lundi 5 octobre 2009


Chaos Reigns !

"Antichrist" de Lars von Trier (DK); avec Willem Dafoe, Charlotte Gainsbourg...

Un couple en deuil se réfugie dans un un châlet perdu en forêt afin d'essayer de dépasser le traumatisme et de recoller les morceaux. Mais bientôt la nature reprend ses droits, des événements étranges se succèdent... Et tout s'emballe...

Chaos reigns, chaos reigns !

Oui...

Et c'est rien de le dire, misère de misère au Royaume du Danemark !

Parce qu'enfin: qu'est-ce que c'est que ce truc ?

Pour le moins un curieux objet filmique, tenez.
Qui, au-delà du côté intrigant et presque politique de son titre (quoi que...) et du micro-scandale (allez, disons plutôt "brouhaha") qu'il a pu provoquer lors d'un récent Festival qui pourtant en a vu d'autres, tant en matière de sexe que de violence voire même de provoc gratuite (et "Antichrist" c'est un peu tout cela à la fois, oui), à le mérite de donner du grain à moudre aussi bien aux partisans qu'aux détracteurs du danois en kilt.

Et même plus: aux tenants d'un cinéma-divertissement comme à ceux d'un cinéma art-brut.

Et même plus - encore ! - si on y pense...

Mais, non, baste, ne nous embarquons pas non plus dans une thèse de 500 pages (on me reproche déjà suffisament souvent de faire trop long, merci).

Disons plutôt que ce qu'il y a de vraiment bien, avec le film de von Trier c'est que, d'une part, à la manière de certains opus récents de David Lynch, il donne par moment l'impression qu'il y a quelque chose derrière. Que l'on ne voit pas vraiment. Mais que votre cerveau essaye de cerner quand même, vous donnant ainsi la délicieuse impression de tourner à vide, de courir derrière quelque chose qui vous échappe.

Il y a des moments ou la vision d' "Antichrist" nous plonge dans des abîmes de complète perplexité.

Et, ça, c'est franchement agréable, oui.

De la même manière, la véritable trouille qu'il distille par endroits renvoie elle aussi par son irrationalité aux mêmes madeleines cinématographiques. Auxquelles l'on pourrait pour le coup rajouter, de manière plus triviale, des oeuvres telles que "Shining" ou même - et c'est un comble - "Le Projet Blair Witch" !
C'est dire si ça brasse large, oui, et c'est bien là - bien sûr ! -une des faiblesses du film.
En attendant, voila quand même une vraie expérience tripale, d'autant plus impressionnante qu'elle ne se racroche à rien de rationnel, que du contraire.

L'ensemble fais donc d' "Antichrist" une vrai beau momentde cinéma, que l'on aurait envie de qualifier d'ovniesque si l'image n'était pas à ce point rabâchée.

Le corollaire de ce "voyage", pourrait-on dire, se trouve évidemment dans les excès de ce roublard de von Trier dont certaines ficelles sont un peu trop grosses pour ne pas ressembler à de la pure pose et dont certains symboles - gros comme des maisons - font malheureusement retomber l'intrigant soufflé qu'il avait mis au four.

Plastiquement, à l'inverse de ces récentes expérimentations, le film confine au sublime*, renouant avec le côté ultra-maîtrisé et léché de certaines de ses premières oeuvres, "Europa" en tête.

C'est splendide, c'est vrai, oui, c'est là aussi le moins que l'on puisse dire.

Mais ici aussi, hélas, un problème se pose...

Par moment, emporté par son égo, le cinéaste en fait trop, beaucoup trop.
Et pour quelques scènes réellement fabuleuses dans la forêt (qui rappellent effectivement Tarkovski auquel le film est assez logiquement dédié) on doit s'en fader d'autres - telles la scène inaugurale et, pourrait-on presque dire - "fondatrice", dont le clinquant artificiel renvoie presque à l'esthétique d'une pub pour shampooing (mais dans ce cas précis, ça doit être à cause de la douche).

Et tout le film est comme ça.
Oscillant entre vraies audaces et fausse provoc, vista et gros sabots, transe et irritation.
A l'image de son auteur, finalement, à la fois chien fou et sale gosse, cinéaste visionnaire et enfonceur de portes ouvertes.

L'interprétation quand à elle (parce que, oui, ce serait dommage de ne pas en dire un mot) est globalement hors normes; Dafoe et Gainsbourg (visiblement TRES, TRES investie) tout deux à la limite de l'explosion et cassant tout sur leur passage, non-stop ou presque, alors qu'ils sont quand même "seuls en scène" pendant tout la durée du film.

En résumé, au final, un film peu aimable, curieux, bancal, pas clair, peut-être fumiste, peut-être mysogine, sûrement pas assez poli pour être honnête, dont l'on peut comprendre qu'il dérange (certaines scènes sont quand même youplaboum, faut bien l'avouer) mais qui à le mérite indéniable de proposer quelque chose de vraiment différent.

Et, au fond, d'assez passionnant.

Et, oui... Rien que pour ça...


Cote: ***


(*Rien que ça oui ! Allons-y, c'est ma tournée !)

3 commentaires:

LE DIABLE a dit…

Une petite question me turlupine, est ce une vrai pénètration au début du film entre les acteurs ou ce vieux briscar de Von Tiers utilise des bodydoubles.

Cartman a dit…

Ce sont des bodydoubles, dixit la Gainsbourg herself.

Cartman a dit…

Et "turlupine", c'est le mot (putain, je tiens une forme, moi !)