'Homme sans Age" - le retour du Gros Coppola - et surtout "American Gangster"!)

jeudi 8 novembre 2007



Faites entrer l'accusé!

"Le Dernier Gang" d'Ariel Zeitoun (F); avec Vincent Elbaz, Clémence Poésy, Sami Bouajila, Gilles Lellouche, Pascal Elbé, Michel Boujenah...

Librement inspiré de l'histoire du fameux "Gang des Postiches", le parcours de Simon et de sa bande, des petits larcins commis à Belleville jusqu'aux braquages surmédiatisés avec prise d'otages à la clef...

Ouais, ouais, ouais, ouais, ouais...

Evidemment, vous me direz, je n'ai que ce que je mérite.
Quelle idée aussi d'aller voir un truc pareil!
C'est vrai.
Ariel Zeitoun et sa filmographie fleurant bon le jardin potager, ça aurait déjà du être suffisant pour me mettre la puce à l'oreille. Voir me faire sentir l'oignon.
C'est vrai aussi.
On le voyait venir de loin avec ses gros sabots, ce film qui brandit bien haut son label AOC "inspiré d'une histoire vraie" et ressemble à l'arrivée à une fausse-couche télévisuelle à la Christophe Hondelatte (d'ou le titre, oui).

Mais quand même...

Quand même...

Moi, les polars du dimanche soir, j'aime encore bien.
"Faites entrer l'accusé", justement, avec son ambiance anxiogène pour ménagère de beaucoup moins de cinquante ans (sinon, à cette heure là elles sont déjà couchées) je suis assez fan, je l'avoue.
Même pas une casserole, juste un plaisir coupable.
Alors, dans cette vague "retour au cinéma de papa" (cfr."Le Deuxième Souffle") il me paraissait bien, ce "Gang", avec son histoire vraie triturée à l'ancienne, son joli casting et sa mise en scène plan-plan pas trop fatiguante.

Mais bon, allez quoi, il aurait quand même fallu un peu se retirer les doigts du cul pour arriver à quelque chose, non?
Parce que là... Là, vraiment...
Et encore, le pire c'est qu'on voit qu'ils ont essayés, tous!
On la sent bien, la motivation, l'envie même...
On la capte bien, la bonne ambiance, franche et décomplexée, qui a du régner sur le tournage.
Alors pourquoi? Pourquoi, malgré tout, tout cela a-t-il tourné en eau de boudin?

D'abord parce que "ambiance franche et décomplexée" je veux bien mais de là à ne vraiment pas en branler une niveau mise en scène faut quand même pas pousser!
Sérieux, c'est filmé comme un téléfilm du service public!
Y a pas de souffle, y a pas d'envergure, y a rien!
Une ou deux scènes à sauver peut-être, comme le passage à tabac de Vincent Elbaz, étonnant au milieu d'une oeuvre aussi globalement amorphe.
Mais, allez, ça ne fait pas un film.

Ensuite parce que le cinéma de papa et les valeurs de jadis ça va cinq minutes mais, inspiré d'une histoire vraie ou pas, ce film-ci avec son petit couplet poussiéreux sur les bandits au grand coeur, les brigands old school et leur code d'honneur et les braves filles qui tombent amoureuses des voyoux flamboyants on a déjà donné et largement, merci.
Passons à autre chose. Par pitié!
D'abord c'est du déjà vu, ensuite on y croit pas une seconde, c'est tout.
On est plus au temps des "Dossiers de l'Ecran" ou de Catherine Langeais! C'est fini, "La Séquence du Téléspectateur"!

Enfin, parce que "joli casting", oui, mais encore aurait-il fallu qu'il fonctionne.
Oui, bon, allez, Elbaz est pas mal, d'accord. mais à part ça?
A part ça, eh bien Clémence Poésy est charmante avec son air de sortir d'un Scopitone de Françoise Hardy mais elle a une autre expression, à part celle du lapin pris dans les phares?
L'excellent Gilles Lellouche est sous-exploité quand on ne le ridiculise pas carrément à grands coups de barbes postiches (vous me direz, c'est de circonstance) et de déguisements à la con.
Et Michel Boujenah traverse lefilm en ayant l'air de se demander ce qu'il fout là. Nous aussi, notez.
Reste peut-être Sami Bouajila, pas mal même si on a du mal à le calculer en gangster. Mais bon... C'est maigre! Plus que maigre... Comme l'ensemble du film.

