Dans les villes de grande solitude...
"Les Noces Rebelles" (Revolutionary Road) de Sam Mendes (USA); avec Leonardo Di Caprio, Kate Winslet, Michael Shannon, Kathy Bates, Dylan Baker, Zoe Kazan...
Etats-Unis, à la fin de années '60. Frank et April Wheeler sont un jeune couple aux idéaux élevés. Plein de rêves et d'ambition, il s'imaginent mener leur vie en dehors des chemins tout tracés par la société. Loin d'eux le conformisme et le ronron du quotidien. Pourtant, peu de temps après leur installation dans la banlieue résidentielle de Revolutionary Road, force leur est de constater qu'ils sont, sans s'en rendre vraiment compte, devenus tout ce qu'ils détestaient. Une famille américaine ordinaire. Pour les sortir de ce train-train, April imagine comment ils pourraient refaire leur vie à Paris...
Attention!
Autant être prévenu tout de suite, mieux vaut ne pas aller voir ce film un jour de légère déprime. Et encore moins après s'être engueulé avec son conjoint. Ca pourrait s'avérer fatal.
Car si l'on rit parfois (rarement, il faut bien l'avouer) à ces "Noces rebelles", il faut reconnaitre qu'elles sont avant tout une ode à l'ennui, à la déprime urbaine. Au malaise.
Et en ce sens, elles constituent même une sorte de monument.
Car Sam Mendes, que l'on savait pourtant doué pour décrire la déliquescence d'une certaine middle-class américaine claquemurée dans son quotidien banlieusard glauque, neurasthénique (souvenons-nous d' "American Beauty", quand même) réussit ici un tour de force implacable en portant jusqu'à des sommets rarement atteints son art consommé de l'entomologisme froid, doublé qui plus est d'une bonne dose de cynisme.
Et pour ce faire, il met tout les atouts de son côté afin de réussir un film à son niveau, c'est à dire impressionnant de maitrise.
Car tout ici, de A à Z, semble poussé à une sorte de paroxysme.
On sent le travail d'orfèvre derrière chaque poste, chaque détail...
Tout, absolument tout, de la photo à la direction artistique en passant par la magnifique et obsédante partition composée par Thomas Newman, tout, disais-je, concours à donner l'impression que l'on participe ici à une sorte de tentative de record du monde, visant l'excellence cinématographique absolue.
Comme une espèce d'expérience de cinéma total.
Un cinéma situé à des années-lumières de ce à quoi Hollywood nous à habitué ces dernières années, à quelques rares exception près ("There Will Be Blood", "No Country for Old Men", par exemple, bien que dans des genres tout à fait différents).
Un cinéma à la fois "intellectuel" (oh le vilain mot!) et populaire. Fluide et exigeant...
Bien sûr, le scénario (adapté du roman "La Fenêtre Panoramique", de Richard Yates) fait beaucoup pour la réussite de l'affaire.
Dur, froid, sans concession dans sa progression - vraiment très - dramatique, rehaussé qui plus est par des dialogues qui claquent, secs comme des coups de trique, il emporte le spectateur dans une sorte de tragédie d'autant plus étouffante qu'elle avance tout d'abord à pas feutrés.
La mise en scène, intense, précise, presque clinique, vient souligner douloureusement le tout comme si Mendes nous plantait autant de banderilles dans le corps.
Et bien entendu, tout cela ne serait rien sans la qualité unilatérale de l'interprétation.
Di Caprio ayant gagné en épaisseur depuis quelques temps porte douloureusement son personnage de petit employé terne (c'est un comble) et minablement queutard.
Et Kate Winslet emporte le morceau avec une rare intensité, allant jusqu'à quasiment transcender les difficiles scènes finales.
Le film se paye même le luxe supplémentaire d'une révélation en la personne de Michael Shannon, dans le rôle du fils schizophrène de la voisine/agent immobilier (Kathy Bates).
Le garçon n'a que deux scènes sur tout le film mais autant dire tout de suite qu'elle sont carrément terrifiantes, tétanisantes!
Et que la dernière réplique qu'il profère (ou éructe, c'est selon) trainera longtemps encore dans les mémoires...
Alors, que cela soit dit, on peut tout à fait ne pas adhérer au côté ultra perfectionniste des "Noces Rebelles", lui trouver un côté glacé, peu engageant.
Mais il n'empêche!
Teigneux et tendu comme un slip, incroyable de violence psychologique sourde, le film de Sam Mendes - dont le sujet et le traitement font parfois penser au "Démon", le chef-d'oeuvre d'Hubert Selby Jr. - est peut-être un film peu aimable, c'est vrai.
Mais une chose est sûre: il mérite l'effort. Et se doit d'être vu!
Cote: ****
jeudi 5 février 2009
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5 commentaires:
C'est vraiment bon ce truc ou c'est pour faire ton intello...
C'est sûrement pour faire un peu l'intello. Même si ça a l'air crédible (mais pas pour moi, pas assez d'explosions).
C'est pour de faire mon malinois, bien entendu.
Non, sérieux, c'est vraiment terrip'!
Je vois que tu a mis Benjamin Button au top,je viens de le voir et j'ai même pleuré.c'est tout dire.
Oui, j'ai eu ma petite larmichette à la fin aussi.
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