jeudi 29 novembre 2007



"Londres, cité de putains et de pédés!"*

"Les Promesses de l'Ombre" (Eastern Promises) de David Cronenberg (CAN); avec Viggo Mortensen, Naomi Watts, Vincent Cassel, Armin Müller-Stahl, Sinéad Cusack, Jerzy Skolimowski...

Londres. Après qu'une jeune femme russe soit morte en couche dans son service, Anna, sage-femme opiniâtre, tente de remonter sa piste afin de retrouver la famille du bébé auquel elle a donné naissance.
Le journal intime de la jeune fille la conduit sur la piste de Semyon, paisible propriétaire du restaurant Trans-Siberian.
Sans qu'elle ne se doute que celui-ci est en fait un des chefs locaux de la redoutable Mafia russe....

C'est étonnant de voir à quel point l'oeuvre de Cronenberg s'épure de film en film, jusqu'a devenir accessible, presque linéaire. Mais sans pour autant perdre de sa force ni de sa pertinence...

Poursuivant le travail entâmé avec le précédent "History of Violence" dont il est une sorte de double encore plus sombre, "Les Promesses de l'Ombre" se présente comme une véritable et impitoyable tragédie - russe, grecque ou shaekesparienne, au choix - dont la violence implacable est d'autant plus glaçante que la réalisation se veut, en contrepoint, résolument non-spectaculaire.

A une exception près, peut-être: cette fameuse et invraisemblable scène de baston à poil dans un sauna, chorégraphiée comme une sorte de combat de gladiateurs gays et qui constitue bien sûr le point culminant du film.

En dehors de cela, Cronenberg va à l'essentiel et offre une oeuvre cohérente et limpide, dans laquelle la violence découle logiquement des relations entre des hommes dont les codes, admirablement décortiqués par le cinéaste, les poussent à sombrer dans une sorte de schizophrénie permanente.

Ballets des corps tatoués, valse des trahisons, imbroglio de filiations douteuses... Cet opéra lyrique et froid brasse toutes les obessions de Cronenberg: du fétichisme qu'il entretient envers la chair, les maladies et les mutations à sa passion pour les milieux clos ou la sexualité trouble, tout en les mettant au service d'une partition d'exception, dominée par une direction d'acteurs à proprement parler époustouflante.

Au milieu de ce tumulte d'autant plus soufflant qu'il est toujours maintenu légèrement en dessous de la surface, le canadien fait en effet se téléscoper des personnages dignes du meilleur de la littérature slave.
Le trouble Nicolai (Mortensen, impressionnant), la déterminée Anna (Naomi Watts, très "à sa place"), le dégénéré Kirill (Vincent Cassel, grotesque mais attachant) ou le suave mais très inquiétant Semyon (Armin Müller-Stahl, carrément titanesque) sont autant de pièces dans cette partie d'échecs étoudissante et vénéneuse.

Des pièces qui sont véritablement le coeur et la mécanique du film.

Sur la fin, le polar barbare et curieusement érotisé cède doucement la place à un véritable thriller, de facture beaucoup plus classique, avec des retournements de situations étonnants qui débouchent vers ce qui semble être à première vue une happy-end complètement en porte-à-faux avec le reste du film.

Mais bizarrement on accepte sans broncher ce brusque changement de ton et on se laisse prendre au jeu de ce coda étrange parce que trop commun.
Car l'on se rend bien compte de toute l'ambiguïté que Cronenberg à réussi à insuffler à cette fin trop banale.
Et que l'on comprend que rien, finalement, n'est exactement ce qu'il semble être.
Que rien n'est fini.
Que tout n'a pas été dit.
Que rien n'est simple.
Et que sous ses dehors de série B peut-être vaguement auteurisante, "Les Promesses de l'Ombre" cache sans doute dans ses replis moites et obscurs l'un des meilleurs films de son auteur.

Et surtout un grand film tout court.


Côte: ****


(* ce titre n' a pas grand'chose à voir avec la critique elle-même, c'est juste une citation du film que je voulais absolument placer).

mercredi 28 novembre 2007

Heroes and Icons...



(Jack Nicholson - b. 1937)

mardi 27 novembre 2007



Un Américain bien tranquille...

"American Gangster" de Ridley Scott (USA); avec Denzel Washington, Russell Crowe, Carla Gugino, Josh Brolin, KaDee Strickland, Chiwetel Ejiofor...