Voilà donc un pâle brol loupé sur lequel on pourra peut-être se contenter de zapper, d'ici quelques mois, quand il passera un dimanche sur TF1 en deuxième partie de soirée.

A part ça... Circulez, y a pas grand' chose à voir.


PS: mais on continue à sombrer dans les tréfonds du cinéma de terroir. Prochainement ici, croyez-le ou non, "L'Heure Zéro" de Pascal Thomas, d'après Agatha Christie! Minga! Rien ne vous sera épargné!


Côte: * (pour Elbaz et une ou deux scènes et, oui, ici aussi c'est bien payé)

mardi 6 novembre 2007




Code Name: The Cleaner.

"Michael Clayton" de Tony Gilroy (USA); avec George Clooney, Tilda Swinton, Tom Wilkinson, Sidney Pollack, Douglas McGrath, Michael O'Keefe...

Michael Clayon est avocat dans l'un des plus grands cabinets juridiques new-yorkais. C'est un homme de l'ombre, régulièrement chargé de faire le ménage derrière ses petits camarades. Après le pétage de plomb spectaculaire de l'un de ses collègues on lui confie le dossier d'une puissante multinationale spécialisée dans l'agrochimie...

L'administration Bush aura-t-elle au moins eu ceci de positif qu'elle aurait poussé Hollywood à renouer avec sa veine politico-sociale, celle qui fit les beaux jours d'un certain cinéma dans les années '70?

On peut le penser à la vision de ce "Michael Clayton" à l'intrigue délicieusement alambiquée qui nous emmène fouiller dans les placards peu reluisants des grandes firmes d'avocats et ceux, plus putrides encores, des multinationales et du business de l'agrochimie.

Bien sûr, même si le scénario est un peu embrouillé, Tony Gilroy reste plutôt à la surface des choses, cinéma américain oblige. Mais on se laisse facilement prendre au jeu de ce film noir post-moderne à la paranoïa savamment distillée par une mise en scène en flash backs, fragmentée et kaléïdoscopique.

La mise en image est sobre et efficace, rendue plus tendue encore par une lumière extrèmement froide et est toute entière construite autour d'un George Clooney omniprésent, qui met tout son charisme et son dynamisme naturels au service de l'histoire.
Les seconds rôles sont au diapason, de Sidney Pollack - véritable "caution historique" du film - à Tilda Swinton et Tom Wilkinson qui déballent tout deux un grand numéro...

Pas révolutionnaire, non, mais faisant preuve d'une maitrise et d'un savoir-faire exemplaire, le premier film du scénariste Tony Gilroy (la saga Jason Bourne) est donc un solide exercice à l'ancienne, rendant bien l'ambiance un peu dépressive d'un milieu somme toute peu photogénique (celui des avocats d'affaire) plus qu'il ne dénonce réellement la catastrophe écologique qui, en filigrane, est montrée du doigt.

On regrettera néanmoins l'épilogue qui, bien qu'extrèmement efficace et jouissif, est un peu trop téléphoné alors que le "rebondissement" final laissait entrevoir un dénouement beaucoup plus subtil et étonnant, sorte de déclinaison de celui du "Profession: Reporter" d'Antonioni...

Reste qu'après avoir fait ses preuves en tant que scénariste, monsieur Tony Gilroy nous présente une bien belle carte de visite et nous laisse à penser qu'il sera probablement un cinéaste à suivre de près...


Côte: ***

jeudi 1 novembre 2007



Orient Express.

"Le Deuxième Souffle" d'Alain Corneau (F); avec Daniel Auteuil, Monica Bellucci, Michel Blanc, Jacques Dutronc, Gilbert Melki, Eric Cantona...

Paris, années 60. Gu Minda, célèbre ponte du Milieu s'évade de Centrale. Pour pouvoir fuir en Italie en compagnie de Manouche, la femme qu'il aime, il accepte de participer à un dernier coup...

La question qu'on se pose évidemment à la vision de cet upgrade du "Deuxième Souffle" de Melville, prétendument plus fidèle au roman d'origine de José Giovanni (que je n'ai pas lu) c'est "à quoi bon?".
Ou plutôt: "était-ce bien nécéssaire".

Tout n'avait-il pas en effet été dit - et bien dit - dans l'original?

