L'Affiche Rouge.
"L'Armée du Crime" de Robert Guédiguian (F); avec Simon Abkarian, Virginie Ledoyen, Robinson Stévenin, Lola Naymark, Grégoire Leprince-Ringuet, Ariane Ascaride...
Dans Paris occupé par les allemands, l'ouvrier, poète et militant Missak Manouchian, d'origine arménienne, rentre en Résistance et prend - un peu malgré lui - la tête d'un groupe composé de très jeunes gens. Des juifs, des communistes et anarchistes espagnols, italiens, des hongrois, des roumains... Ensemble, déterminés à libérer la France qui les a accueillis, ils vont harceler les nazis et les collaborateurs. Très vite, la police française va se déchainer...
Robert Guédiguian est un cinéaste digne.
Digne et militant.
C'est aussi un type obstiné.
Voire monomaniaque.
Voici plus de 20 ans (30, presque, en fait) qu'il trace son incontournable sillon.
S'écartant rarement de son quartier de l'Estaque, à Marseille, s'éloignant peu de ses éternels portraits de petites gens, restant fidèle à son indéboulonnable "famille" de comédiens (au premier rang desquels on retrouve bien évidemment son épouse, Ariane Ascaride, mais également des talents tels que ceux de Jacques Boudet, Gérard Meylan ou Jean-Pierre Darroussin).
Ces dernières annés, néanmoins, ou plutôt, devrait-on dire, dans ses derniers films, le cinéaste phocéen s'écarte quelque peu de ces sentiers si bien balisés par lui-même pour s'aventurer vers de nouveaux horizons, qui résonnent comme autant des nouvelles (enfin, "nouvelles", pas tant que ça, après tout) obsessions...
L'Histoire ("Le Promeneur du Champ de Mars"), le film de genre ("Lady Jane") et surtout l'exploration de ses racines arméniennes ("Le Voyage en Arménie", forcément).
Et voila que "L'Armée du Crime" regroupe et synthétise à la fois toutes ces nouvelles pistes, ces nouvelles préoccupations...
En réalisant ce beau film, digne lui aussi, un peu figé, un peu austère, presque timide, Guédiguian colle au plus près de ses origines et de celles de son peuple.
Revient sans en avoir l'air sur un génocide qui ne veut pas encore dire son nom.
Fouille les heures les plus noires et les plus douloureuses de son pays, la France (car si "L'Armée du Crime" est une charge, elle est presque exclusivement dirigée vers le rôle de la collaboration française, de sa police, du régime de Vichy, comme tout cela est très bien résumé dans l'épisode tétanisant de la Rafle du Vel'-d'Hiv', où l'officier nazi félicite le commissaire français en insistant sur le fait que les allemands n'ont "quasiment rien eut à faire").
Il reste aussi fidèle à ses convictions politiques en brossant le portrait d'un groupe de résistants apatrides réellement motivés par leur haine du nazisme et galvanisés par leurs propres idéaux - communistes, anarchistes - et combattant l'ennemi avec sans doute plus de conviction que pas mal d'autochtones.
Ce qui renvoie également à un bon paquet de préoccupations très actuelles, bien entendu...
Bien servi par une troupe d'acteurs impressionante elle aussi de conviction et d'investissement (de Simon Abkarian à Jean-Pierre Darroussin, soufflant dans son rôle de flic veule et collabo "par intérêt", en passant par Virginie Ledoyen, Lola Naymark ou le tout jeune Grégoire Leprince-Ringuet), Robert Guédiguian reste pourtant bizarrement en retrait.
Trop cérébral, trop respectueux, comme paralysé par l'importance du sujet, voire de l'enjeu, il signe un film une fois de plus digne, engagé, touchant - même - par endroits mais manquant singulièrement de ce souffle épique qui faisait la réussite de son grand frère "L'Armée des Ombres", auquel tant le titre que le sujet renvoient, comme une évidence.
Mais il n'empêche.
Derrière cet apparent vernis d'académisme, d'intellectualisme un peu froid, "L'Armée du Crime" touche quand même au plus juste de par ce qu'il raconte, ce qu'il montre et ce dont il témoigne.
Et par la sincérité de son réalisateur et de ses interprêtes.
Dont l'humble et somme toute très relative maladresse face à un sujet aussi important - et imposant - finit presque par devenir un atout.