New York, début des années 70. Frank Lucas a longtemps vécu dans l'ombre du parrain de Harlem Bumpy Johnson dont il était le garde du corps mais aussi le confident. A la mort de celui-ci, Frank reprend en main les affaires, discrètement mais fermement, s'entourant de ses frères et de ses cousins et s'évertuant à jouer profil bas, très bas...
Grâce à ses connaissances au Vietnam, il organise un collossal trafic d'héroïne entre l'Asie et les Etats-Unis, au nez et à la barbe des autorités et de la Mafia en place.
De son côté, Richie Rogers, flic opiniatre, enquête patiemment sur ce mystérieux marché parallèle jusqu'au jour ou ses recoupements font ressurgir le nom de Franc Lucas...

On vit une époque formidable!

Alors que le cinéma français s'échine avec des fortunes diverses à remettre au goût du jour une certaine production "à l'ancienne" qui au mieux amuse ("L'Heure Zéro") au pire tombe lamentablement à plat ("Le Dernier Gang") les cinéastes américains, de leur côté, réussissent avec bonheur la résurrection d'un cinéma de genre qui avait fait leur fortune et leur gloire dans les années '70.

On avait déjà eu l'occasion de regoûter à la recette vintage du film noir, voire de la véritable saga criminelle avec le copieux (et formidable) "Zodiac".
On avait fait un détour remarqué et remarquable par la case du thriller politico-paranoïaque avec le plaisant "Michael Clayton"... Nous voila donc de retour en terrain balisé mais néanmoins fangeux avec cet "American Gangster" tout aussi roboratif (2h37, plus de cent personnages et cent-cinquante extérieurs) et à la réussite elle aussi affirmée.

Sec, nerveux et racé tout en n'oubliant pas de livrer au spectateur sa part de grand spectacle, le film de Ridley Scott - qui a eu la bonne idée de remiser pour l'occasion au placard les tics de clippeur dont il s'encombre trop souvent - est une sorte de sommet du polar, avec son duel de stars livré sur un plateau , sa mythologie urbaine revisitée et magnifiée et ses digressions âpres, presque documentaires...

La magnifique photo crépusculaire d'Harris Savides permet au réalisateur de limiter ses effets et de dépouiller son film jusqu'à en atteindre la substantifique moëlle.
Le scénario subtil de Steven Zaillian et l'interprétation sobre et habitée de Denzel Washington et Russel Crowe (sans oublier une tablée de seconds rôles au rang desquels il serait impensable de ne pas citer Josh Brolin et Chiwetel Ejiofor) font le reste.

Et du coup le film emballe parce que, malgré son côté parfois un peu didactique, sa figure centrale, ce gangster black au service de sa communauté confronté à un policier roublard dont, par opposition, la vie personnelle est un désastre rejoint au panthéon les grands personnages de l'histoire du cinéma américain. Les Tony Montana ou les Michael Corleone...

Se jouant habilement des références - les contournant même! - et transformant en atout une mise en scène volontairement discrète mais servie par un montage subtil et nerveux, Scott arrive à nous tenir en haleine jusqu'au bout!
Jusqu'a la rencontre finale entre ses deux protagonistes qui jusque là avaient joué un subtil jeu du chat et de la souris.
Pour aboutir à une fin d'autant plus étonnante - et satisfaisante- qu'elle est parait-il rigoureusement authentique.

A la fois sobre et spectaculaire, puissant et rythmé, "American Gangster" confirme avec d'autres le retour d'un cinéma de genre américain comme on les aime et se paye en plus le luxe d'être probablement l'un des meilleurs films de l'année.

Ni plus, ni moins...


Côte: ***

lundi 26 novembre 2007



Conversation secrète...

"L'Homme sans Age" (Youth without Youth); de Francis Ford Coppola (USA) avec Tim Roth, Alexandra Maria Lara, Bruno Ganz, Alexandra Pirici, Marcel Iures, Matt Damon...

Roumanie, 1938. Dominic Mattei, vieux professeur de linguistique en fin de vie est soudainement frappé par la foudre. Miraculeusement rajeuni, ses facultés mentales visiblement décuplées, il s'attèle enfin au parachèvement de ce qu'il considère comme l'oeuvre de sa vie: une recherche sur les origines du langage.

Bon, allez, n'y allons pas par quatre chemins: il est évident que ce qui est intéressant avec "L'Homme sans Age" ce n'est pas tant le film en lui-même que le retour de Coppola parmi les vivants après prèsque dix ans d'absence.