Mais bien vite on comprend ce qui a motivé Corneau (autre spécialiste du polar "à la française". Souvenez-vous de "Série Noire", entre autres) dans cette redite.
Car c'est facile d'y voir une espèce de challenge...
Une tentative de relecture et, au-delà de l'exercice de style, une proposition de cinéma originale et excitante.
Même si loin d'être aboutie.

Le cinéaste propose en effet une tentative de redynamisation du cinéma de papa - ou du moins d'un certain style de cinéma populaire gorgé de stars - en y insufflant des éléments issus du cinéma asiatique moderne, réputé dernier spécialiste en matière de "film noir".
Un cinéma chromo, marqué "qualité française", avec son décorum sixties de carte postale mais boosté par ces apports extérieurs que sont l'usage des couleurs et des lumières à la Wong Kar-Wai, les ralentis et accélérés à la Johnny To ou encore ces brèves explosions de violence chères à Kitano.
Le cinéma du dimanche réinventé extrème oriental...
Gabin et Ventura façon saké et Nuoc-Mâm...

Mais le problème c'est que ça ne marche qu'a moitié...
Tout cela fait trop toc, trop carton-pâte et, d'une certaine manière, trop kitsch que pour ne pas laisser perplexe.
Enfin... En tout cas en partie...

Le casting ne fonctionne pas trop mal, ce qui est déjà une demi-réussite quand on voit à quel point il pioche dans des univers et des "familles" différents, du Splendid Michel Blanc au footeux Cantona (qui joue comme une planche mais bon, c'est pas comme si Michel Constantin était Laurence Olivier non plus) en passant par Dutronc ou la jeune pousse Duvauchelle...

Malheureusement, c'est là où c'est essentiel que ça coince: Auteuil n'aura jamais les épaules assez larges que pour faire oublier Ventura (il est même fort peu crédible en truand quasi légendaire) et Bellucci est, comme toujours, à côté de la plaque.

Les longues plages de dialogues qui lorgnent fortement vers Audiard tombent le plus souvent à plat et sonnent trop théatrales, trop ampoulées que pour réellement fonctionner.
Et l'intrigue, pourtant savoureusement alambiquée - à l'ancienne - souffre de tous ces excès, de tout ce trop plein et finit par se distendre, jusqu'à transformer le milieu du film, par ailleurs beaucoup trop long, en un embarassant ventre mou.

Quant au final, à la limite du grotesque, mieux vaut ne rien en dire...

Bref, voilà un film qu'on aurait voulu aimer et qui, d'ailleurs, réserve quand même sa part de bons moments mais qui, malgré l'honnêteté affichée de ses intentions, ne parvient jamais à assurer ce qu'il faut pour ne serait-ce que venir à bout de son ambitieux - et épuisant - cahier des charges.

Et c'est dommage...

Trois fois dommage...



Côte: ** (pour le casting et les efforts de mise en scène mais c'est large).

mardi 30 octobre 2007

Heroes and Icons...




(Clint Eastwood - b. 1930)


Go-Go Cherry, Go, Go, Go!

"Planète Terreur" (Planet Terror) de Robert Rodriguez (USA); avec Rose McGowan, Freddy Rodriguez, Marley Shelton, Bruce Willis, Josh Brolin, Naveen Andrews...

Dans une petite ville des Etats-Unis, une mystérieuse épidémie transforme la population en zombies. La strip-teaseuse Cherry Darling, son ex-petit ami El Wray et le docteur Dakota Block organisent la résistance...

Wham! Bam! Thank you ma'am!

Et vlan!
Alors que nous sommes attaqués par les frimas saisonniers, voila que débarque sans crier gare le second volet du fameux "GrindHouse", hommage au double-features de leur enfance ordonné par Rodriguez et Tarantino et charcuté par les toujours aimables frères Weinstein (maudits!).

Première bonne nouvelle: une des fameuses fausses bandes-annonces qui faisaient en partie l'intérêt du projet, "Machete" avec le toujours très jovial Danny Trejo, est fournie avec cette deuxième livraison!
Pour les autres (dont le fameux "Werewolf Woman of the S.S." réalisé par Rob Zombie avec Nicolas Cage en Fu-Manchu!) il faudra probablement attendre la sortie en DVD.
Et encore...

Deuxième bonne nouvelle, alors que cette deuxième partie bénéficie d'une sortie qu'on pourrait presque qualifier de "technique" (la partie tarantinienne ayant par contre été carrément présentée à Cannes, en compète!) elle n'est pas pour autant en reste du point de vue schboïnks et autres yiiiihaaaa !!! (si je peux m'exprimer ainsi).

