vendredi 30 mai 2008



Une femme sous influence...

"Julia" d'Erick Zonca (F/USA); avec Tilda Swinton, Saul Rubinek; Kate del Castillo, Jude Ciccolella, Camille Nata, Eugene Byrd...

Julia, déjantée, grande gueule, limite nympho et franchement alcoolique perd son emploi et commence aussi très légèrement à perdre pied... Embringuée par sa voisine dans une affaire particulièrement tirée par les cheveux, elle en arrive à kidnapper un gamin de huit ans et à fuir avec lui, direction le Mexique...

S'il y a une ombre qui plane au-dessus de "Julia", c'est bien évisdemment celle du grand Cassavetes.
John, bien entendu, pas son pénible rejeton qui ne semble pas encore avoir résolu son complexe d'Oedipe...

Dès la scène d'ouverture, on pense aux personnages féminins borderlines du cinéaste et on sait que l'on va s'embarquer dans un voyage pour le moins singulier, en compagnie d'une femme que l'on va probablement aimer et haïr tour à tour.

Mais si le personnage de Julia, présente dans quasi tous les plans, est bien entendu le pivot du film, il n'en est pas moins au service d'un Grand Oeuvre tel qu'imaginé par Zonca (réalisateur assez borderline lui-même, du moins à ce qu'il parait...): à savoir réaliser pas moins de trois films en un!

Car, si "Julia" est avant tout un grand et magnifique portrait de femme, offrant au passage à Tilda Swinton ce qui doit sans doute être considéré comme le rôle d'une vie, ce n'en est pas moins non plus un film noir - un "film de gangsters" pourrait-on presque dire - dont certains passages ne sont pas piqués des hannetons ainsi qu'une sorte de road-movie onirique et orgiaque célébrant la beauté austère des paysages du sud américain (on pense parfois à "Twentynine Palms", de Dumont, tant pour le décor que pour l'ambiance).

Et c'est peut-être là aussi que le bât blesse car, en voulant en faire trop, Zonca prend le risque, avec ce film très (trop?) long, de perdre le spectateur en cours de route.
En faisant trainer ses scènes, en n'hésitant pas à multiplier les scènes de dialogue et en prenant sans cesse ce qui ressemble à s'y méprendre à des chemins de traverse, il gonfle un peu inutilement son film, lequel, de par son sujet, aurait pourtant mérité un traitement un tant soit plus "dégraissé".
Quelque chose d'un peu plus proche de l'os...

Pour faire bref: le début et la fin du film sont formidables (et quelle réplique finale, encore une fois) mais le mileu, plus ou moins à partir du kidnapping proprement dit, accuse malheureusement un petit coup de mou et sombre peut-être trop facilement dans la redondance inutile.
Qui plus est, avouons-le, le gamin qui joue le kidnappé n'est pas très bon, avec ses sempiternels yeux en bille de Lotto, surtout face à une voleuse de scène telle que celle à qui il doit donner la réplique.
Tout cela n'arrange rien à l'affaire, évidemment...

Reste que Julia est un véritable personnage de cinéma, écorché, splendide, plein de failles et de gouaille, interpreté avec une rage sourde et tendue par une Tilda Swinton impressionante, carrément digne de tous les Oscars du monde...

C'est elle, son interprétation et le côté presque miraculeusement bancal de son histoire, telle que filmée par Erick Zonca, véritable "auteur" s'il en est, qui font de "Julia" un film unique autant que singulier.

Sans complaisance, ni voyeurisme... un spectacle assez tripal...


Cote: ***


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