Faut-il pour autant négliger l'oeuvre elle-même et se désintéresser d'un film que le cinéaste lui-même qualifie d' "oeuvre de jeunesse réalisée à 68 ans"?
Non pas.

Car l'objet lui-même, si tordu et curieux soit-il, est particulièrement intriguant de par sa forme, son sujet et son côté à la fois libéré et maladroit.
Par son ambition et son orgueil, aussi.
Car orgueilleux le film l'est, qui essaye de brasser ultra-large des sujets aussi divers que la langue, la mémoire, la culture, les races et l'Amour avec un très grand "A".
Et c'est probablement là l'un de ses plus intéressants points communs avec son auteur, dont le côté mégalomane à failli le perdre plus d'une fois.
Un orgueil d'autant plus étonnant que Coppola crie sur tout les toits en être débarassé, lui qui, du temps d' "Apocalypse Now", ne supportait pas d'être remis en question et gérait ses équipes comme l'on dirige une armée.

Parce que oui, sur le fond, "L'Homme sans Age" est un film qui se prend au sérieux.
Et d'autant plus qu'il s'agit en fait d'un autoportrait dans lequel Coppola retrouve la plupart de ses obsessions.
La métaphore est on ne peut plus évidente: l'homme sans âge c'est lui, tout le monde l'aura compris. Ce n'était d'ailleurs peut-être pas nécéssaire de forcer ainsi le trait...

Le film est tout en excès, quitte à frôler le grotesque mais il reste étonnamment froid et cérébral aussi.
Tant et si bien que l'on se perd corps et biens dans ce tourbillon de langages qui se complexifie d'épisodes en épisodes jusqu'a finalement nous laisser totalement sur le carreau.
Idem pour l'histoire (ou "les histoires") d'amour, d'ailleurs, tellement désincarnée qu'on finit presque par s'en désintéresser.
Et pourtant Dieu sait que l'on comprend la passion qui lie le personnage de Tim Roth à la magnifique et bouleversante Alexandra Maria Lara.

Mais bien sûr, ce sont également ces excès, ces maladresses et ces expérimentations qui font paradoxalement la force et l'intérêt du film.

Ca et la forme, bien entendu.
Car de ce côté-là aussi, Coppola fait son grand retour et prouve à quel point c'est un artiste avec lequel il faut encore compter.
Multipliant les techniques (traditionnel et numérique), les styles (la splendide et étonnante partie "allemande" du film, hommage appuyé à l'expressionnisme) et les points de vues, "L'Homme sans Age" séduit certainement plus par la luxuriance de sa forme que par la cohérence de son propos.

Mais en fin de compte ce qui est le plus important, ce n'est pas tant le film lui-même - qui s'écoute penser et qui s'égare au fur et à mesure qu'il se déroule dans des univers et des propos de plus en plus fumeux - que ce qu'il annonce.
Soit le retour aux affaires d'un des plus grands cinéastes du XXème siècle après trop d'années passées à exécuter des commandes dont il n'était pas digne. Et sa volonté affirmée - et presque touchante - d'aller au bout de ce en quoi il croit.

Et rien que pour ça il mérite d'exister.


Côte: **

lundi 19 novembre 2007



Plum pudding, kouign amann...

"L'Heure Zéro" de Pascal Thomas (F); avec Laura Smet, Melvil Poupaud, Danielle Darrieux, François Morel, Chiara Mastroianni, Alessandra Martines...

Guillaume Neuville a eu l'idée saugrenue de convier son ex-femme pour les vacances à la Pointe-aux-Mouettes, chez sa tante richissime, afin de lui présenter la nouvelle élue de son coeur.
L'atmosphère déjà tendue - voire explosive! - du week-end va carrément tourner à l'hystérie lorsque la vieille tantine est retrouvée morte dans son lit, le crâne fracassé...

Eh bien oui, donc! Comme promis, je l'ai fait!
J'ai poussé encore plus loin la logique de ma semaine "perles du terroir" en allant voir cette "Heure Zéro" que tout désignait comme une franchouillerie de la plus belle eau à peine digne d'un épisode d' "Au Théatre ce Soir"...

Et what a nice, what a pleasant surprise...
Quelle jolie petite friandise que voila.