Bon, c'est vrai, fasciné qu'il était visiblement par son objet filmique et son côté quasiment fétichiste, Robert Rodriguez à carrément oublié d'écrire un scénario.
Mais vous savez quoi??? On s'en fout!!!

Parce qu'une fois que les personnages sont présentés et l'ambiance mise en place, vrrrroooooooooaaaaar; kaboum!, bang bang!, c'est parti et bien parti!!!

Gore crapoteux, explosions en tous genres, pétarades, bagnoles et motos vintage, bombasses hyper-carossées (l'ex Madame Marilyn Manson, Rose McGowan en tête), rock'n'roll, zombies, démembrements sauvages, dialogues de kermesse et humour à la truelle, tout y est!
Et tout est servi, comme dans "Death Proof" - plus encore que dans "Death Proof", d'ailleurs! - par une mise en scène gadget purement jouissive: image qui saute, qui bave, pellicule grifée ou qui s'embrasse, chipotages sonores etc.. C'est bien simple: que du bonheur!

Alors oui, c'est con, c'est même très con!
C'est complètement branque et invraisemblable (Rose McGowan a une mitraillette à la place d'une jambe, ah ah! Oui mais: comment elle tire???). C'est too much et totalement boursouflé et ça ne va nulle part, sauf peut-être dans le mur!
Mais ça y va tellement vite et de manière tellement tarazimboumante qu'on ne peut pas s'empêcher d'adhérer.

L'ambiance reconstitue quasiment à la perfection celle des nanars horrifiques dont on se régalait dans les années '80 avec son invraisemblable défilé de tronches (Michael Biehn, Jeff Fahey et même Bruce Willis qui s'amuse à s'autoparodier en reprenant son personnage de "Couvre-Feu"*). Et même la musique - qui cite largement John Carpenter - y participe!

Donc voila, encore une fois que dire?
Que dalle!
Sinon que Tarantino et Rodriguez ont complètement réussi leur pari: réssuciter un certain cinéma de genre en y insufflant toute leur énergie, leur esprit potache et leur démesure.

Et franchement, qu'ils en soient remerciés!


Côte: ***


PS: à noter que la fameuse scène "de l'hélicoptère" vue dans "28 Semaines plus tard" est totalement rejouée ici. Qui a pillé qui? Mystère!


* il y a même Fergie des Black Eyed Peas, c'est dire!


lundi 29 octobre 2007




Teenage Kicks.

"Paranoid Park" de Gus Van Sant (USA); avec Gabe Nevins, Taylor Momsen, Jake Miller, Lauren McKinney, Daniel Liu, Grace Carter...

Le jeune Alex, skateur, tue accidentellement un agent de sécurité aux alentours de Paranoid Park, skate-park malfamé de la banlieue de Portland...

On pourait facilement se débarasser de ce nouvel opus de Gus Van Sant en le taxant pûrement et simplement d' "Elephant 2"...
Mais, si il est vrai que le réalisateur creuse ici le même - beau - sillon, ce serait jeter bien vite le bébé avec l'eau du bain...

Bien sûr, les filiations thématiques - l'adolescence et ses codes confrontés à l'indifférence, voire l'hostilité, du reste du monde - autant que stylistiques - même insistance sur les détails, même façon de filmer les corps (souvent de dos), même sens du cadre et de la photo (automnale et mélancolique), pourraient faire pencher la balance en ce sens.

Mais s'il existe une différence de taille entre ce film et les deux premiers tomes de la trilogie qu'il semble clore ("Elephant", donc, mais aussi le moins réussi "Last Days") c'est au niveau du récit qu'elle se situe.
Cette mascarade d'enquête policière cool et zen, habilement déstructurée, sert de colonne vertébrale au film autant qu'elle fait avancer le jeune héros, sorte de Raskolnikov grunge*, sur le terrain de la culpabilité et de responsabilité individuelle.
Le spectateur, confronté à cette énigme bizarrement fragmentée, toute en courbes et en ellipses comme une piste de skate, est obligé de la reconstituer avec ce qu'on lui donne, suivant en cela le cheminement interne du jeune Alex et ses divers atermoiements.

Bien entendu, comme toujours chez Van Sant, cette histoire, intriguante soit-elle, ne serait rien sans la mise en scène, magistrale!
La photo de Christopher Doyle, une fois encore, fait des merveilles surtout quand, comme ici, elle est associée à de véritables paysages sonores qui ponctuent le film à chaque moment fort.

