mercredi 15 octobre 2008



Witheout.

"Blindness" de Fernando Mereilles (USA); avec Julianne Moore, Mark Ruffalo, Alice Braga, Danny Glover, Gael Garcia Bernal, Maury Chaykin...

Un pays frappé par une soudaine épidémie de cécité. Les premiers touchés sont placés en quarantaine dans un hôpital psychiatrique désaffecté. Rapidement livrés à eux-mêmes, ils vont devoir s'organiser pour survivre dans un monde sans repères où chacun peu à peu régresse jusqu'à retrouver ses plus bas instincts.

Drôle d'expérience que la vision (oui, déjà...) de ce "Blindness"...

J'étais justement en train de lire le bouquin de José Saramago (Prix Nobel 1998, excusez du peu) dont il est adapté et je ne l'avais même pas tout à fait terminé lorsque le film est sorti.
Au moment d'entrer dans la salle il devait me rester une trentaine de pages...
Autant dire que le texte et l'intrigue étaient encore plus que frais dans mon esprit lorsque j'ai vu la chose.
Et comme l'un des atouts du film est justement d'être très fidèle au livre...

Bref, j'ai beaucoup aimé "Blindness" mais je me demande encore maintenant si c'est pour les bonnes raisons...
Peut-être qu'un deuxième vision, maintenant que le livre est lu et digéré, sera nécéssaire pour faire le tri...

En attendant - et à chaud - que retenir du film en essayant d'être un tant soit peu objectif (glups!)?

Déjà le solide travail effectué par Mereilles ("La Cité de Dieu") à la réalisation.
Filtres, flous, changements de focale, saturation, jeu sur la lumière; rarement un travail sur l'image aura-t-il été en telle adéquation avec son sujet.
Facile, peut-être, surtout avec autant de cannes sur lesquelles s'appuyer.
Oui mais quand même...
Force est de reconnaitre, même si certains effets peuvent parfois paraitre un peu redondants ou légèrement... "lourdauds", que l'on est impressionné par la cohérence de l'ensemble.

La deuxième chose qui frappe, c'est la volonté de Mereilles de traiter ce sujet visuellement casse-gueule (oui, difficile de ne pas tomber dans le jeu de mot et l'image d'Epinal, ici) de manière totalement frontale, n'édulcorant en rien les scènes les plus dures du roman (et il en contient un paquet), ne nous épargnant quasiment rien de la descente aux enfers de ces gens que leur soudaine cécité fait régresser jusqu'à redevenir des animaux. Ou presque...
Seules les scènes de viol, d'ailleurs peu lisibles, sont pudiquement traitées. Mais dans leur cas, c'est le travail sur le son qui sauve la mise.

Bref, on est assez bien malmené par ce film finalement peu aimable, d'autant que l'humour de Saramago, qui désamorçait pas mal de situations dans le livre est ici plus qu'effacé, pour ne pas dire absent...

Mais tout n'est pas si sombre dans "Blindness" et l'une des forces du film est sans doute de ménager au milieu de toute cette barbarie (la deuxième partie dans la ville fait carrément penser à du Romero) quelques miraculeuses oasis de poésie pure, telles que la scène de la radio, celle de l'averse ou celle de la "toilette mortuaire", pour n'en citer que quelques unes.

Alors, bien sûr, le film peut-être taxé de naïf, voire de maladroit.
C'est vrai que le message et le sous-texte sont un peu trop démonstratifs et qu'on les voit arriver de loin avec leurs gros sabots. Mais c'est aussi ça qui en fait la réussite et l'intérêt.

Car en nous plaçant avec le personnage de Julianne Moore (assez impressionnante, comme le reste de la distribution, d'ailleurs) dans le double rôle de témoins et de juges, en évitant sciemment de prendre parti, le cinéaste parvient à nous mettre délicieusement mal à l'aise et à nous faire participer intimement à ce suspense métaphysique décidément haletant, jusqu'à nous en faire oublier les imperfections.

Reste la fin, elle aussi fidèle mais un peu nunuche, qui fait malheureusement légèrement retomber le soufflé. Une fin qui passait bien mieux dans le livre.

Comme quoi, les mots...


Cote: ***

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