Bon, oui, j'y suis allé d'une part parce que je garde de bons souvenirs du cinéma de Pascal Thomas du moins tel qu'il le pratiquait dans les années 70/80 et d'autre part parce qu'Agatha Christie, surtout à l'écran, y a rien à faire, j'aime bien...
Aaahh! Les Hercule Poirot avec Peter Ustinov!... "Mort sur le Nil", "Meurtre au Soleil"... Ou même l' "Orient-Express" de Lumet avec Albert Finney et sa moustache gominée...
Les whodunnit, la campagne anglaise...
Oui, bon, ici ça se passe en France...
Mais Thomas à eu le bon goût de situer l'action en Bretagne, ce qui est quand même plus proche de l'ambiance british chère à Agatha que la Savoie de "Mon Petit Doigt m'a Dit" son précédent effort du genre...

Pour le reste...

Alors oui, c'est sûr, c'est surrané...

C'est plan-plan...

C'est filmé comme un téléfilm de luxe!

Mais l'intrigue est captivante et tout le côté fou-fou et attachant du cinéma de Pascal Thomas est là pour qu'on ne s'ennuie pas, que du contraire: Danielle Darrieux (bientôt 100 ans, mazette!) fume de l'opium, François Morel chante des petites comptines à base de Miss Marple et Columbo, un orchestre joue sur la falaise, on entend une chanson en chinois et tout le monde surjoue!
En particulier Melvil Poupaud et Laura Smet, absolument hallucinante dans un contre-emploi de femme fatale vulgaire et hystérique!

Mais on se laisse prendre au jeu!
Après tout, tout cela ne mange pas de pain même si on aura commencé à l'oublier dès qu'on aura fait trois pas en dehors de la salle de cinéma...

Ah! Et puis basta! De toute façon, on se sera fait plaisir avec cette pâtisserie de grand-mère, traversée d'éclairs de bizarrerie, somme toute assez "Vieille France" mais qui finit par être agréable et rassurante comme un souvenir de parties de Cluedo et de dimanches après-midi...



Côte: **

(A noter qu'après cet intermède spécial Jacques Martin on revient bientôt à des choses plus sérieuses avec "L'Homme sans Age" - le retour du Gros Coppola - et surtout "American Gangster"!)

jeudi 8 novembre 2007



Faites entrer l'accusé!

"Le Dernier Gang" d'Ariel Zeitoun (F); avec Vincent Elbaz, Clémence Poésy, Sami Bouajila, Gilles Lellouche, Pascal Elbé, Michel Boujenah...

Librement inspiré de l'histoire du fameux "Gang des Postiches", le parcours de Simon et de sa bande, des petits larcins commis à Belleville jusqu'aux braquages surmédiatisés avec prise d'otages à la clef...

Ouais, ouais, ouais, ouais, ouais...

Evidemment, vous me direz, je n'ai que ce que je mérite.
Quelle idée aussi d'aller voir un truc pareil!
C'est vrai.
Ariel Zeitoun et sa filmographie fleurant bon le jardin potager, ça aurait déjà du être suffisant pour me mettre la puce à l'oreille. Voir me faire sentir l'oignon.
C'est vrai aussi.
On le voyait venir de loin avec ses gros sabots, ce film qui brandit bien haut son label AOC "inspiré d'une histoire vraie" et ressemble à l'arrivée à une fausse-couche télévisuelle à la Christophe Hondelatte (d'ou le titre, oui).

Mais quand même...

Quand même...

Moi, les polars du dimanche soir, j'aime encore bien.
"Faites entrer l'accusé", justement, avec son ambiance anxiogène pour ménagère de beaucoup moins de cinquante ans (sinon, à cette heure là elles sont déjà couchées) je suis assez fan, je l'avoue.
Même pas une casserole, juste un plaisir coupable.
Alors, dans cette vague "retour au cinéma de papa" (cfr."Le Deuxième Souffle") il me paraissait bien, ce "Gang", avec son histoire vraie triturée à l'ancienne, son joli casting et sa mise en scène plan-plan pas trop fatiguante.

Mais bon, allez quoi, il aurait quand même fallu un peu se retirer les doigts du cul pour arriver à quelque chose, non?
Parce que là... Là, vraiment...
Et encore, le pire c'est qu'on voit qu'ils ont essayés, tous!
On la sent bien, la motivation, l'envie même...
On la capte bien, la bonne ambiance, franche et décomplexée, qui a du régner sur le tournage.
Alors pourquoi? Pourquoi, malgré tout, tout cela a-t-il tourné en eau de boudin?