Mais, s'il envoute par son rythme faussement détaché et sa poésie languide, "Paranoid Park" pêche aussi malheureusement - et un peu trop souvent - par excès de pose.
Le tout a un côté arty un peu trop systématique que pour être honnête. Avouons-le.

Et chaque médaille à son revers...

Le mise en scène est sublime mais se complait trop dans la redondance et le contemplatif, prétant ainsi l'échine aux accusations d'autocitation qu'elle semblait par ailleurs vouloir éviter.
Le travail sur le son est impressionnant mais un peu trop branchouilleux que pour emporter entièrement l'adhésion.
Et Gus Van Sant perd un peu trop son temps à s'abimer en contemplation devant le - très beau - visage de son jeune acteur non professionnel (Gabe Nevins, recruté via MySpace pour ceux qui n'auraient pas encore entendu l'anecdote) que pour ne pas lasser.
Et puis le côté fluide et étrangement paisible de la mise en place d'un film comme "Elephant" (encore) fait trop souvent place ici à un manque de rythme mal venu.

En résumé, il faut bien le dire: "Paranoid Park" est un splendide objet qui provoque un très agréable vertige mais qui, faute d'assez se concentrer sur son récit et en se complaisant trop dans une satisfaction d'artiste intelligent mais gâté ne finit que par provoquer une seule et unique réaction: "Oui mais... A quoi bon?"



Côte: **


(* Oooouuhhh, comment je m'la pête!)

lundi 22 octobre 2007



Du vent dans les branches de sassafras...

"L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford" (The Assassination of Jesse James by the coward Robert Ford) d'Andrew Dominik (USA); avec Brad Pitt, Casey Affleck, Sam Rockwell, Mary-Louise Parker, Sam Shepard, Zooey Deschanels...

Les derniers jours du "brigand bien-aimé" jusqu'à son assassinat par le jeune Robert Ford, membre de son propre gang.

Oui, parce qu'évidemment avec un titre pareil c'est un peu difficile de ne pas dire d'emblée comment ça se termine.

Enfin...

Dans le même ordre d'idées - et pour nous débarasser une bonne fois pour toute d'une autre tarte à la crème stylistique - versons ici une larme sur la cohorte de critiques (de Libé à l'inénarrable Nicolas Crousse on avouera que le spectre est large) qui ont eu le courage et l'originalité d'ouvrir leurs papiers sur les premières lignes du "Bonnie and Clyde" de Gainsbourg (que je ne vous ferais pas l'affront de retranscrire ici, merci, on a déjà donné).
Bravo les gars, vous ne manquez pas de personnalité, c'est sûr!

Mais trève de taquinerie primesautière et de lieux communs fâtigués, posons nous la seule et vraie bonne question: mais, Bon Dieu, par quel bout doit-on prendre le western-mammouth d'Andrew Dominik?

Car s'il y a bien une qualité que l'on ne peut enlever à ce film, c'est bien celle d'être en accord avec son titre-fleuve: c'est un vrai monolithe!
Un colosse, un monstre...
Une montagne!

Pas tant par sa longueur (quoi que... 2h40 c'est quand même pas mal, même s'il faut admettre que l'on a vu plus gigantesque en la matière) que par sa forme et son contenu...

S'il y a un premier choc (le film en ménage plusieurs), c'est au niveau visuel qu'il se conçoit...
Une véritable épopée crépusculaire, magnifiée par une photo à couper le souffle!
Des cadres au cordeau, des décors sublimes, une reconstitution d'époque minutieuse, une volonté de "vérisme" étonnante (d'un point de vue strictement visuel on peut dire qu'on est loin, très loin de John Ford ou de Lucky Luke. Arf!), un travail de titan au niveau de la direction artistique, le tout au service d'un sens de la mise en scène pour le moins étonnant de la part d'un réalisateur dont c'est seulement le deuxième film (le premier, le toujours inédit "Chopper", étant qui plus est beaucoup plus tapageur au niveau formel).
Bien entendu, certains tics pourront passer pour du maniérisme (on se serait bien passé des redondants mouvements de nuages à la Coppola, par exemple) mais l'ensemble reste quand même terriblement cohérent et donne au film un souffle et un lyrisme véritablement unique.

