lundi 18 février 2008
Le voyage du père.
"Dans la Vallée d'Elah" (In the Valley of Elah) de Paul Haggis (USA); avec Tommy Lee Jones, Charlize Theron, Jason Patric, Susan Sarandon, Josh Brolin, James Franco...
Mike Deerfield, de retour d'Irak pour sa première permission, disparait mystérieusement et est signalé comme déserteur. Ne voulant pas croire à la version officielle, son père, ancien policier militaire, part à sa recherche...
Ce qui frappe tout d'abord avec ce second effort de Paul Haggis en tant que réalisateur c'est la sobriété et surtout la dignité avec laquelle il a mené son affaire...
Une sobriété toute eastwoodienne, un terme décidément très à la mode ces derniers temps mais d'autant moins usurpé ici que Haggis est un habitué de l'univers du vieux Clint, pour qui il a signé quelques scénarios récents ("Million Dollar Baby" et le dyptique "Flags..."/"...Iwo Jima").
Car c'est peu dire qu'avec un sujet pareil on pouvait s'attendre à de torrentiels épanchements lacrymaux. Ou même à une gigantesque guimauve patriotique.
Or, même si l'émotion est présente - et bien présente - et même si la débauche de drapeaux en tout genres (dans le film, sur l'affiche...) ainsi que quelques uns des comportements et remarques des principaux protagonistes peuvent le laisser craindre, il n'en est rien.
Et heureusement...
Que du contraire, même, car tout, au fur et à mesure que ce déroule le film va se conjuguer pour battre en brèche ces premières impressions et les retourner comme de vieilles chaussettes.
Les horreurs du conflit et leurs dommages collatéraux auxquels va être confronté Hank Deerfield, mettant à rude épreuve ses convictions de vieux routard patriote, sont d'autant plus subtilement rendus qu'ils sont évoqués sous le couvert d'un thriller policier totalement captivant.
Et plus l'enquête est rigoureuse, plus le mélodrame qui se monte en parallèle est efficace.
Grâce également, il faut bien le dire, à une réalisation idoine; à la fois froide dans ses lumières et ses cadrages et sensible par ses gros plans et les silences, qu'elle utilise toujours à bon escient.
Evidemment, plus que l'enquête elle-même, ce sont les dégats produits par la guerre sur les recrues, les séquelles du conflit et les découvertes de celles-ci par un homme jusque là persuadé du bien-fondé des actions de son pays à l'étranger qui sont intéressants.
Mais cette forme passionnante, presque ludique même, permet au scénario de ne jamais pontifier, empêche l'ambiance déjà quasiment mortifère de se plomber d'avantage, bref, fait passer la pilule avec une intelligence et une quasi légereté réellement bienvenues.
Le tout, plus bien évidemment l'interprétation hors norme du décidément gigantissime Tommy Lee Jones (bien entouré également, surtout du point de vue féminin), font de "Dans la Vallée d'Elah" un film âpre et rude, plein d'une rage boullonnante mais contenue.
Un film qui prend littéralement aux tripes.
Du cinéma hollywoodien, certes, mais au visage magnifiquement humain.
Du cinéma qui, de manière parfois extrèmement littérale, donne une image troublante de l'Amérique à travers la déliquescence de certains de ses mythes et l'effondremment de quelques unes de ses certitudes.
Pas un brûlot politique, non. Certainement pas. Mais pas non plus un pavé moralisateur et gnangnan.
Juste un beau film, digne et bien ficelé.
Cote: ***
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