Cote: ***
"L'Armée du Crime" de Robert Guédiguian (F); avec Simon Abkarian, Virginie Ledoyen, Robinson Stévenin, Lola Naymark, Grégoire Leprince-Ringuet, Ariane Ascaride...
Dans Paris occupé par les allemands, l'ouvrier, poète et militant Missak Manouchian, d'origine arménienne, rentre en Résistance et prend - un peu malgré lui - la tête d'un groupe composé de très jeunes gens. Des juifs, des communistes et anarchistes espagnols, italiens, des hongrois, des roumains... Ensemble, déterminés à libérer la France qui les a accueillis, ils vont harceler les nazis et les collaborateurs. Très vite, la police française va se déchainer...
Robert Guédiguian est un cinéaste digne.
Digne et militant.
C'est aussi un type obstiné.
Voire monomaniaque.
Voici plus de 20 ans (30, presque, en fait) qu'il trace son incontournable sillon.
S'écartant rarement de son quartier de l'Estaque, à Marseille, s'éloignant peu de ses éternels portraits de petites gens, restant fidèle à son indéboulonnable "famille" de comédiens (au premier rang desquels on retrouve bien évidemment son épouse, Ariane Ascaride, mais également des talents tels que ceux de Jacques Boudet, Gérard Meylan ou Jean-Pierre Darroussin).
Ces dernières annés, néanmoins, ou plutôt, devrait-on dire, dans ses derniers films, le cinéaste phocéen s'écarte quelque peu de ces sentiers si bien balisés par lui-même pour s'aventurer vers de nouveaux horizons, qui résonnent comme autant des nouvelles (enfin, "nouvelles", pas tant que ça, après tout) obsessions...
L'Histoire ("Le Promeneur du Champ de Mars"), le film de genre ("Lady Jane") et surtout l'exploration de ses racines arméniennes ("Le Voyage en Arménie", forcément).
Et voila que "L'Armée du Crime" regroupe et synthétise à la fois toutes ces nouvelles pistes, ces nouvelles préoccupations...
En réalisant ce beau film, digne lui aussi, un peu figé, un peu austère, presque timide, Guédiguian colle au plus près de ses origines et de celles de son peuple.
Revient sans en avoir l'air sur un génocide qui ne veut pas encore dire son nom.
Fouille les heures les plus noires et les plus douloureuses de son pays, la France (car si "L'Armée du Crime" est une charge, elle est presque exclusivement dirigée vers le rôle de la collaboration française, de sa police, du régime de Vichy, comme tout cela est très bien résumé dans l'épisode tétanisant de la Rafle du Vel'-d'Hiv', où l'officier nazi félicite le commissaire français en insistant sur le fait que les allemands n'ont "quasiment rien eut à faire").
Il reste aussi fidèle à ses convictions politiques en brossant le portrait d'un groupe de résistants apatrides réellement motivés par leur haine du nazisme et galvanisés par leurs propres idéaux - communistes, anarchistes - et combattant l'ennemi avec sans doute plus de conviction que pas mal d'autochtones.
Ce qui renvoie également à un bon paquet de préoccupations très actuelles, bien entendu...
Bien servi par une troupe d'acteurs impressionante elle aussi de conviction et d'investissement (de Simon Abkarian à Jean-Pierre Darroussin, soufflant dans son rôle de flic veule et collabo "par intérêt", en passant par Virginie Ledoyen, Lola Naymark ou le tout jeune Grégoire Leprince-Ringuet), Robert Guédiguian reste pourtant bizarrement en retrait.
Trop cérébral, trop respectueux, comme paralysé par l'importance du sujet, voire de l'enjeu, il signe un film une fois de plus digne, engagé, touchant - même - par endroits mais manquant singulièrement de ce souffle épique qui faisait la réussite de son grand frère "L'Armée des Ombres", auquel tant le titre que le sujet renvoient, comme une évidence.
Mais il n'empêche.
Derrière cet apparent vernis d'académisme, d'intellectualisme un peu froid, "L'Armée du Crime" touche quand même au plus juste de par ce qu'il raconte, ce qu'il montre et ce dont il témoigne.
Et par la sincérité de son réalisateur et de ses interprêtes.
Dont l'humble et somme toute très relative maladresse face à un sujet aussi important - et imposant - finit presque par devenir un atout.
Cote: ***
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