De ce point de vue, la nature, traitée comme un personnage à part entière, est un élément important de la réussite du film.
Même si la façon dont elle est filmée donne lieu à des plans quasi miraculeux plastiquement parlant, son utilisation en contrepoint de la folie humaine qui l'habite est avant tout primordiale dans la façon dont elle fait avancer l'histoire.
Il est évidemment difficile de ne pas faire ici référence à Malick, tant ce "...Jesse James..." qui ferait passer "Jeremiah Johnson" pour un remake de "Mad Max" semble renvoyer à sa "Ligne Rouge" dans sa manière de transcender un genre par le biais d'une observation quasi naturaliste du décor environnant.

Et la seconde surprise est bien entendu narrative.
Lent, majestueux, complexe, sinueux, le film déroule calmement ses différentes couches de narration, se permettant au passage ce qui semble d'abord être d'inutiles digressions pour mieux, finalement, toujours se retrouver, toujours retomber sur ses pattes.
Et ce, en plus, sans jamais nous perdre en cours de route.
L'histoire semble de prime abord alambiquée et décousue mais la manière dont elle est racontée la rend paradoxalement extrèmement fluide.
Même si, finalement, l'action est peu présente et si Dominik prend tout son temps pour installer son intrigue et développer ses personnages, on n'en perd pas une miette et ces 160 minutes semblent passer en un clin d'oeil.
Tant est si bien qu'on est presque frustré lorsque l'on arrive au bout de cette étrange mais palpitante tragédie shakespearienne et bucolique.

Pour le reste, on peut dire que Brad Pitt trouve sans doute ici le rôle de sa vie et campe un Jesse James ambigu, tour à tour paranoïaque et charmeur, pouvant se perdre dans d'effrayants éclats de folie, parlant de lui à la troisième personne...
Un bandit à la fois père - et mari - attentionné mais aussi tueur implacable, éliminant froidement ceux qui menacent de le trahir.
Un homme dont le plus étonnant et révélateur trait de personnalité était sans doute de pouvoir aussi facilement se cacher en plein jour, se fondre dans la masse, côtoyer quotidiennement ceux-là même qui le poursuivaient et rêvaient de le supprimer...

A ses côtés, Casey Affleck et Sam Rockwell composent des frères Ford extraordinaires!
Le premier jouant formidablement de son visage lunaire, de son allure juvénile et de son regard fuyant pour faire transparaitre tout le dualisme du "lâche" Robert, à la fois admirateur éperdu et traitre implacable.
Le second jouant un Charley à la limite de la débilité mais toujours prêt à aller jusqu'au bout de lui-même.
Jusqu'au bout de ce maëlstrom de violence et de schizophrénie.
Jusqu'au fond du gouffre où l'entrainent Jesse James et son futur assassin.

La relation entre les trois hommes formant bien entendu le coeur à la fois palpitant et froid de cette sombre pépite.

Et comme je ne veux pas être en reste et en même temps me montrer fidèle à la légende dans laquelle un seul d'entre eux est finalement parvenu à entrer, je citerais un autre texte "classique", tel qu'il est interpreté ici par un Nick Cave très en verve (et co-auteur de la très belle B.O. du film): "Now Jesse had a wife Lived a lady all her life And children they were brave But history does recordThat Bob and Charlie Ford Have laid poor Jesse in his grave".

Comme quoi, moi aussi je connais de belles chansons...


Côte:****

mercredi 17 octobre 2007




L'enfance cachée...

"Un Secret" de Claude Miller (F); avec Cécile de France, Patrick Bruel, Ludivine Sagnier, Mathieu Amalric, Julie Depardieu, Yves Verhoeven...

L'exploration d'un lourd secret de famille à travers l'histoire de François, enfant chétif et solitaire qui s'invente un frère et imagine le passé de ses parents.
Jusqu'à ce qu'une amie de la famille lui révèle toute la vérité sur ceux-ci.
Une vérité qui trouve sa source dans l'une des périodes les plus sombres de l'Histoire.

Claude Miller est un cinéaste sympathique mais franchement inégal.
Capable de chefs-d'oeuvre tels que "Garde à Vue", qui valût à Serrault son deuxième César ou d'oeuvres atypiques comme "La Classe de Neige", curieux mélange de film initatique, de psychanalyse et d'horreur, on l'avait laissé en petite forme avec sa tentative d'adaptation moderne et poussive de "La Mouette" de Tchekhov ("La Petite Lili").

C'est donc avec d'autant plus de plaisir qu'on se frotte à ce "Secret" brillant et gorgé d'émotions.

