mardi 27 novembre 2007



Un Américain bien tranquille...

"American Gangster" de Ridley Scott (USA); avec Denzel Washington, Russell Crowe, Carla Gugino, Josh Brolin, KaDee Strickland, Chiwetel Ejiofor...

New York, début des années 70. Frank Lucas a longtemps vécu dans l'ombre du parrain de Harlem Bumpy Johnson dont il était le garde du corps mais aussi le confident. A la mort de celui-ci, Frank reprend en main les affaires, discrètement mais fermement, s'entourant de ses frères et de ses cousins et s'évertuant à jouer profil bas, très bas...
Grâce à ses connaissances au Vietnam, il organise un collossal trafic d'héroïne entre l'Asie et les Etats-Unis, au nez et à la barbe des autorités et de la Mafia en place.
De son côté, Richie Rogers, flic opiniatre, enquête patiemment sur ce mystérieux marché parallèle jusqu'au jour ou ses recoupements font ressurgir le nom de Franc Lucas...

On vit une époque formidable!

Alors que le cinéma français s'échine avec des fortunes diverses à remettre au goût du jour une certaine production "à l'ancienne" qui au mieux amuse ("L'Heure Zéro") au pire tombe lamentablement à plat ("Le Dernier Gang") les cinéastes américains, de leur côté, réussissent avec bonheur la résurrection d'un cinéma de genre qui avait fait leur fortune et leur gloire dans les années '70.

On avait déjà eu l'occasion de regoûter à la recette vintage du film noir, voire de la véritable saga criminelle avec le copieux (et formidable) "Zodiac".
On avait fait un détour remarqué et remarquable par la case du thriller politico-paranoïaque avec le plaisant "Michael Clayton"... Nous voila donc de retour en terrain balisé mais néanmoins fangeux avec cet "American Gangster" tout aussi roboratif (2h37, plus de cent personnages et cent-cinquante extérieurs) et à la réussite elle aussi affirmée.

Sec, nerveux et racé tout en n'oubliant pas de livrer au spectateur sa part de grand spectacle, le film de Ridley Scott - qui a eu la bonne idée de remiser pour l'occasion au placard les tics de clippeur dont il s'encombre trop souvent - est une sorte de sommet du polar, avec son duel de stars livré sur un plateau , sa mythologie urbaine revisitée et magnifiée et ses digressions âpres, presque documentaires...

La magnifique photo crépusculaire d'Harris Savides permet au réalisateur de limiter ses effets et de dépouiller son film jusqu'à en atteindre la substantifique moëlle.
Le scénario subtil de Steven Zaillian et l'interprétation sobre et habitée de Denzel Washington et Russel Crowe (sans oublier une tablée de seconds rôles au rang desquels il serait impensable de ne pas citer Josh Brolin et Chiwetel Ejiofor) font le reste.

Et du coup le film emballe parce que, malgré son côté parfois un peu didactique, sa figure centrale, ce gangster black au service de sa communauté confronté à un policier roublard dont, par opposition, la vie personnelle est un désastre rejoint au panthéon les grands personnages de l'histoire du cinéma américain. Les Tony Montana ou les Michael Corleone...

Se jouant habilement des références - les contournant même! - et transformant en atout une mise en scène volontairement discrète mais servie par un montage subtil et nerveux, Scott arrive à nous tenir en haleine jusqu'au bout!
Jusqu'a la rencontre finale entre ses deux protagonistes qui jusque là avaient joué un subtil jeu du chat et de la souris.
Pour aboutir à une fin d'autant plus étonnante - et satisfaisante- qu'elle est parait-il rigoureusement authentique.

A la fois sobre et spectaculaire, puissant et rythmé, "American Gangster" confirme avec d'autres le retour d'un cinéma de genre américain comme on les aime et se paye en plus le luxe d'être probablement l'un des meilleurs films de l'année.

Ni plus, ni moins...


Côte: ***

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