D'abord parce que "ambiance franche et décomplexée" je veux bien mais de là à ne vraiment pas en branler une niveau mise en scène faut quand même pas pousser!
Sérieux, c'est filmé comme un téléfilm du service public!
Y a pas de souffle, y a pas d'envergure, y a rien!
Une ou deux scènes à sauver peut-être, comme le passage à tabac de Vincent Elbaz, étonnant au milieu d'une oeuvre aussi globalement amorphe.
Mais, allez, ça ne fait pas un film.

Ensuite parce que le cinéma de papa et les valeurs de jadis ça va cinq minutes mais, inspiré d'une histoire vraie ou pas, ce film-ci avec son petit couplet poussiéreux sur les bandits au grand coeur, les brigands old school et leur code d'honneur et les braves filles qui tombent amoureuses des voyoux flamboyants on a déjà donné et largement, merci.
Passons à autre chose. Par pitié!
D'abord c'est du déjà vu, ensuite on y croit pas une seconde, c'est tout.
On est plus au temps des "Dossiers de l'Ecran" ou de Catherine Langeais! C'est fini, "La Séquence du Téléspectateur"!

Enfin, parce que "joli casting", oui, mais encore aurait-il fallu qu'il fonctionne.
Oui, bon, allez, Elbaz est pas mal, d'accord. mais à part ça?
A part ça, eh bien Clémence Poésy est charmante avec son air de sortir d'un Scopitone de Françoise Hardy mais elle a une autre expression, à part celle du lapin pris dans les phares?
L'excellent Gilles Lellouche est sous-exploité quand on ne le ridiculise pas carrément à grands coups de barbes postiches (vous me direz, c'est de circonstance) et de déguisements à la con.
Et Michel Boujenah traverse lefilm en ayant l'air de se demander ce qu'il fout là. Nous aussi, notez.
Reste peut-être Sami Bouajila, pas mal même si on a du mal à le calculer en gangster. Mais bon... C'est maigre! Plus que maigre... Comme l'ensemble du film.

Voilà donc un pâle brol loupé sur lequel on pourra peut-être se contenter de zapper, d'ici quelques mois, quand il passera un dimanche sur TF1 en deuxième partie de soirée.

A part ça... Circulez, y a pas grand' chose à voir.


PS: mais on continue à sombrer dans les tréfonds du cinéma de terroir. Prochainement ici, croyez-le ou non, "L'Heure Zéro" de Pascal Thomas, d'après Agatha Christie! Minga! Rien ne vous sera épargné!


Côte: * (pour Elbaz et une ou deux scènes et, oui, ici aussi c'est bien payé)

mardi 6 novembre 2007




Code Name: The Cleaner.

"Michael Clayton" de Tony Gilroy (USA); avec George Clooney, Tilda Swinton, Tom Wilkinson, Sidney Pollack, Douglas McGrath, Michael O'Keefe...

Michael Clayon est avocat dans l'un des plus grands cabinets juridiques new-yorkais. C'est un homme de l'ombre, régulièrement chargé de faire le ménage derrière ses petits camarades. Après le pétage de plomb spectaculaire de l'un de ses collègues on lui confie le dossier d'une puissante multinationale spécialisée dans l'agrochimie...

L'administration Bush aura-t-elle au moins eu ceci de positif qu'elle aurait poussé Hollywood à renouer avec sa veine politico-sociale, celle qui fit les beaux jours d'un certain cinéma dans les années '70?

On peut le penser à la vision de ce "Michael Clayton" à l'intrigue délicieusement alambiquée qui nous emmène fouiller dans les placards peu reluisants des grandes firmes d'avocats et ceux, plus putrides encores, des multinationales et du business de l'agrochimie.

Bien sûr, même si le scénario est un peu embrouillé, Tony Gilroy reste plutôt à la surface des choses, cinéma américain oblige. Mais on se laisse facilement prendre au jeu de ce film noir post-moderne à la paranoïa savamment distillée par une mise en scène en flash backs, fragmentée et kaléïdoscopique.

La mise en image est sobre et efficace, rendue plus tendue encore par une lumière extrèmement froide et est toute entière construite autour d'un George Clooney omniprésent, qui met tout son charisme et son dynamisme naturels au service de l'histoire.
Les seconds rôles sont au diapason, de Sidney Pollack - véritable "caution historique" du film - à Tilda Swinton et Tom Wilkinson qui déballent tout deux un grand numéro...

Pas révolutionnaire, non, mais faisant preuve d'une maitrise et d'un savoir-faire exemplaire, le premier film du scénariste Tony Gilroy (la saga Jason Bourne) est donc un solide exercice à l'ancienne, rendant bien l'ambiance un peu dépressive d'un milieu somme toute peu photogénique (celui des avocats d'affaire) plus qu'il ne dénonce réellement la catastrophe écologique qui, en filigrane, est montrée du doigt.