Le parti pris, culloté, du réalisateur est de nous présenter la petite histoire comme prenant le pas sur la Grande.
La guerre n'est ici finalement qu'une sorte de bruit de fond, de grondement de tonnerre lointain. Jamais rien ne nous sera montré directement, c'est même à peine si l'on va entrevoir un soldat allemand.
Les conséquences du drame n'en sauront que plus monstrueuses, les décisions prises par les protagonistes plus terribles, les révélations plus implacables.

On pourra reprocher à Miller de pécher par excès de classicisme, par manque d'audace...
Ou, au contraire, louer la solide sobriété de sa mise en scène...
C'est vrai qu'on l'a connu plus inspiré d'un point de vue strictement formel.
Le film, construit sur des allers-retours entre différentes époques gigognes se perd un peu dans sa propre narration.
Et puis, c'est certain, l'alternance couleur/noir et blanc n'est pas ce que l'on a trouvé de plus original pour évoquer le passage des ans.
C'est vrai encore que la période contemporaine, avec ses acteur grimés, n'est pas la plus réussie, malgré la présence du toujours excellent Mathieu Amalric.
Et que l'on peut aussi reprocher à l'auteur la lourdeur de certaines métaphores, comme celle du chien (on n'en dira pas plus) ainsi que l'inutile sursignifiance de son épilogue.

On peut se laisser aller à dire tout celà, c'est vrai.

Mais on est aussi obligé de reconnaitre la force du souffle romanesque qui traverse le film.
Ainsi que celle des questions qu'il pose, tant sur la mémoire, personnelle ou collective, que sur l'importance de la famille.
Sur l'identité, aussi, et sur la remise en question de celle-ci, mise à mal par la culture, la religion, les conventions, les choix que la vie nous pousse à faire.

On est du coup soufflé par la force des silences et des non dits et d'autant plus bouleversé par les décisions que certains personnages doivent prendre.
Le monde semble tellement paisible, pour paraphraser Deville, que quand le malheur frappe - et il frappe plus d'une fois - on se retrouve, comme les personnages, totalement paralysé par son absurdité et sa violence.
A ce titre, dans la seconde partie du film, certaines scènes dont on ne dira rien de peur de trop en dévoiler sont véritablement magnifiques. A la fois de folie, de sensualité et de passion contenue.

Evidemment, Miller est ici fortement aidé dans sa tâche par un casting glamourissime et des acteurs qui balayent tout sur leur passage.
Cécile de France, d'abord, qui porte le film sur ses frêles mais ravissantes épaules.
A la fois victime et bourreau malgré elle, elle n'a jamais été aussi belle, sensible et rayonnante (eh ben! voilà que je m'énerve tout seul maintenant!).
Bruel, plus étonnamment, ensuite, qui nous offre une prestation très sobre, presque à contre-emploi, même s'il ne peux pas s'empêcher de nous faire une fois ou l'autre le coup des yeux de cocker.
Et les seconds rôles, enfin, tous parfaits, de Yves Verhoeven génial en beau frère rigolo qui essaie de désamorcer par l'humour des situations potentiellement plombées par la sinistrose à la décidément formidable Julie Depardieu.
Sans oublier Ludivine Sagnier, bien sûr, dans un rôle pivot et particulièrement ingrât.

A l'arrivée, un film ambitieux et exigeant, à la fois classique et audacieux.
Une fresque populaire tout autant qu'un drame intimiste, dont la force émotionnelle, denrée finalement assez rare dans le cinéma français contemporain, finit par tout emporter.

Beau et sensible, quoi.

Et ça, ça fait aussi du bien, de temps en temps...

Côte: ***

lundi 15 octobre 2007




Chambre à part.

"Chambre 1408" (1408) de Mikaël Hafstrom (USA); avec John Cusack; Mary McCormack, Samuel L. Jackson, Jasmine Jessica Anthony, Tony Shalhoub...

Mike Enslin est un écrivain spécialisé dans les histoires de fantômes. Mais c'est avant tout un sceptique. Et les nombreuses heures passées dans des endroits soi-disants hantés n'ont fait que le conforter dans ses doutes.
Alors qu'il est en pleine préparation de son nouvel ouvrage, Mike reçoit une carte-postale l'enjoignant de se méfier d'une certaine chambre 1408, au Dolphin Hotel, à New-York.
Piqué au vif et malgré les mises en garde répétées du directeur de l'endroit, Mike Enslin décide d'y passer une nuit...

