lundi 1 septembre 2008



En avant pour la suédisation!

"Soyez Sympas, Rembobinez" (Be Kind, Rewind) de Michel Gondry (USA); avec Jack Black, Mos Def, Melonie Diaz, Danny Glover, Mia Farrow, Sigourney Weaver...

Après être devenu accidentellement magnétique, Jerry efface tout aussi accidentellement toutes les cassettes du vidéo-club où travaille son meilleur ami, Mike. En l'abscence du patron et pour satisfaire dans un premier temps leur fidèle cliente Mme Kimberley, une vieille dame n'ayant plus toute sa tête, les deux compères décident de retourner eux-mêmes, à toute vitesse et avec les moyens du bord des "remakes" de certains films effacés. A commencer par "S.O.S. Fantômes"... Un procédé qu'ils ont tôt fait de baptiser "suédisation"...

J'ai toujours éprouvé une certaine méfiance envers la petite bande de cinéaste branchés-bobos-new-yorkais à laquelle peut légitimement être rattaché le pourtant frenchie Michel Gondry.
Les Spike Jonze, Wes Anderson, Charlie Kaufman et autres David O. Russell, tripatouilleurs de petits films frimeurs et branchagas, toujours à la limite de la private-joke et, en ce qui me concerne en tout cas, souvent à la limite du mépris.
Du mépris pour le spectateur, s'entend, ce qui pour moi est quasiment synonyme de faute grave, dans le milieu cinématographique.

Des jeunes gens fort doués, il faut l'admettre, bien entendu (y a qu'à voir l'art assumé du cadre d'un Anderson, par exemple. A rendre jaloux Scorsese himself) mais trop préoccupés de se faire rire eux même et leurs amis au dépend du public pour livrer autre chose que des oeuvrettes intellos pompeuses qui frisent bien souvent la branlette.

A l'exception du fondateur "Dans la Peau de John Malkovich" et jusqu'au récent "A Bord du Darjeeling Limited" (toujours d'Anderson, tiens, tiens...) cela donnait généralement lieu au mieux à de gentils filmounets volatils et sans trop d'intérêt, au pire à d'énorme baudruches gonflées à l'orgueil et au "regarde-comme-je-filme"...

Et Michel Gondry ne faisait pas exception.
A part le très bon, mais encore parfois irritant "Eternal Sunshine of the Spotless Mind", pas grand chose à se mettre un tant soit peu sous la dent...

D'où, vous me voyez venir de loin je m'en doute, une excellente surprise ma foi que ce "Be Kind, Rewind" (oui, on va s'en tenir au titre original parce qu'une fois de plus, la V.F., hein...), présenté pourtant par les admirateurs du cinéaste - il y en a... - comme une oeuvre mineure...

Après un début pas terrible qui fait effectivement penser à une version "fictionnalisée" d'un épisode de "Jackass", ce petit film sympathique en diable se met en place et finit bien par vous emporter dans son univers poétique, foufou et gentillement décalé.

Un univers qui, mine de rien, se révèle être une véritable déclaration d'amour au cinéma et à ses origines et qui se double incidieusement d'une dimension "politique" à travers sa fine petite morale.
Laquelle, sans en avoir l'air, oppose une certaine forme d'artisanat militant à l'hégémonie des tout-puissants studios, voire des toutes-puissantes chaines de video-clubs, de celles et ceux qui proposent cent fois le même blockbuster à leurs clients décérébrés.

Burlesque, émouvant, intelligent, souvent hilarant (la plupart des versions "suédisées" des films sont à se pisser dessus) "Be Kind, Rewind" malgré son côté potache (ou peut-être bien à cause de lui) en devient du coup follement attachant.

Malin et particulièrement réussi grâce à l'ingénieux parallèle entretenu entre son sujet et sa mise en scène, toute de bricolage et d'expédients, le film de Gondry réussit la gagueure d'être à la fois outrancier et d'une finesse rare, maitrisé et improvisé, cérébral et ludique, ouvrant pour la première fois l'univers branque du cinéaste au monde extérieur en un grand élan sincère et - paradoxalement dans le cas de son auteur - dépourvu de prétention.

Un film qui, sans donner de leçon (oui, oui, c'est un comble!), préconise un grand retour au "fait maison" tout en réussissant l'amalgame peu commun entre film d'auteur et divertissement.

Certainement pas un chef-d'oeuvre, non.

Mais quand même peut-être une petite révolution.


Cote: ***

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