On regrettera néanmoins l'épilogue qui, bien qu'extrèmement efficace et jouissif, est un peu trop téléphoné alors que le "rebondissement" final laissait entrevoir un dénouement beaucoup plus subtil et étonnant, sorte de déclinaison de celui du "Profession: Reporter" d'Antonioni...

Reste qu'après avoir fait ses preuves en tant que scénariste, monsieur Tony Gilroy nous présente une bien belle carte de visite et nous laisse à penser qu'il sera probablement un cinéaste à suivre de près...


Côte: ***

jeudi 1 novembre 2007



Orient Express.

"Le Deuxième Souffle" d'Alain Corneau (F); avec Daniel Auteuil, Monica Bellucci, Michel Blanc, Jacques Dutronc, Gilbert Melki, Eric Cantona...

Paris, années 60. Gu Minda, célèbre ponte du Milieu s'évade de Centrale. Pour pouvoir fuir en Italie en compagnie de Manouche, la femme qu'il aime, il accepte de participer à un dernier coup...

La question qu'on se pose évidemment à la vision de cet upgrade du "Deuxième Souffle" de Melville, prétendument plus fidèle au roman d'origine de José Giovanni (que je n'ai pas lu) c'est "à quoi bon?".
Ou plutôt: "était-ce bien nécéssaire".

Tout n'avait-il pas en effet été dit - et bien dit - dans l'original?

Mais bien vite on comprend ce qui a motivé Corneau (autre spécialiste du polar "à la française". Souvenez-vous de "Série Noire", entre autres) dans cette redite.
Car c'est facile d'y voir une espèce de challenge...
Une tentative de relecture et, au-delà de l'exercice de style, une proposition de cinéma originale et excitante.
Même si loin d'être aboutie.

Le cinéaste propose en effet une tentative de redynamisation du cinéma de papa - ou du moins d'un certain style de cinéma populaire gorgé de stars - en y insufflant des éléments issus du cinéma asiatique moderne, réputé dernier spécialiste en matière de "film noir".
Un cinéma chromo, marqué "qualité française", avec son décorum sixties de carte postale mais boosté par ces apports extérieurs que sont l'usage des couleurs et des lumières à la Wong Kar-Wai, les ralentis et accélérés à la Johnny To ou encore ces brèves explosions de violence chères à Kitano.
Le cinéma du dimanche réinventé extrème oriental...
Gabin et Ventura façon saké et Nuoc-Mâm...

Mais le problème c'est que ça ne marche qu'a moitié...
Tout cela fait trop toc, trop carton-pâte et, d'une certaine manière, trop kitsch que pour ne pas laisser perplexe.
Enfin... En tout cas en partie...

Le casting ne fonctionne pas trop mal, ce qui est déjà une demi-réussite quand on voit à quel point il pioche dans des univers et des "familles" différents, du Splendid Michel Blanc au footeux Cantona (qui joue comme une planche mais bon, c'est pas comme si Michel Constantin était Laurence Olivier non plus) en passant par Dutronc ou la jeune pousse Duvauchelle...

Malheureusement, c'est là où c'est essentiel que ça coince: Auteuil n'aura jamais les épaules assez larges que pour faire oublier Ventura (il est même fort peu crédible en truand quasi légendaire) et Bellucci est, comme toujours, à côté de la plaque.

Les longues plages de dialogues qui lorgnent fortement vers Audiard tombent le plus souvent à plat et sonnent trop théatrales, trop ampoulées que pour réellement fonctionner.
Et l'intrigue, pourtant savoureusement alambiquée - à l'ancienne - souffre de tous ces excès, de tout ce trop plein et finit par se distendre, jusqu'à transformer le milieu du film, par ailleurs beaucoup trop long, en un embarassant ventre mou.

Quant au final, à la limite du grotesque, mieux vaut ne rien en dire...

Bref, voilà un film qu'on aurait voulu aimer et qui, d'ailleurs, réserve quand même sa part de bons moments mais qui, malgré l'honnêteté affichée de ses intentions, ne parvient jamais à assurer ce qu'il faut pour ne serait-ce que venir à bout de son ambitieux - et épuisant - cahier des charges.

Et c'est dommage...

Trois fois dommage...



Côte: ** (pour le casting et les efforts de mise en scène mais c'est large).