Et boum!
Voilà donc la 1408ème adaptation - au bas mot! - d'un texte de Stephen King au cinéma!
Et Dieu sait si lesdites adaptations ont connu jusqu'ici des fortunes diverses, allant du meilleur ("Dead Zone", "Carrie", "Shining", "Stand By Me"...) au franchement médiocre (une kyrielle de "direct-to-video" dont les titres m'échappent).
Avec malheureusement un penchant assez affirmé pour la seconde catégorie, en général...

Qu'en est-il donc de celui-ci?
Une pierre supplémentaire à l'édifice du "prêt-à-manger" horrifique qu'est tout doucement devenue l'oeuvre du King, du moins sur grand écran?
Ou bien avons-nous droit pour une fois à une oeuvrette sortant quelque peu des sentiers battus et rebattus de l' "horreur domestique" auxquels nous avait ces derniers temps habitué le "Maître"?

Eh bien, aussi étonnant que celà puisse paraitre à la lecture de la fiche technique (Hafstrom, réalisateur du très oubliable "Dérapage" avec Clive Owen et Jennifer Aniston en femme fatale (!) ne semblait pas le mieux armé pour se cogner à l'univers ultra-codé de l' auteur. D'autant que les fans dudit auteur allaient plus que vraisemblablement l'attendre au détour) la balance penche ici du bon côté.

Pourtant c'était pas gagné d'avance, avec une unité de temps et de lieu quasiment unique, un seul acteur à l'écran pendant la majeure partie du film et des thèmes pas vraiment originaux, tant au niveau du genre horrifique en général que de celui de Stephen King en particulier.

Mais voilà, pour des raisons aussi diverses que variées, la sauce prend et on se retrouve au final devant un solide film de fantômes à l'ancienne.
Dans le bon sens du terme.

Oh, c'est sûr, ce n'est pas un chef d'oeuvre, faut pas pousser non plus.
Le film à ses faiblesses, bien entendu.
A chercher essentiellement du côté des baisses de rythme et d'un montage paresseux (l'un va rarement sans l'autre) d'ailleurs...
Bien sûr, bien sûr, hôtel hanté oblige on pense à "Shining", d'autant que biens d'autres obsessions "kinguiennes" se retrouvent à l'écran: le trauma familial, le héros-écrivain en proie au doute, la perte d'un enfant, etc.
Jusque dans les plus petits détails, comme cette cigarette-fétiche qui renvoie directement à "Misery"...
Et puis ce n'est pas tout, il y a du "Silent Hill", aussi, au détour de certaines situations...
Entre autres choses...

Mais, malgré le côté solidement classique de la mise en scène, on y croit.
D'abord grâce à l'originalité du scénario et de son traitement, qui ménagent suffisament de rebondissements, de twists et de retournements de situations que pour garder le spectateur rivé à son fauteuil jusqu'à la toute, toute fin.
Quoi de plus agréable, en effet que de se persuader dès la troisième bobine qu'on a complètement éventé l'intrigue pour finalement se retrouver cueilli, pris par surprise quand le dénouement arrive?

Ensuite grâce à la direction artistique, splendide (la scène de la corniche et celle de la chambre enneigée sont à tomber par terre) et aux effets spéciaux, eux aussi old school, simples mais efficaces (même si certains, comme les apparitions des précédentes victimes de la chambre, tombent un peu à plat).

Enfin - et on pourrait presque écrire "bien entendu" - grâce à la prestation sans faille de John Cusack!
Présent dans presque toutes les scènes, le comédien réalise un véritable tour de force en passant du cynisme glacé au désespoir le plus profond, de la trouille noire à l'émotion pure avec une facilité d'autant plus étonnante qu'il joue la plupart du temps sans aucun partenaire.

Et puis - et c'est finalement ça le plus important - toute ces choses et bien d'autres encore finissent par se mettre en place pour provoquer la seule et unique chose que l'on cherche en allant voir un film pareil: la pétoche!

Pas qu'on tremble ou que l'on fasse dans son pantalon, non, on n'en est plus là (surtout moi après toutes ces années de Bifff, allez!).
Mais on se retrouve quand même très agréablement mal à l'aise à la vision de cette petite série B certes pas révolutionnaire, non, mais en tout cas bien chouette à voir.

Au point que celà donne presque envie de se relire un bon vieux Stephen King!

Et ça, après tout, c'est bien le principal...


Côte: **