samedi 13 mars 2010


De l'autre côté du miroir.

"L'Imaginarium du Docteur Parnassus" (The Imaginarium of Doctor Parnassus) de Terry Gilliam (USA); avec Heath Ledger, Christopher Plummer, Lily Cole, Johnny Depp, Jude Law, Colin Farrell...

A la tête de sa troupe de théatre ambulant, le docteur Parnassus offre aux gens la possibilité de visiter leur propre imaginaire grâce à un miroir magique. Mais le docteur a un secret: dévoré par le démon du jeu il a par deux fois parié avec le Diable. La première fois pour obtenir l'immortalité, la seconde pour échanger celle-ci contre la jeunesse. Mais ces victoires étaient assorties d'une condition: une fois arrivée à l'âge de 16 ans, la fille du docteur deviendrait la propriété du Diable, Mr. Nick... Et celui-ci est bien décidé à venir chercher son prix.

En voila bien un que l'on croyait perdu, tiens.
Peut-être pas tout à fait, peut-être pas définitivement, son oeuvre passée, associée à une certaine tendresse pour le personnage, dans le style "cinéaste maudit" (et pas qu'un peu !), tout comme ses origines Monthy Pythonesques, d'ailleurs, faisaient que l'on continuait à lui faire confiance malgré tout, voire à espérer...

A espérer, oui.
Parce qu'il faut avouer que ces dernières années, entre catastrophes industrielles (les dépassements de budget pharaoniques de "Munchaüsen", le charcutage des "Frères Grimm" par les affreux Weinstein, ou, bien entendu, le naufrage complet du mort-né "L'Homme qui tua Don Quichotte"* - magnifiquement relaté dans le making-of tourné documentaire "Lost in La Mancha") et véritables ratages artistiques ("Les Frères Grimm" susnommés ou son précédent effort, le bordélique et hystérique "Tideland"), le p'tit père Gilliam nous avait grobalement fort déçus et, pour tout dire, un peu largués en bord de route.

Dans la séries des Tuiles en Or dont il s'est fait une spécialité, cet "Imaginarium" ne déroge pas à la tradition et se pose même un peu là, en sorte de recordman, puisque c'est bien évidemment au cours de son tournage qu'Heath Ledger rendit son dernier souffle.

On avouera que dans le genre "incident" ça explose un peu les plafonds.

Heureusement, habitué qu'il est a gérer ce genre de situation, Terry Gilliam - qui a plus d'un pot dans son tour et plus d'un tour dans son sac - a pris un mois pour relifter son scénario et a réussi tant bien que mal a sauver le navire.

Comment ?
En remplaçant Ledger par des doublures lors des passages dans l'univers parallèle de l'Imaginarium (les scènes dans le monde "réel" ayant heureusement toutes déjà été tournées).

Et quelles doublures, mazette !
Johnny Depp, Jude Law et Colin Farrell, rien de moins !

Et le plus beau, c'est que ça marche !
Ca rajoute même un côté un peu émouvant, hommage, dernier baroud d'honneur à l'aventure.

Et du coup, aussi, on retrouve le bon vieux Terry que l'on aime.

Foutraque, baroque, bordélique et attachant.

Eminemment poétique, aussi. Et complètement fou fou...

Toute la première partie est incroyablement décousue et part littérallement en totale sucette.
Mais cet apparent jemenfoutisme scénaristique et formel est à tel point au service du film, d'un univers unique et surtout d'une énergie délirante que, si l'on est client de la chose, on ne peut faire qu'adhérer.

Car l'Imaginarium est avant tout très Gilliam.
Dans ses défauts comme dans ses qualités, avec son enthousiasme presque juvénile qui le fait foncer comme un chien fou, animé de sa propre logique, droit devant, quitte à casser des trucs sur son passage...

C'est mégalo, parfois kitsch et à la limite du grotesque (toute la fin, en gros), souvent inspiré, toujours iconoclaste et déjanté...

Et comme on y retrouve bien toutes les préoccupations et l'univers de l'auteur (de "Brazil" et ses femmes volantes au "Sens de la Vie" - la scène des policiers ! - en passant par ses gravures animées "Flying Circus" style) on ne peut, au final, qu'être conquis.

Oh, évidemment, ce n'est pas un grand film, loin s'en faut.
Cramé de la tête, trop ambitieux, pas assez tenu, oui. Tout ce qu'on veut.
Et tout cela est vrai, bien entendu.

Mais au delà de ces considérations, c'est surtout un film qui donne la pèche et la banane** et qui, tout simplement et pour en finir avec les métaphores fruitières, fait plaisir.

Comme font plaisir les retrouvailles avec un vieil ami, depuis trop longtemps perdu de vue.

Et qu'on espère revoir bien vite.


Cote: ***


(* Dont il devrait finalement reprendre le tournage bientôt avec Colin Farrell et Robert Duvall en lieu et place de Johnny Depp et Jean Rochefort)

(** Tu connais le sketch de la banane ?)


3 commentaires:

LE DIABLE a dit…

C'est avec des papillons le sketch de la banane.

Unknown a dit…

des morceaux de papillons écrasés.

Cartman a dit…

Vous ne regardez pas assez les Muppets.